Par Khalid Cherkaoui Semmouni (Photo), ex-président du Centre Marocain des Droits de l’Homme
Kigali: Dans deux mois environ, le Roi Mohammed VI va inaugurer 20 ans de règne, une période marquée par nombreuses avancées axées sur la consolidation de l’Etat de droit, à travers l’amélioration de l’arsenal juridique national, la ratification des conventions internationales et la création des institutions œuvrant dans le domaine de la promotion et la protection des droits et libertés.
Depuis son accession au trône en 1999, le Maroc a connu une dynamique particulière en matière des droits de l’Homme, par son engagement solennel en faveur de la consolidation des bases de la démocratie et de l’Etat de droit. A ce titre, je peux citer quelques événements qui ont marqué la volonté du Roi Mohammed VI de promouvoir des droits de l’Homme dans notre pays:
En septembre 1999, Le Roi avait autorisé Abraham Serfaty à revenir d’exil. L’opposant indépendantiste a passé 17 ans dans les geôles de Hassan II et a été déchu de sa nationalité marocaine en 1991. Elle lui est rendue sans conditions. La famille Ben Barka regagne le Maroc deux mois plus tard, après trente-six ans d’absence. En novembre 1999, il y avait eu la révocation de Driss Basri, ministre de l’Intérieur depuis 1979, et dernier homme de main du régime du défunt le Roi Hassan II.
Plusieurs institutions et comités qui promeuvent les droits de l’homme sont installés et un nombre important de textes de lois sont mis en vigueur et ils garantissent les droits des citoyens et leurs libertés, soient individuelles ou collectives.
En 2004, le Maroc a connu des événements remarquables : la grâce accordée à 33 prisonniers politiques; la création de l’Instance Equité et Réconciliation pour enquêter sur des violations graves des droits de l’Homme passées entre les années 1956 et 1999 et réaliser la réconciliation afin d’envisager l’avenir à la lumière des recommandations de cette instance; et, parallèlement, sept audiences publiques télévisées des victimes des « années de plomb ». Ces émissions sont organisées par l’Instance équité et réconciliation pour faire la lumière sur les atteintes aux droits de l’homme des années passées.
Au sujet de la question féminine, le Roi Mohammed VI a placé la cause de la femme parmi les priorités des réformes institutionnelles au Maroc. Il mène un processus remarquable de modernisme du statut de la femme marocaine; comme il a souligné dans plusieurs discours la nécessité de promouvoir le rôle des femmes et d’ouvrir les perspectives de leur participation dans les centres de prise de décision et dans les institutions représentatives.
Nous rappelons le message historique que le Roi Mohammed VI a adressé le 10 décembre 2008 à la nation, à l’occasion de la commémoration du 60ème anniversaire de la Déclaration des droits de l’Homme, il a annoncé la levée par le Royaume des «réserves enregistrées au sujet de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard de la femme, réserves devenues caduques du fait des législations avancées qui ont été adoptées par notre pays».
Ainsi, le message que le Roi a adressé ensuite, le 19 décembre de la même année, aux participants à la « Première rencontre des Marocaines du monde », organisée à Marrakech, il a exprimé sa « ferme volonté de faire de la promotion des droits de la femme la pierre angulaire dans l’édification d’une société démocratique moderne », tout en proclamant « en faire la clé de voûte dans la construction de la citoyenneté pleine et entière… ».
En effet, nous citons l’une des lois importantes en faveur des droits des femmes marocaines, la promulgation en 2004 d’un nouveau Code de la famille, la Moudawana, qui introduit des améliorations substantielles à la condition de la femme. Cette loi était considérée comme “une révolution sociale et législative”, qui exprime une volonté de Sa Majesté de prendre à bras-le-corps l’évolution politique, économique et sociale du Maroc nouveau.
Ensuite, de multiples réformes ont été initiées par le Maroc en vue de promouvoir les droits de la femme marocaine et d’œuvrer pour son autonomisation, en citant le Code de la nationalité, la scolarisation des filles, l’accès des femmes aux postes de décision, l’adoption de l’approche genre dans tous les domaines et des programmes de lutte contre la violence à l’égard des femmes, la ratification de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et la levée des réserves la concernant, ainsi que l’institution de l’égalité et de la parité et la lutte contre toutes les formes de discrimination dans la Constitution de 2011.
Ce processus est couronné en 2017 par la décision de SM le Roi de charger le ministre de la Justice, d’ouvrir aux femmes la profession d’adoul, et de prendre les mesures nécessaires pour réaliser cet objectif. Cette décision confirme bien le haut niveau de formation et de culture scientifique acquis par la femme et de la qualification, la compétence et la capacité dont elle a fait preuve dans les différentes hautes fonctions qu’elle a assumées.
Il est certain que la mise en exergue du poids politique et social de la femme marocaine dans la société témoigne d’une irréversible volonté royale : doter la femme de moyens pour accéder au statut qui lui convient dans une société démocratique et libre.
En 2011, le Maroc a connu une réforme constitutionnelle très approfondie. La nouvelle Constitution a réduit certains de ses pouvoirs au profit du parlement et du gouvernement. Le poste du Chef du gouvernement a été institué, au lieu du Premier ministre, avec renforcement de ses attributions.
De même, les citoyens pourront également avoir la possibilité de saisir la Cour constitutionnelle nouvellement créée. La Justice est devenue un pouvoir autonome, indépendant des pouvoirs exécutif et législatif.
La constitutionnalisation des droits de l’Homme au Maroc a été une décision courageuse et généreuse du Roi Mohammed VI. Ce faisant, le Maroc a, par ailleurs, pu répondre aux allégations, pour ne pas dire aux accusations de torture, de détention arbitraire, des disparitions forcées des opposants politiques soulevées par des organisations, notamment internationales des droits de l’Homme.
Il ressort des progrès enregistrés au cours des dernières années que le respect de l’exercice des droits et libertés a continué à progresser, tandis que les violations et les abus n’ont cessé de diminuer grâce à l’élargissement du champ de l’exercice des droits, malgré des cas de violations isolés qui ont été soulevés.
Tous ces acquis, durant les 20 ans de règne du Roi Mohammed VI, témoignent de l’existence d’une forte volonté de consolider un Etat de droit qui garantit la protection et la promotion des droits de l’Homme. Mais, cela exige plus de mobilisation du gouvernement dans l’avenir pour consolider ces acquis et élargir plus le champ des droits et libertés, sans oublier également la contribution de la société civile dans ce processus. (Fin)