Des Burundais rapatriés de Tanzanie au centre de transit de Mabanda, dans la province de Makamba, Burundi. (24 avril 2018)
Kigali: Deux mois avant les élections présidentielle, parlementaires et municipales prévues au Burundi en mai 2020, la Commission d’enquête des Nations Unies sur le Burundi a appelé la communauté internationale à encourager le gouvernement à rouvrir l’espace démocratique, civil et politique du pays.
« Il ne s’agit pas seulement de droits humains fondamentaux, mais également d’une exigence absolue pour la tenue d’élections libres, transparentes et crédibles dans un climat pacifique », ont déclaré les membres de la Commission dans un communiqué de presse publié mardi.
Lors d’un exposé devant le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, la Commission a conclu que les huit facteurs de risque communs aux atrocités criminelles (développés en 2014 par les conseillers spéciaux des Nations Unies pour la prévention du génocide et la responsabilité de protéger) qui s’appliquaient au Burundi dans le rapport qu’elle avait présenté en septembre 2019, sont toujours d’actualité.
La Commission souligne par ailleurs que certains de ces facteurs sont « encore plus marqués qu’auparavant », à l’approche des élections au Burundi.
Les ‘Imbonerakure’ poursuivent leurs violences
La Commission a noté une détérioration de la situation en ce qui concerne le facteur de risque d’instabilité politique, économique et sécuritaire.
«Des membres de la ligue des jeunes du CNDD-FDD, les ‘Imbonerakure’, ont continué de perpétrer des homicides, des disparitions, des arrestations et des détentions arbitraires, des actes de torture et de mauvais traitements et des viols contre des membres de l’opposition politique réels ou présumés », ont dit les membres de la Commission.
« Les membres des familles des victimes sont souvent également devenus victimes de violations graves, notamment de violences sexuelles », ont-ils ajouté.
La situation des droits de l’homme au Burundi est aggravée par la forte dégradation de la situation économique, autre dimension de la crise dans laquelle ce pays d’Afrique de l’Est est embourbé depuis 2015.
La situation humanitaire demeure également préoccupante, avec 336.000 réfugiés burundais dans les pays voisins et alors que certains d’entre eux sont rentrés dans des circonstances où le « caractère volontaire » du retour est discutable.
Deux autres facteurs de risque restent d’actualité. Le premier est lié au climat généralisé d’impunité pour les violations graves des droits de l’homme et le second à la faiblesse des structures étatiques pour être en mesure de prévenir ou d’arrêter les violations.
La Commission a observé une évolution plus ambiguë concernant un autre facteur de risque, à savoir l’existence d’intentions et de motifs de recourir à la violence.
Certains autres facteurs de risque sont plus prononcés, avec une censure accrue des médias par le gouvernement en imposant, sans consultation préalable, un « Code de conduite pour les médias et les journalistes pendant la période électorale de 2020 ». Quatre journalistes d’Iwacu, l’un des derniers médias indépendants opérant au Burundi, ont été condamnés à une peine de prison en janvier 2020.
« L’augmentation du discours de haine aux dimensions politiques et/ou ethniques qui circule sans restriction sur les médias sociaux et le silence des autorités burundaises à cet égard, créent un environnement propice à la violence et aux violations des droits de l’homme, qui est un autre facteur de risque », ont alerté les membres de la Commission.
À la lumière de ces développements inquiétants, les commissaires soulignent que la tenue d’élections crédibles serait un signe important de changement démocratique et de respect des droits de l’homme.
« Mais sans mesures drastiques et immédiates, les conditions pour de telles élections ne sont pas réunies », ont-ils dit. « Après des années de souffrance, le peuple burundais a le droit de vivre dans une société réconciliée et un environnement démocratique », ont-ils souligné. (Fin)