Kigali: Une étude récente menée par la Commission Nationale de Lutte contre le Génocide (CNLG) sur l’histoire du génocide contre les Tutsi dans l’ancienne préfecture de Cyangugu montre que du 1er novembre 1959 au 1er juillet 1962, le Rwanda était en pleine tourmente dans ce qu’on appelait «Révolution sociale» de 1959.
Les turbulences ont conduit au massacre de milliers de Tutsi à travers le pays, d’autres ont été chassés de leurs propriétés et contraints de fuir vers les pays voisins comme l’Ouganda, le Burundi, la Tanzanie et la République démocratique du Congo (RDC).
Dans la préfecture de cyangugu, les tueries ont commencé à la fin de novembre 1959. Dans ces turbulences, des Tutsi ont été tués, en particulier à Mururu où le vice-chef Senuma administrait. Depuis lors, les administrateurs tutsis, principalement les chefs, les vice-chefs et leurs intendants, ont immédiatement commencé à fuir vers Bukavu en RDC.
En 1960, les actes de violence et les meurtres se sont poursuivis. En mai 1960, les Tutsi de Cyangugu ont été tués, notamment à Nyamasheke où le vice-chef Nyirinkindi administrait. Outre les meurtres, de nombreuses maisons de ménages tutsis ont été incendiées. En octobre 1960, de nombreuses maisons de ménages tutsis ont été incendiées dans la chefferie Impala, notamment à Biguzi, Shangi et Shagasha. L’incendie des maisons des ménages tutsis s’est accompagné de différents actes de violence, notamment les expulser de leurs propriétés et les forcer à fuir vers le Burundi et la République démocratique du Congo.
À la fin de 1960, les choses ont empiré dans toute la préfecture de Cyangugu. Au cours de cette année, les politiciens, en particulier les partisans du PARMEHUTU, ont intensifié la haine entre Hutu et Tutsi, ce qui a abouti au mouvement de tempête pour bruler les maisons des ménages tutsis et les expulser à partir de novembre 1960.
Lors de leur fuite, les Tutsis ont été transportés par des bus depuis la République démocratique du Congo. À cette époque, il y avait une campagne pour incendier les maisons de ceux qui fuyaient immédiatement après leur départ.
Les actes d’expulsion des Tutsis et d’incendies de leurs maisons se sont répandus dans toute la préfecture de Cyangugu. Dans la commune de Kamembe, ces actes odieux de brûler les maisons des Tutsis et de les expulser ont commencé avec le chef Rwanyabugigiri qui résidait à Nkanka à Gitwa. Après l’avoir expulsé, ils ont brûlé sa maison et pillé son bétail. En réalisant qu’il pouvait même être tué, Rwanyabugigiri s’est immédiatement enfui. Depuis lors, les maisons des Tutsis à travers Kamembe ont été incendiées. Parmi les victimes identifiées de ces actes de brûlage de maisons de Tutsi, citons Bihutu, Misago Laurent et Bandora Vénant, tous deux de Gihundwe, Ruboneka, Ngarukiye et Nkangara tous deux de Nkombo entre autres.
Dans la commune de Cyimbogo, les victimes identifiées incluent la mère du chef Rusasura, Innocent qui habitait à Winteko; à Nyamagana, ils ont brûlé la maison de Baritazari qui travaillait dans à la maison du chef Biniga, la maison d’Euphrasie; et celles d’Ambroise, Anselme, Bihugu, Martin Bihuku, Rusuku Mathieu à Gitovu entre autres. Après l’incendie de leurs maisons, ils ont tous fui vers la République démocratique du Congo.
Dans la commune de Nyakabuye, ils ont mis le feu aux maisons de Segisoromo Pascal, Rwandekwe Léodomir, Maro, Paul, Rwatambuga Pangarasi, Mahenehene Célestin qui habitait à Nyabitimbo. Ils ont également incendié les maisons de Bushikoko Célestin et Kamananga, tous deux de Mashesha, Nkuta Athanase et d’autres. Après que leurs maisons aient été incendiées, leurs familles ont fui vers le Burundi et la République démocratique du Congo.
Dans la commune de Bugarama, les maisons incendiées appartenaient à Bizimana Fabien, Rukwavu qui habitait à Nyampanga et Shyirambere Aloys entre autres. De nombreux Tutsis ont également été contraints de quitter leurs propriétés, notamment Bayito, Nyampeta et son gendre, Sebitama, Gatarayiha, les fils de Musuhuke, Muhobera, Piyo, Nyamutezi, Murinda André, Bipfuko, Mukankusi et Rukoro, fils du chef Gisazi, Saidi Sefu, Saidi Hamisi, Ibrahim Birara et autres. Ils ont fui au Burundi. Immédiatement après leur départ, leurs maisons ont été détruites.
Dans la commune de Karengera, ils ont incendié les maisons de Munyangeyo Martin, la famille de Nzarubara, la famille de Muhinda Theobald et ses trois sœurs, ainsi que de nombreuses autres qui ont été forcés de quitter leurs propriétés et fuir.
Dans la commune de Gisuma, les maisons incendiées appartenaient à Nsengimana Callixte, Karekezi Zacharie, Renzaho Ildephonse, Sembasha, Bidindira et autres. Après que leurs maisons aient été incendiées, ils ont fui vers la République démocratique du Congo.
Dans la commune de Gafunzo, ils ont incendié les maisons appartenant à Nyiramugufi Véronique qui habitait à Mugera et ont détruit la maison d’Antoine. De nombreux propagandistes du PARMEHUTU dans les communes de Gafunzo et de Gisuma ont joué un rôle central dans l’intensification de la haine entre Hutu et Tutsi depuis 1959.
Parmi eux, on peut désigner Sarukundo qui fut le premier bourgmestre de la commune Nyabitekeri, Karima qui était de Mwito, Rukeratabaro de Bushenge qui fut autrefois le bourgmestre de la commune Bushenge, Kanyabacuzi de Shagasha qui servit de bourgmestre de la commune de Shagasha et d’autres.
L’expulsion des Tutsi et l’incendie de leurs maisons se sont répandus dans toutes les parties de la préfecture de Cyangugu. Dans la commune de Gatare, de nombreuses maisons appartenant à des Tutsi ont été incendiées notamment à Rudaga, une zone normalement habitée par de nombreuses familles tutsies.
La disharmonie se manifestait également dans la vie ordinaire. Depuis 1961, les jeunes partisans du PARMEHUTU, connus sous le nom d ‘«abajenesi», chantaient publiquement pendant la journée que «Abatutsi bose bazajya i Nyamata, akazasigara kose tuzagapfakaza, iyumvire LUNARI icyo washakaga!», Traduit vaguement par «tous les Tutsi iront à Nyamata, quiconque restera, nous allons faire de lui une veuve / veuf, écoutez LUNARI ce que tu as voulu » A cette époque, il y avait la campagne perverse pour expulser les Tutsi à Nyamata dans le Bugesera.
En général, depuis la soi-disant révolution sociale de 1959, des actes de violence et d’expulsion des Tutsis ont été instaurés. Les Tutsis n’ayant pas d’autre choix, sans soutien ni protection, ils ont fui vers le Burundi et la République démocratique du Congo. Leurs propriétés ont été soit détruites, soit prises par les Hutus qui les ont forcés à s’exiler. (Fin)