Une distribution d’urgence de nourriture est en cours dans l’est de la RDC ©PAM/Michael Castofas
Alors que le conflit provoque une faim aiguë dans l’Est de la République démocratique du Congo (RDC), le Programme alimentaire mondial des Nations Unies (PAM) a activé un programme d’envergure dans cette partie du pays afin d’accroître l’aide apportée à 3,6 millions de personnes vulnérables au cours des six prochains mois.
Il s’agit de « la forme d’alerte la plus élevée », selon l’Agence onusienne basée à Rome.
Nous devons répondre aux besoins croissants des personnes touchées
«Mais il existe un écart important entre le nombre de personnes dans le besoin et le nombre de personnes bénéficiant d’une aide alimentaire», a déclaré lors d’un point de presse à Genève, Tomson Phiri, porte-parole du PAM pour l’Afrique australe, qui revient tout juste d’une mission dans l’est de la RDC.
Malgré d’importants problèmes opérationnels, administratifs, de sécurité et d’accès, les organisations humanitaires et le PAM sont restés déterminés à fournir une assistance vitale aux personnes touchées par la crise. Car l’agence onusienne craint que la situation des populations ne s’aggrave si l’aide humanitaire n’est pas renforcée.
Le 29 mai dernier, le PAM avait déjà alerté sur la situation humanitaire en RDC où environ 6,7 millions de personnes connaissent des niveaux d’insécurité alimentaire de crise ou d’urgence dans le Nord et le Sud-Kivu et en Ituri. Ce qui représente une augmentation de 10 % par rapport à l’année dernière.
L’Est de la RDC est « un exemple classique d’une crise oubliée »
Selon la dernière analyse du cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire (IPC), plus de 25,8 millions de personnes continuent de faire face à des niveaux d’insécurité alimentaire de crise ou d’urgence déclenchés par de mauvaises récoltes, des déplacements causés par la violence, des épidémies, le chômage et l’effondrement des infrastructures.
« J’ai été témoin de la crise humanitaire aiguë et complexe qui se déroule, provoquée par un conflit sans précédent qui aggrave l’insécurité alimentaire », a ajouté M. Phiri.
Selon le PAM, la crise prolongée s’est considérablement aggravée avec une recrudescence des besoins à grande échelle.
« La situation d’aujourd’hui n’est pas habituelle ; elle n’est pas non plus à remettre au lendemain, ni simplement une autre [mauvaise journée au Congo] », a insisté le porte-parole de l’agence onusienne.
« L’opération humanitaire ne peut pas répondre de manière adéquate, et ceux qui ont fui la violence vivent dans des conditions précaires dans des abris de fortune ou dans des familles d’accueil déjà surchargées. Ils ont peu d’accès à l’eau potable, aux centres de santé et aux terres cultivables », a-t-il détaillé, relevant que l’Est de la RDC est « un exemple classique de crise oubliée ».
L’Est du pays est aux prises avec des groupes armés non étatiques actifs, ce qui aggrave le cycle de violence en cours, provoque des déplacements massifs de population et exacerbe une situation humanitaire déjà fragile. Environ 5,7 millions de personnes ont été déplacées depuis mars 2022 dans le Nord-Kivu, le Sud-Kivu et l’Ituri. 6,2 millions de personnes ont fui leurs maisons à travers le pays, le nombre le plus élevé d’Afrique.
Une région où les contraires s’affrontent
Le pays a une taille continentale, avec des hectares d’espace, mais des millions de personnes n’ont d’autre choix que de vivre dans des camps surpeuplés.
« La région réunit tous les ingrédients d’une catastrophe humanitaire : conflit, accès limité, crise socio-économique et climatique, et manque criant de financement », a souligné le PAM.
« Un pays qui produit le métal le plus précieux pour fabriquer les technologies les plus récentes est celui qui compte le plus grand nombre de personnes en situation d’insécurité alimentaire dans le monde », a fait valoir le porte-parole du PAM.
Plus de 25 millions de personnes seront confrontées à une insécurité alimentaire aiguë en 2023, « soit trois fois la population de la Suisse ».
La crise climatique aggrave une situation humanitaire déjà fragile. Au moins 400 personnes ont été tuées dans les inondations du mois dernier ; environ 3.000 maisons ont été détruites et 108.000 personnes ont été déplacées à l’intérieur du pays, ce qui a eu un effet dévastateur sur leurs moyens de subsistance et sur l’accès aux voies d’approvisionnement vitales.
«Les communautés d’accueil, aujourd’hui plus que jamais, sont également confrontées au risque de famine et ont besoin d’une intervention d’urgence », a insisté M. Phiri.
Face à une hausse des besoins sur le terrain, le PAM a besoin de 870 millions de dollars pour la réponse humanitaire en RDC. Cependant, il manque 738,5 millions de dollars (85 %). Autrement dit, le plan de réponse pour les opérations du PAM en RDC n’est financé qu’ à 15%. (Fin)