Ce jeune homme de 16 ans habitant Kigali prend des antirétroviraux depuis six ans. Il se dit déterminé à suivre son traitement tout au long de son existence. “Je sais que ma vie dépend de ces médicaments. Grâce à eux, je pourrai être utile pour les autres et pour mon pays. Pourquoi pas ?”, dit ce garçon très brillant et sans complexe bien qu’il soit infecté par le VIH/sida. “Quand j’ai appris que je n’étais pas seul à porter cette croix, cela m’a redonné de la force de mener un combat de toujours pour bien entretenir mon corps et ainsi freiner la propagation du virus dans mon organisme”, explique-t-il.
Des petites filles et des petits garçons, infectés comme lui, suivis par l’hôpital de Kabgayi, au sud du Rwanda, jouent à la balançoire. Ils ont l’air de bien se connaître. “Ce sont des enfants séropositifs qui viennent pour le rendez-vous avec notre service. Ils connaissent leur état de santé. Nous parlons avec eux des problèmes qu’ils rencontrent… Ils partagent non seulement les jeux mais aussi le manger. Ainsi, chacun comprend qu’il n’est pas isolé et seul à endurer ce mal”, explique cette dame du service des ARVs, chargée de suivre les enfants vivant avec le VIH dans cet hôpital.
Connaître son état sérologique
En effet, les enfants séropositifs qui connaissent à temps leur état sont plus responsables. Cet orphelin de 14 ans l’a appris il y a deux ans. “Avant, il me demandait quand finiront ces cures quotidiennes. Quand les services d’ARVs lui ont annoncé sa séropositivité, il s’est découragé et voulait savoir quand il mourrait. Avec un soutien psychosocial, il s’est accepté et c’est lui-même qui me demande le ticket pour aller prendre des provisions d’antirétroviraux quand ils sont épuisés”, témoigne sa grand-mère qui le prend en charge.
Ceux qui s’occupent des sidéens affirment que connaître son état sérologique est déjà un « médicament ». Au TRAC Plus, Centre de recherche et de traitement du VIH/sida, à Kigali, l’annonce se fait par étapes. Avant de leur révéler leur état, les enfants sous antirétroviraux suivent une séance imagée, où le VIH est comparé à un petit homme qui avec une clé entre dans le corps de la personne pour le détruire. Des militaires gardes du corps qui représentent les CD4 (les antirétroviraux) assurent sa défense. Et là, on explique aux enfants que ces militaires qui combattent le petit homme vivent grâce aux antirétroviraux. Ainsi, les patients comprennent l’importance de prendre régulièrement les médicaments. ”Il est conseillé de procéder étape par étape dans l’annonce de l’état de santé que vit l’enfant, sinon il peut être dégoûté de la vie et traumatisé…” explique ce spécialiste en santé mentale.
Découragés par le mensonge de leurs parents
F. K., 16 ans, a pris pendant deux ans des médicaments “pour soigner sa toux”, lui disait-on. Atteint de tuberculose, sa mère lui avait dit qu’il devait en prendre toute sa vie sous peine d’être emporté par cette toux. Quand une infirmière lui a dévoilé qu’il est infecté par le VIH, il a tout de suite arrêté les ARVs, très fâché contre sa mère. De nombreux enfants apprennent très tard qu’ils ont le virus. Avant, in leur dit que les médicaments les aident à devenir forts, intelligents en classe, costauds pour les chétifs, longs pour les courts, etc. “Souvent les parents ont honte de dire la vérité à leurs enfants, car ils savent qu’ils ont été infectés dès la naissance par transmission congénitale”, note un enfant vivant avec le VIH.
Une enquête, réalisée par We-Act en 2009, montre qu’environ 40 % des enfants vivant avec le VIH/sida l’apprennent par les structures sanitaires. “Une fois au courant de leur état, ils sont marqués par les images de honte et de mort, ce qui entraîne forçaient des moments d’angoisse et de désespoir, témoigne un conseiller en traumatismes de Kigali. Avec un soutien psychologique, ils cherchent à se confier aux personnes qui peuvent les écouter et les assister de près dans leur perpétuelle souffrance.”
Syfia Grands Lacs