Des milices anti-Tutsi reçoivent un entraînement paramilitaire pour gonfler les rangs de l’armée afin de lutter contre la rébellion M23
Le mercredi 28 août 2024, une radio des Nations-Unies a servi de canal de diffusion de message d’apologie du cannibalisme devenu courant contre des membres de la minorité Tutsi qui sont pris pour cible depuis plus de trois décennies, y compris dans le cadre de la campagne anti-M23 en cours en RDC.
Cette incitation au cannibalisme a été faite par un officiel de la coalition politique qui dirige la RDC, en l’occurrence un député national par l’entremise de la Radio Okapi qui est parrainée par l’ONU.
En effet, au micro de la Radio Okapi dans son émission de débat intitulée “Dialogue Entre Congolais”, le député national en vacance parlementaire dans le territoire de Walikale en Province du Nord-Kivu Monsieur Willy Mishiki a affirmé avoir mobilisé plus de 83.000 civils dans ce territoire pour dit-il “manger les soldats du M23”.
“Je vous dit Mme la population ici est à 90 % contre ce cessez-le-feu. Puisque ce cessez-le-feu ne profite pas à notre peuple, à notre République. C’est pourquoi nous ici à Walikale nous sommes organisés. Si le M23 osait franchir la frontière de Walikale, ça serait leur tombe. La population est mobilisée. On a aujourd’hui plus de 83.000 civils qu’on a recensés depuis une semaine qui sont près à manger même crus les éléments du M23. Et ils savent très bien comment s’y prendre », a dit l’élu du territoire de Walikale.
La réaction du M23 ne s’est pas faite attendre : “Il est impérieux que les Nations-Unies condamnent et se désolidarisent de ces propos d’une gravité extrême dont les actes sont devenus courants surtout dans l’Est de la RDC contre les populations civiles et militaires issues principalement de la communauté Tutsi”, indique le président du M23 Bertrand Bisimwa dans un post sur le réseau social X.
“Le silence des Nations-Unies et de la Radio Okapi serait interprété comme un soutien substantiel aux actes de cannibalisme devenus lésions dans le pays perpétrés par les forces coalisées autour du régime de Monsieur Tshisekedi ainsi que par des civils manipulés et surexcités”, poursuit le chef politique du M23 qui occupe une grande partie des territoires de Masisi, Rutshuru, Nyiragongo et Lubero au Nord-Kivu.
“Ce député doit être immédiatement mis aux arrêts, jugé en procédure de flagrance et condamné conformément à la loi”, recommande le M23 par la voix de son président Bertrand Bisimwa.
Depuis la résurgence du M23, une chasse à l’homme est dirigée contre les minorités Tutsi au Nord-Kivu, Banyamulenge au Sud-Kivu et Hema en Ituri.
Les membres de ces trois communautés communément appelées “nilotiques” sont perçus par les membres d’autres communautés dites “Bantous” comme des partisans du M23(Mouvement du 23 Mars).
Ils sont traqués comme du gibier, tués, découpés, éviscérés et brûlés vif par la population avant que certains habitants ne le “dévorent”.
Ces attaques sélectives sont consécutives à des discours de haine et de xénophobie tenus par les dirigeants du régime au pouvoir, les membres de la société civile et distillés par des media; comme cela a eu lieu avant et pendant le génocide perpétré contre les Tutsis en 1994 au Rwanda.
La rébellion du M23 a resurgi en 2022, après dix ans d’exil de ses dirigeants et de mise en sommeil du mouvement, et après 14 mois de négociations officieuses et infructueuses avec Kinshasa qui a échoué à mettre en œuvre l’accord qui a mis fin à la rébellion en 2013.
Le M23 se positionne comme le seul bouclier des membres de la communauté Tutsi qui sont livrés en holocauste par les forces de la coalition du régime de Kinshasa, dont les FDLR génocidaires, qui entretiennent et propagent une idéologie de haine anti-Tutsi, après que ses principaux éléments aient participé au génocide de 1994 contre les Tutsi, tuant plus d’un million de personnes au Rwanda.
Le M23 parle aussi du sort des rescapés du génocide des Tutsi en RDC qui sont réfugiés dans des camps au Rwanda, en Ouganda, au Burundi, en Tanzanie et ailleurs dans la sous-région..
Le retour au Congo de ces réfugiés est une revendication héritée des autres groupes de la même obédience, notamment le CNDP (Congrès national pour la défense du peuple, fondé dans les années 2000 par Laurent Nkunda, officier rebelle de l’armée congolaise, NDLR).
Il s’agit d’une ancienne revendication acceptée par les autorités congolaises dans des accords signés avec le CNDP mais aussi il y dix ans avec le M23 mais qui sont restés lettres mortes.
La question de la terre est également mise en avant par le M23. En effet, le retour des réfugiés impliquerait qu’ils reprennent des terres qu’ils considèrent comme les leurs et qui sont aujourd’hui occupées par les FDLR et les milices gouvernementales appelées “Wazalendo” qui sont de ce fait opposés à la présence et au retour des Tutsi en RDC.
La milice génocidaire FDLR se démarque des plus de 250 groupes armés qui sévissent à l’est du Congo par deux aspects : son expertise militaire et un réseau économique étendu.
Les FDLR ont reconstitué des écoles militaires dans l’exil ; ils bénéficient d’une solide formation militaire, comptent un nombre croissant de Congolais dans ses rangs, et ils sont incorporés dans l’armée congolaise qui les utilise comme supplétifs au combat depuis trois décennies.
Dès leur arrivée dans l’est du Congo en juillet 1994, les extrémistes Hutu en cavale ont commencé à répandre leur idéologie de haine dans toute la région, et de nombreuses zones des provinces du Nord et du Sud-Kivu sont devenues inhabitables pour les Tutsis congolais.
Aujourd’hui, depuis leurs bases, les FDLR ont transmis leur vision du monde à une nouvelle génération. S’appuyant sur les tensions ethniques locales, endogènes et liées à une compétition territoriale, ils ont inculqué aux Congolais l’idée hamitique, c’est à dire l’idée d’un conflit régional entre peuples bantous (dans lesquels ils classent les Hutus et les autres tribus congolaises) et nilotiques (Tutsis, Banyamulenge et Hema).
A ce jour, ils rêvent toujours de reconquérir le Rwanda, où ils comptent parachever le génocide et réinstaurer un régime d’apartheid semblable à celui qui existait avant 1994.
Les effets néfastes des FDLR ont été amplifiés par le soutien du gouvernement congolais. En fonction de leurs besoins, les régimes congolais successifs ont parrainé la milice génocidaire.
En juillet 1994, le Président Mobutu les avait accueillis à bras ouverts et les avait utilisés lors de la première guerre dite de l’AFDL entre 1996 et 1997.
En 1998, c’est le président Laurent Désiré Kabila qui, après avoir tourné le dos à ses alliés rwandais et ougandais, eut recours à eux et mobilisa plus de 20.000 combattants qu’il intégra dans l’armée nationale. Et l’histoire se répète jusqu’à ce jour. (Fin)