Le 14 juillet 2023, la Chambre de première instance II de la Cour pénale internationale (« CPI » ou « la Cour ») composée du juge Chang-ho Chung, juge président, du juge Péter Kovács et de la juge María del Socorro Flores Liera, a rendu un addendum à l’ordonnance de réparation du 8 mars 2021 dans l’affaire Ntaganda.
Le procès de M. Ntaganda s’est ouvert le 2 septembre 2015. Le 8 juillet 2019, la Chambre de première instance VI de la CPI a déclaré Bosco Ntaganda coupable de 18 chefs de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, commis en Ituri, RDC, en 2002-2003. Le 7 novembre 2019, il a été condamné à une peine totale de 30 ans d’emprisonnement. La Chambre de première instance a rendu une ordonnance de réparation le 8 mars 2021. Le verdict et la peine ont été confirmé par la Chambre d’appel le 30 mars 2021. La Chambre d’appel a partiellement annulé l’ordonnance de réparation et l’a renvoyée à la Chambre de première instance pour qu’elle traite de cinq questions spécifiques.
Le juge président a lu un résumé de la décision lors de l’audience, à laquelle M. Bosco Ntaganda a pris part à distance par liaison vidéo. Les conclusions de la Chambre comprenaient l’estimation du nombre approximatif de victimes directes et indirectes de crimes contre des enfants soldats, à environ 3 000 personnes au total ; et l’estimation du nombre approximatif de victimes directes et indirectes des attaques, à environ 7 500 personnes au total. La Chambre a évalué la responsabilité de M. Ntaganda aux fins de ces réparations à 31 300 000 de dollars des États-Unis.
La Chambre a réitéré sa demande d’assistance de la Présidence pour, avec l’appui du Greffe, poursuivre la recherche de tout avoir non encore découvert que Bosco Ntaganda pourrait posséder et surveiller de manière continue sa situation financière.
Enfin, à la suite de cet addendum, la Chambre statuera sur tous les aspects du projet de plan de mise en œuvre qui ne nécessitent pas d’autres soumissions de la part du Fonds au profit des victimes de la CPI ou des parties, y compris les aspects procéduraux du mécanisme de détermination de l’admissibilité des victimes.
En mai 2012, la province du Nord-Kivu à l’Est de la RDC était en proie à la rébellion du M23 dont Bosco Ntaganda était considéré comme l’initiateur. En février 2013, après la scission du M23, l’aile pro Ntaganda s’affronte pendant plus d’une dizaine de jours avec celle de Sultani Makenga. Cette dernière prend le dessus, obligeant des centaines de fidèles de Ntaganda à traverser la frontière rwandaise.
Bosco Ntaganda avait alors trouvé refuge dans l’ambassade des Etats-Unis à Kigali et demandé son transfert à la CPI où il a été jugé. Les Etats-Unis et le Rwanda ne sont pas signataires du traité de Rome, créant la CPI. Mais Washington avait accentué la pression sur Bosco Ntaganda, promettant même une récompense de 5 millions de dollars américains à qui pouvait donner des informations pour faciliter son arrestation.
Vaincu en 2013 et en sommeil depuis dix ans, l’ancienne rébellion du M23 a repris les armes avec les mêmes revendications. Le M23 se bat principalement pour le retour dans leur pays de leurs proches qui croupissent dans des camps de réfugiés au Rwanda, en Ouganda et ailleurs dans la région depuis bientôt trente ans. Ils avaient fui les violences génocidaires et la purification ethnique dont les Tutsi sont victimes en RDC avec la complicité de leur gouvernement.
La chasse à l’homme dirigée contre les Tutsi à cause de leurs faciès s’est accentuée sur toute l’étendue de la RDC depuis la résurgence du M23. Des Congolais associés aux Tutsis sont victimes d’agressions répétées dans l’est de la RD-Congo. Plusieurs observateurs s’en inquiètent, dans un contexte préélectoral et de violence armée généralisée dans le Kivu.
Selon une perception congolaise communément admise dans la population, les Tutsi congolais que l’on qualifie de « Rwandais» constituent le cheval de Troie d’hypothétiques prétentions irrédentistes du Rwanda sur le Kivu.
L’Est congolais regorge actuellement plus de 200 groupes armés, dont le M23 qui est au cœur des tensions entre la RDC et le Rwanda. Les autorités congolaises restent persuadées que le M23 bénéficie du soutien du Rwanda, ce que le gouvernement rwandais ne cesse de balayer d’un revers de la main.
Le Rwanda accuse à son tour les dirigeants congolais de collaborer avec les génocidaires rwandais FDLR en leur fournissant des uniformes, armes et munitions dans le but de reconquérir le pouvoir au Rwanda depuis la RDC où ils sont basés et de parachever le génocide qu’ils ont commis contre les Tutsi en 1994 qui fit plus d’un million de morts.
Le Président congolais Tshisekedi a souvent qualifié les FDLR de « force résiduelle réduite au banditisme ne représentant plus de menace pour le Rwanda ». (Fin)