Dominic Ongwen déclaré coupable de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité commis en Ouganda

Dominic Ongwen lors du prononcé du verdict devant la Cour pénale internationale le 4 février 2021 ©ICC-CPI

Aujourd’hui, le 4 février 2021, la Chambre de première instance IX de la Cour pénale internationale (« CPI » ou « la Cour ») a déclaré Dominic Ongwen coupable d’un total de 61 crimes contre l’humanité et crimes de guerre, commis dans le nord de l’Ouganda entre le 1er juillet 2002 et le 31 décembre 2005. Le verdict peut faire l’objet d’un appel par l’une ou l’autre des parties à la procédure dans les 30 jours suivant la notification du jugement.

Les juges de la Chambre de première instance IX de la CPI prononçant le verdict à l’encontre de Dominic Ongwen le 4 février 2021 ©ICC-CPI

La Chambre de première instance IX de la CPI, composée du juge Bertram Schmitt, juge président, du juge Péter Kovács et du juge Raul Cano Pangalangan, a analysé les éléments de preuve présentés et discutés devant elle au cours du procès et a conclu, au-delà de tout doute raisonnable, que M. Ongwen était coupable des crimes suivants :

i.          D’attaques lancées contre la population civile en tant que telle, de meurtre, de tentative de meurtre, de torture, d’esclavage, d’atteinte à la dignité de la personne, de pillage, de destruction de biens et de persécution, commis dans le contexte de quatre attaques spécifiques contre les camps de personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays (« camps de déplacés ») de Pajule (le 10 octobre 2003), Odek (le 29 avril 2004), Lukodi (le 19 mai 2004 ou vers cette date) et Abok (le 8 juin 2004) ;

ii.         De crimes sexuels et à caractère sexiste, à savoir, le mariage forcé, la torture, le viol, l’esclavage sexuel, la réduction en esclavage, la grossesse forcée et l’atteinte à la dignité de la personne qu’il a commis contre sept femmes (dont les noms et les histoires individuelles sont précisés dans le jugement) qui ont été enlevées et placées dans son foyer ;

iii.        D’un certain nombre d’autres crimes sexuels et à caractère sexiste qu’il a commis contre des filles et des femmes au sein de la brigade Sinia, à savoir le mariage forcé, la torture, le viol, l’esclavage sexuel et la réduction en esclavage ; et

iv.        Du crime de conscription et d’utilisation d’enfants de moins de 15 ans dans la brigade Sinia pour les faire participer activement aux hostilités.

La Chambre a conclu que ces crimes avaient été commis dans le contexte de la rébellion armée de l’Armée de résistance du Seigneur (ARS) contre le gouvernement ougandais. L’ARS, y compris Dominic Ongwen, percevaient les civils vivant dans le nord de l’Ouganda comme associés au gouvernement ougandais, et donc comme l’ennemi. Cela concernait en particulier ceux qui vivaient dans des camps de déplacés établis par le gouvernement.

La Chambre a conclu que Dominic Ongwen était pleinement responsable de tous ces crimes. La Chambre n’a pas trouvé d’éléments de preuve à l’appui de l’allégation selon laquelle il souffrait d’une maladie ou d’un trouble mental au cours de la période visée dans les charges ou qu’il aurait commis ces crimes sous la contrainte ou sous des menaces.

Suite à ce verdict, la Chambre imposera à Dominic Ongwen une peine pour les crimes dont il a été reconnu coupable. À cette fin, elle recevra les observations sur la peine appropriée du Procureur, de la Défense de Dominic Ongwen et des représentants légaux des victimes participantes. Une décision à cet égard, notamment concernant le calendrier de la procédure menant au prononcé de la peine, a également été rendue par la Chambre aujourd’hui. Le traité fondateur de la CPI, le Statut de Rome, ne prévoit pas de peine de mort ; la peine peut aller jusqu’à 30 ans d’emprisonnement (et dans des circonstances exceptionnelles une peine d’emprisonnement à perpétuité) et / ou une amende. Par ailleurs, une phase dédiée aux réparations pour les victimes sera ouverte.

Contexte : Le procès dans cette affaire s’est ouvert le 6 décembre 2016. L’Accusation et la Défense ont terminé la présentation de leurs éléments de preuve. Les Représentants légaux des victimes ont également appelé des témoins à comparaître devant la Chambre. Le 12 décembre 2019, le juge président a déclaré la clôture de la présentation des preuves dans l’affaire. Les mémoires de clôture dans cette affaire ont été déposés le 24 février 2020. Les conclusions orales ont eu lieu du 10 au 12 mars 2020.

Au cours de 234 audiences, le Procureur de la CPI, Fatou Bensouda, a présenté 109 témoins et experts, l’équipe de la Défense dirigée par Maître Krispus Ayena Odongo a présenté 63 témoins et experts, et 7 témoins et experts ont été appelés par les Représentants légaux des victimes participant à la procédure. Les juges ont assuré le respect des droits garantis par le Statut de Rome à chacune des parties, y compris le droit d’interroger des témoins.

Au total, 4 095 victimes, représentées par leurs avocats, Maîtres Joseph Akwenyu Manoba et Francisco Cox, ainsi que Maître Paolina Massidda, respectivement, ont été autorisées à participer à la procédure. Elles ont exprimé leurs vues sur des questions dont est saisie la Chambre et elles ont reçu l’autorisation d’interroger des témoins sur des points spécifiques.

La Chambre de première instance a rendu 70 décisions orales et 506 décisions écrites pendant la phase du procès. Le dossier complet de l’affaire, qui contient les écritures des parties et des participants ainsi que les décisions de la Chambre, comprend actuellement plus de 1 760 documents. (Fin)