Ouverture d’une information judiciaire contre le cardinal Ambongo
Le procureur général près la Cour de cassation de la RDC, Firmin Mvonde, a ordonné dans une note destinée au procureur général près la cour d’appel de Matete d’ouvrir une information judiciaire contre le cardinal Fridolin Ambongo, archevêque métropolitain de Kinshasa et conseiller du pape, qui accuse le gouvernement congolais d’armer les rebelles extrémistes Hutu rwandais appelés FDLR qui furent le fer de lance du génocide des Tutsi du Rwanda en 1994.
Firmin Mvonde ordonne au procureur général près la Cour d’appel de Matete d’investiguer sur le « comportement séditieux entraînant des faits infractionnels contre le Cardinal Ambongo ».
Par sa lettre du 27 avril, Firmin Mvonde accuse le prélat catholique de « violenter délibérément les consciences et de trouver un plaisir à travers la propagation de faux bruits et incitations des populations à la révolte contre les institutions établies et attentats contre les vies humaines ».
Selon le procureur général près la Cour de cassation, au moment où le pays fait face à la guerre dans sa partie orientale, il s’observe dans les comportements du prélat une constance des propos séditieux tenus lors des points de presse, interviews et sermons de nature à décourager les militaires des FARDC (Forces Armées de la RDC) qui combattent au front.
Mais aussi, ajoute-t-il, des propos incitatifs à la maltraitance par les rebelles et autres envahisseurs des populations locales déjà meurtries par autant d’années de déstabilisation.
Invité à son bureau le 25 avril pour un échange autour de certains dossiers en instruction, le cardinal Ambongo a décliné l’invitation, argumente Firmin Mvonde dans son courrier.
Pour tous ces faits répréhensibles, le parquet général près la Cour de Matete devrait donc ouvrir une information judiciaire contre le Cardinal.
« Agir autrement s’analysera en déni de justice de votre part et votre inactivisme sera considéré comme un fait de complicité avec des faits répréhensibles », prévient le procureur général près la Cour de cassation dans sa lettre adressée au procureur général près la cour d’appel de Matete.
L’archevêque influent avait critiqué lors de la messe de Pâques le pouvoir en place (NDLR de Tshisekedi) de mauvaise gestion et de poser des actes qui inciteraient des citoyens à rejoindre la rébellion du M23 (mouvement du 23 mars) dans l’Est du pays.
Au cours d’une interview accordée à l’Agence catholique Fides, Fridolin Ambongo affirme que pour vaincre le M23, le gouvernement a armé plusieurs groupes dont les miliciens anti-Tutsi appelés «Wazalando», plongeant dans l’insécurité la ville de Goma, le chef-lieu de la province du Nord-Kivu à l’Est de la RDC.
Outre les Wazalando, le Cardinal soutient que les autorités congolaises ont distribué les armes aux génocidaires FDLR qui cherchent à reconquérir le pouvoir au Rwanda par la force en vue de parachever le génocide qu’ils avaient commis en 1994 et qu’ils commentent contre les Tutsi en RDC avec la complicité de différents régimes au pouvoir à Kinshasa depuis trois décennies.
“Tous ces groupes[Wazalendo et FDLR, ndlr] sont aujourd’hui bien armés et c’est la population qui en paie le prix, générant ainsi un risque d’insécurité généralisée », a déclaré le cardinal Ambongo dans une interview avec l’Agence Fides, l’organe d’information des Œuvres pontificales missionnaires du Vatican.
Dans sa guerre totale contre le M23, le gouvernement congolais a armé les Wazalendo et les FDLR qui sont devenus le cauchemar des congolais de Goma et de ses environs.
Ces derniers jours, la terreur règne dans la ville de Goma qui est sous l’emprise des Wazalendo, des militaires congolais, des FDLR et des policiers.
Pour mettre fin à ce banditisme urbain armé, le maire de Goma a d’ores et déjà interdit à ces Wazalendo de se promener avec leurs armes dans le chef-lieu du Nord-Kivu.
Au lieu de faire appel aux Wazalendos et aux FDLR, le cardinal Ambongo propose au gouvernement de « renforcer l’armée régulière avec des soldats sélectionnés et bien formés » plutôt que de continuer avec ce « choix dangereux d’armer ces groupes qui finissent par devenir un danger pour la population, en agressant les citoyens, en commettant des vols et des meurtres, et en se lançant dans le commerce illégal des minerais extraits des mines artisanales de la région ».
Ce partenariat RDC-FDLR dont le but ultime est d’attaquer le Rwanda a déjà été dénoncé par les Nations unies, l’Union européenne (UE) et d’autres chancelleries, bien que Kinshasa ait toujours nié tout lien avec ces rebelles extrémistes hutu.
Membre du cercle très restreint autour du pape François (C9), le cardinal Fridolin Ambongo est la plus importante personnalité de l’Eglise catholique en Afrique. Il préside depuis 2023, le Symposium des conférences épiscopales d’Afrique et Madagascar (SCEAM). (Fin)