Des hommes d’église prient dans une cérémonie d’inhumation des membres de la communauté Hema tués par des miliciens, avril 2021
Le collectif des avocats des victimes Hema, Banyamulenge et Tutsis, tous Congolais, accuse le gouvernement de la République démocratique du Congo de continuer à participer à la diffusion de messages de haine visant à appeler les autres ethnies congolaises à discriminer les Hema, les Tutsis et les Banyamulenge, qui constituent des minorités de tribus congolaises. Ils appellent la communauté internationale à se pencher sur la question de la discrimination en RDC.
Dans un communiqué, ce collectif déclare que le nombre de crimes relatifs à la propagation et la diffusion de discours de haine a augmenté dans toutes les régions de la RDC.
Selon le document, ces crimes sont plus fréquents dans l’est du pays en raison des affrontements entre les rebelles du M23 et l’armée congolaise.
Les tribus touchées sont les Hema, les Banyamulenge et les Tutsis qui vivent dans diverses parties du Nord-Kivu, du Sud-Kivu, ainsi que dans la province de l’Ituri.
Pour le collectif, c’est aussi un autre crime contre l’humanité qui est commis par le gouvernement congolais.
« Cela signifie que le gouvernement de Kinshasa joue un rôle important dans ces crimes. Certains acteurs politiques ont appelé certains groupes ethniques à haïr d’autres ».
La déclaration met également en évidence les conséquences négatives de l’impunité dont jouissent les auteurs des crimes commis quotidiennement dans l’est de la RDC.
Dans une interview exclusive accordée au Collectif SOS Médias Burundi, Maître Innocent Nteziryayo, coordonnateur des associations des victimes Hema, Banyamulenge et Tutsis congolais a déclaré que les allégations sont basées sur des témoignages des victimes et des témoins oculaires qui ont porté plainte, en vain.
« Ces plaintes constituent des témoignages recueillis sur le terrain. Beaucoup de personnes ont été victimes de barbaries dues à la propagation des messages de haine. Le gouvernement congolais fait semblant comme si dans la partie est du pays tout va bien, et pourtant, une partie des civils est en train de subir des traitements inhumains. De nombreux citoyens ont été tués, d’autres chassés de leurs habitations, voire même enfermés dans des cachots et prisons à Goma et Kinshasa », a-t-il accusé.
Il ajoute que le gouvernement de Kinshasa a « non seulement commis ces crimes au cours des trois dernières années, mais ces crimes ont augmenté depuis 2017, lorsque la plupart des politiciens ont soutenu ces crimes ».
Il dit que de nombreux biens des victimes ont également été volés.
Des membres de ces communautés vivant dans la partie est de la RDC confirment être victimes des barbaries commises par des membres du gouvernement de Kinshasa en appui avec d’autres acteurs politiques, des cadres de la société civile, voire même des défenseurs des droits humains qui contribuent en grande partie à la propagation des discours de haine face à d’autres communautés et tribus.
Dans la ville de Goma, chef-lieu de la province du Nord-Kivu par exemple, des jeunes Tutsis sont particulièrement visés surtout en cette période où les combats entre la rébellion du M23 et les FARDC (Forces Armées de la République démocratique du Congo) se poursuivent.
« Des habitants de Goma confondent tout Tutsi à un élément M23 », a signalé Vincent Tegera, président de la jeunesse tutsi en province du Nord-Kivu.
« Nombreux d’entre nous sont dans des prisons à Goma et Kinshasa pour des raisons non fondées. Tu peux facilement rencontrer des agents de sécurité sur la route qui t’accusent d’être un M23 et directement tu es mis en prison puis transféré à Kinshasa. Ce qui nous déstabilise beaucoup, c’est le fait que notre gouvernement aussi ne prend pas des mesures adéquates pour nous protéger, surtout en cette période d’insécurité grandissante », a insisté Innocent Nteziryayo.
Il a exhorté « le gouvernement de Kinshasa et les organisations de défense des droits de l’homme à s’occuper de la question et à permettre ainsi aux minorités ethniques de vivre en paix et faciliter la cohésion entre les communautés ».
SOS Médias Burundi qui livre cette information n’a pas réussi à joindre les autorités congolaises pour qu’elles s’expriment sur cette question.
Au cours du mois de mai, la Monusco (Mission de l’Organisation des Nations-Unies au Congo) a organisé des formations à Goma, Bukavu et Bunia visant à sensibiliser les habitants du Nord-Kivu, du Sud-Kivu et de l’Ituri à éviter de répandre des discours qui provoquent des violences au sein de la population. (Fin)