Par André Gakwaya;
Ntarama (Bugesera): Huit enseignants belges qui séjournent au Rwanda pendant une semaine ont visité le site mémorial de Ntarama où sont inhumés cinq mille Tutsi victimes du Génocide de 1994, selon Innocent Ruzigana, responsable de ce site géré par la CNLG (Commission Nationale de Lutte contre le Génocide).
«Des Tutsi avaient trouvé refuge dan cette Eglise catholique de la centrale de Ntarama. Ils ont été exterminé le15 Avril 1994 de 10 h à 16 h par des militaires et des miliciens venus de Kigali dans des bus.Dans l’Eglise et les maisons autour se trouvaient trois mille personnes. Mais dans l’ensemble cinq mille victimes reposent dans le site mémorial de Ntarama, parce qu’on y inclut les Tutsi qui ont été tués dans le village de la proximité», a-t-il indiqué.
Il a saisi l’occasion pour montrer la particularité de la région du Begsera où se trouve le site de Ntarama.
«Bugesera se trouve dans la partie Su-Est de la Province de l’Est. Quand a commencé la Révolution Sociale de 1959 initiée par l’élite hutue appuyée par le colonisateur belge, des violences ont éclaté dans le pays. Beaucoup de Tutsi ont trouvé refuge dans les pays voisins. D’autres restés au pays ont été déportés à partir du Sud et du Nord vers le Bugesera, une région insalubre à l’époque, pleine de forets, de mouches tsé-tsé et de lacs d’eau autour. Région certes quadrillée, enfermée, où il était difficile aux gens de sortir. Privés de leurs champs et de leur bétail, la plupart des Tutsi, surtout les personnes âgées et les enfants mourront de typhoïde, de paludisme et de dysenterie. Le régime de l’époque installera le premier camp militaire de Gako pour harceler et brutaliser les Tutsi déplacés. Lors des attaques des réfugiés rwandais à partir du Burundi voisin, des représailles seront infligées sur des Tutsi du Bugesera qui en payeront le prix et un bon nombre d’entre eux seront exécutés. Considéré comme un Tutsiland, le Bugesera sera privée d’infrastructures de développement durant les 1ère et 2ème Républiques », a expliqué Innocent Ruzigana.
En 1992, des miliciens entraînés dans différents camps militaires déferleront sur Bugesera et tueront plus de trois cent Tutsi. C’est dans cette insécurité que la volontaire Italienne Antonia Locatelli sera tuée par la Garde Présientielle parce qu’elle informait la communauté internationale sur les tueries perpétrées par le régime. En 1994, les gens ont fui dans les Eglises parce qu’ils croyaient y trouver protection comme en n 1960, car le prêtre était encore respecté.
Ce ne sera pas le cas en 1994 où des prêtres sont devenus des tueurs aussi. Les Eglises du Rwanda comme Nyange, Ntarama, Nyamata, Nyarubuye, et un peu partout ailleurs sont devenues des lieux d’holocaustes. Les Eglises n’étaient plus des endroits saints et respectés par des tueurs enivrés et violeurs. C’étaient des sites entourés par des hautes collines occupées par l’artillerie des soldats gouvernementaux qui en ont profité pour pilonner les Tutsi.
Ruzigana a montré les armes utilisées par les tueurs, les restes des habits des victimes, le matériel utilisé pour leurs besoins divers, les ustensiles de cuisines, les papiers d’indenté et cahiers des élèves tués, et quelques photos. Les rares rescapés ont fui dans les marais où ils ont été poursuivis par miliciens et leurs chiens.
Le FPR arrivé le 15 Mai 1994 et sauve ceux qui ont survécu.
«Il est à noter que la Révolution Sociale est une révolution assistée, soutenue par le colonisateur belge. A ce titre la Belgique a joué un rôle dans la montée de la violence. C’est elle qui a semé la division et la haine, préalable pour la réalisation du Génocide de 1994», a dit Ruzigana aux enseignants belges.
Ces enseignants ont effectué leur visite au Rwanda dans le cadre du Projet «La transmission de la mémoire aux jeunes: la commémoration des 25 ans du Génocide des Tutsi au Rwanda pour échanger de bonnes pratiques et des méthodologies entre enseignants belges et rwandais ».
L’objectif principal étant que des enseignants belges et rwandais puissent faire des échanges de méthodologies et bonnes pratiques concernant la transmission de la mémoire aux jeunes (du 3ième degré secondaire) dans le cas des crimes de masse (éducation à la mémoire).
Pour ceci, RCN J&D a organisé d’abord un atelier d’une journée en Belgique avec les enseignants belges pour les informer et sensibiliser au contexte rwandais et le Génocide des Tutsi en 1994. Après, en coordination avec l’Association Modeste et Innocent (AMI), les enseignants belges ont eu des activités d’échange avec des enseignants rwandais dans trois écoles à Huye (ancienne ville de Butare) dans le Sud du Rwanda ainsi qu’avec le Ministère de l’Éducation pour échanger sur les approches, bonnes pratiques et méthodologies de l’éducation à la mémoire et les stratégies que le Rwanda a mises en place pour intégrer l’éducation à la prévention de Génocide.
Ces enseignants belges ont eu des échanges avec des responsables de la Commission Nationale de Lutte contre le Génocide (CNLG) et la Commission National de l’Unité et la Réconciliation, pour la sensibilisation des enseignants belges sur le Génocide qui a eu lieu au Rwanda et les différents programmes que ces institutions ont mis en place pour accompagner les écoles et la population rwandaise dans la prévention du Génocide et l’éducation à la mémoire du Génocide au Rwanda. (Fin)