Trois jeunes au marché de Ngoma: Mutesi Alice, Twizeyimana Mathias, et Umuhoza Divine
Kibungo (Ngoma): A des heures avancées de la nuit, la Ville de Ngoma dans le secteur de Kibungo, connaît une hausse élevée du prix du condom qui devient rare. Cette augmentation exponentielle du prix entraîne des partenaires déjà ivres à pratiquer des rapports sexuels non protégés, selon une jeune prostituée habituée à des sorties nocturnes, mais qui garde son anonymat.
“Souvent le gérant du bar abuse des clients subjugués par l’alcool qui lui demandent le condom. A ce moment-là, l’homme qui demande un condom parce qu’il veut dormir avec sa petite amie se voit obligé de payer deux à trois mille Frw ou même plus pour le condom. Le gérant du bar augmente le prix parce qu’il sait qu’à de telles heures, boutiques et pharmacies sont fermées, et les clients se sentiront dans l’obligation d’accepter un prix élevé. Mais la plupart des clients optent pour des rapports non protégés au lieu de dilapider leur argent. Le résultat devient une rapide propagation du VIH/SIDA dans la communauté”, confie la jeune prostituée.
Le chanteur Platine animant le public
Au moment où RBC anime un show et un jeu de théâtre dans la cellule Cyasemakamba au centre de Ngoma à des fins d’exhorter les gens à se protéger contre le VIH/SIDA, des journalistes ont sillonné la Ville et le marché en interrogeant les personnes de tout âge sur leur comportement face au VIH/SIDA. Unanimes, tous confient que Ngoma connaît une prostitution en hausse et des rapports sexuels non protégés.
Trois jeunes rencontrés au marché témoignent. Deux d’entre eux n’ont pas encore connu de rapports sexuels. Ils sont prêts à utiliser le condom pour se protéger dès qu’ils se lanceront dans l’aventure. Mathias Twizeyimana, 23 ans, est en 2ème année à l’IPRC Ngoma, section construction de cette université. Il vend des légumes au marché quand il n’est pas allé à l’école. Son souci est d’étudier. Il a des connaissances générales pour se protéger contre le VIH/SIDA. Mais comme pour ses collègues du marché, tous ignorent ce qu’on doit faire exactement en cas de viol ou des rapports non protégés. RBC est à Ngoma pour rehausser leurs connaissances, heureusement.
Divine Umuhoza, 21 ans, a terminé aussi sa 6eme année secondaire et vend des légumes. Elle confie qu’elle a son petit chéri et qu’elle recourt au condom pour se protéger. Mais elle informe qu’elle connaît d’autres jeunes qui n’utilisent pas le condom. Elle dit que la prostitution à Ngoma existe en hausse, et sans condom.
La mère Tawusi Karikumutima, 44 ans, mère de sept enfants est du même avis. Elle a déjà montré à sa fille de 14 ans que le condom est une voie pour se protéger.
“C’était incontournable. Les rapports sexuels sont inévitables au regard de notre environnement bouillant et plein de tentations. Toute adolescente est exposée au risque de grossesse précoce et du VIH/SIDA, ou encore du viol et des relations non protégées. J’ai osé dire à ma fille de m’informer quand elle est victime de l’un de ces abus. La seule réponse pour lui conserver la vie est d’aller au Centre de Santé et bénéficier d’un traitement approprié”, confie la mère Tawusi.
Mai le grand problème qui se pose aussi, c’est qu’il y a des adultes et mères qui entraînent dans la prostitution leurs filles et petites filles, comme dans un business.
“Nous en sommes témoins. Une mère couche avec des garçons qui ont l’âge de ses enfants ou de ses petits-enfants. Tout cela à cause de nouveaux alcools trop forts. ‘ubuki’ dans de petites bouteilles. On ne se contrôle plus. Des pères adultes entraînent aussi de jeunes filles dans la prostitution. Nous connaissons les auteurs de la dégradation des mœurs. Le malheur est que ce genre des rapports sexuels ne sont pas protégés. La preuve est qu’une jeune fille de 17 ans de ce groupe se réveille le lendemain avec une grossesse. L’autorité locale fait de son mieux pour appeler à plus de discipline, mais tous ne sont pas coopératifs”, souligne Rachid Hategekimana, chargé de la sécurité dans la cellule Cyasemakamba.
Rachid Hategekimana;
La présidente des prostituées à Ngoma, Rosalie Uwababyeyi, affirme que leur association compte plus 730 femmes publiques professionnelles dans 14 secteurs du district de Ngoma. Elle juge leur profession comme un métier de la honte, car elles ne peuvent pas faire autre chose pour survivre.
“Nos enfants ont grandi. Nos voisins nous considèrent avec de l’irrespect. J’ai déjà dit à mes collègues du métier que nous devons chercher à vivre autrement. Surtout que certains hommes clients ne veulent plus recourir au condom. La plupart des prostituées ont honte de porter cette étiquette au milieu des autres Rwandais”, dit-elle.
Uwababyeyi ajoute que le district veut leur apporter un appui pur initier un business et renoncer à la prostitution. Ainsi elles espèrent renoncer à l’argent issu du sexe.
“Le district prend en charge 208 jeunes filles de moins de 18 ans qui ont eu des grossesses précoces et qui ont besoin d’aide, ainsi que 622 autres filles mineures de 18 à 19 ans qui ont accouché dans leurs familles. Ce qui fait un total de plus de 830 filles mineures qui ont eu des grossesses précoces depuis Juillet 2022. Les personnes sous le régime des ARV et suivies au quotidien sont plus de 500”, précise la Directrice de la Santé au niveau du district de Ngoma, Marie Alice Dukuzimana.
Pour le cas des prostituées qui vendent leurs enfants comme un trafic humain, Dukuzimana rétorque que le district n’est pas au courant de ce cas.
“Nous avons des partenaires du district qui font de la sensibilisation et qui distribuent les condoms dans la communauté. Nous les approchons pour que la lutte contre le VIH/SIDA ait plus d’impact. Ces partenaires devraient avoir mis le district sur de telles infractions que la loi réprime”, rapporte-t-elle. (Fin)