Le journaliste burundais Jean Bigirimana a disparu le 22 juillet 2016, près de Bujumbura, la capitale burundaise.
1.500 jours après sa disparition, l’ONG Amnesty international demande à ce que la vérité soit faite sur le sort du journaliste Jean Bigirimana et la fin de ces pratiques de disparitions forcées au Burundi
Le 30 août 2020, Journée internationale des personnes disparues, marque les 1 500 jours depuis la disparition du journaliste burundais Jean Bigirimana, qui aurait été arrêté par le Service national de renseignement (SNR). On est sans nouvelles de Jean Bigirimana depuis le 22 juillet 2016, et son épouse Godeberthe Hakizimana et ses deux jeunes fils attendent toujours des explications.
«Plus de quatre ans après la disparition forcée de Jean Bigirimana, le fait que le gouvernement burundais n’ait toujours pas révélé ce qu’il est advenu de lui est un affront aux principes de vérité, de justice et d’obligation de rendre des comptes », a déclaré Deprose Muchena, directeur pour l’Afrique de l’Est et l’Afrique australe à Amnesty International.
« Le calvaire que vit la famille de Jean Bigirimana est inimaginable. Le gouvernement du président Evariste Ndayishimiye doit immédiatement mettre fin à la pratique de disparitions forcées, mener des enquêtes exhaustives sur ces disparitions forcées et, lorsqu’il existe suffisamment d’éléments tendant à prouver une responsabilité pénale, traduire en justice les responsables de disparitions forcées. Les familles ont le droit de connaître la vérité quant au sort réservé à leurs proches. »
Jusqu’à sa disparition, Jean Bigirimana, qui avait étudié le droit à l’université, vivait de sa passion du journalisme au sein du Groupe de Presse Iwacu, l’un des derniers organes médiatiques indépendants du Burundi.
Il faisait partie des quelques journalistes qui avaient résisté aux manœuvres d’intimidation et de harcèlement qui avaient forcé de nombreux professionnels des médias à fuir le Burundi après la tentative de coup d’État du 13 mai 2015. Cette tentative de coup d’État avait eu lieu après la décision controversée du président défunt Pierre Nkurunziza de briguer un troisième mandat.
Jean Bigirimana a été vu pour la dernière fois le 22 juillet 2016 à Bugarama, dans la province de Muramvya, à environ 45 kilomètres de la capitale Bujumbura. Des témoins ont déclaré qu’il avait été arrêté par des personnes qui semblaient faire partie du Service national de renseignement (SNR). Ce jour-là, l’un des collègues d’Iwacu de Jean Bigirimana a reçu un appel anonyme signalant son arrestation.
Les collègues d’Iwacu de Jean Bigirimana ont immédiatement commencé à le rechercher. Lorsqu’ils ont reçu des informations indiquant que deux dépouilles avaient été repérées, ils se sont précipités vers la zone signalée avec la Commission nationale indépendante des droits de l’homme du Burundi (CNIDH) et la police. Deux corps ont été découverts dans un état de décomposition avancée, mais Godeberthe Hakizimana a pu confirmer qu’aucun n’était celui de son mari. Les corps n’ont jamais été identifiés.
La lutte de Godeberthe Hakizimana pour retrouver son mari a suscité de l’hostilité : en juin 2017, elle a trouvé un message avec des menaces de mort devant chez elle. Bien qu’elle l’ait signalé à la police, aucune enquête de suivi n’a été menée. Comme pour les nombreuses autres familles de personnes disparues, la disparition de Jean Bigirimana a entraîné des conséquences matérielles et des souffrances psychologiques pour son épouse et ses enfants, qui gardent l’espoir d’obtenir des réponses.
« Le gouvernement burundais doit ratifier et mettre en œuvre la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, ce qui représenterait un premier pas en vue de rétablir la confiance des familles et des proches de victimes », a déclaré Deprose Muchena.
« Nous continuerons de nous battre pour la vérité aux côtés des proches de Jean Bigirimana, jusqu’à ce qu’ils obtiennent les réponses qu’ils méritent. »
Dans son rapport de septembre 2019, la Commission d’enquête des Nations unies sur le Burundi a fait état de « nombreux cas de disparition » et s’est dite « profondément préoccupée » par la fréquence de telles disparitions. (Fin)