Quelques jours après la mesure du Burundi de fermer ses frontières d’avec le Rwanda, des habitants riverains de ces dernières ont remarqué un déplacement en masse de militaires et d’Imbonerakure (membres de la ligue des jeunes du parti CNDD-FDD) tout le long de la frontière à Kirundo (nord du Burundi). La réserve naturelle de Murehe, en commune Busoni, qui se prolonge au Rwanda, semble hautement sécurisée.
Selon des sources au sein même des Imbonerakure de la province Kirundo, toute la frontière avec le Rwanda est sécurisée par les militaires ainsi que des jeunes du parti au pouvoir, surtout les démobilisés.
« Ce n’est pas n’importe qui qui peut aller à la frontière. Les responsables ont choisi les démobilisés, c’est-à-dire ceux qui connaissent le maniement des armes », a expliqué un Imbonerakure.
D’après le Collectif SOS Médias Burundi qui livre cette information, les mêmes sources précisent que les Imbonerakure portent des tenues militaires et des armes, surtout pendant la nuit.
Ainsi, ces Imbonerakure sont soumis aux ordres du chef militaire de la localité, comme le signale un habitant de la colline Munazi de la zone Gatare en commune Busoni.
« Nous les voyons pendant la nuit surtout chez nous à Munazi, Vyanzo. Ils surveillent tout mouvement de la population qui pourrait franchir la frontière vers le Rwanda ou en provenance de ce ‘pays ennemi’ comme ils le disent », a fait savoir une autre source proche du dossier.
Cette dernière précise que parmi ces Imbonerakure se trouvent ceux d’autres provinces qui sont venus en renfort.
« Je pense que les nouveaux visages sont venus de provinces qui ne sont pas frontalières avec le Rwanda, surtout de Muyinga, Karuzi et ailleurs », estime une source à SOS Médias Burundi.
La mission est de surveiller tout mouvement à la frontière à partir des zones des communes Ntega, Bugabira et Busoni.
« Nous avons eu un mot d’ordre dans une réunion tenue par les dirigeants du CNDD-FDD en province Kirundo à l’endroit des Imbonerakure de toutes les communes de cette province. Nous nous sommes rencontrés dans la zone Kiri en commune Bugabira le 13 janvier cette année », a précisé sous anonymat un Imbonerakure sur place.
« Nous devons surveiller jour et nuit les Rwandais qui peuvent franchir la frontière. Tout Rwandais qui viendrait au Burundi est considéré comme ennemi. On nous a dit de capturer ceux qui sont armés », continue-t-il.
Peur panique, tout le monde a peur de tout le monde. Risque d’accusations gratuites.
La population frontalière vit dans la peur. « Nous avons peur que l’on nous accuse volontairement et injustement de collaborer avec les Rwandais, surtout que nous avons des familles là-bas », s’inquiète un habitant de la commune Bugabira.
Les mêmes informations précisent que tout Burundais soupçonné de la moindre relation, même téléphonique, avec des Rwandais, doit être appréhendé. « Les Imbonerakure nous surveillent jour et nuit », confie un père de famille, apeuré.
La population des communes frontalières est fatiguée par ces mesures incessantes de fermeture des frontières.
La population des communes Bugabira et Busoni témoignent de leur lassitude de la fermeture des frontières par le Burundi. « Nous sommes très perturbés par cette situation. On dirait que nos dirigeants n’aiment pas leur population », se lamentent des habitants rencontrés sur place. Ces derniers disent qu’ils faisaient du commerce transfrontalier avec le Rwanda, d’autres s’y rendaient simplement à la recherche du travail, surtout qu’ils disent gagner jusqu’au triple par rapport à ce qu’ils gagneraient au Burundi.
Ils exigent « la réouverture des frontières pour laisser libre la population burundaise prise en otage ». (Fin).