Kigali: Des habitants, des visiteurs internationaux et des représentants du gouvernement se sont ralliés aux survivants du génocide contre les Tutsi pour rendre hommage à plus de 50 000 victimes du génocide qui gisent au Mémorial du génocide de Murambi dans le district de Nyamagabe.
Au cours de l’événement, les restes de 294 corps des victimes ont été transférés du mémorial de Gasaka à Murambi, une ancienne école technique en construction pendant le génocide.
S’exprimant lors de l’événement, le Secrétaire exécutif de la Commission Nationale de Lutte contre le Génocide (CNLG), Jean-Damascène Bizimana, a déclaré que le 25ème événement commémoratif à Murambi était unique car il s’agit de l’un des dix sites proposés pour être visités par les jeunes au cours de la période de commémoration de cette année dans le cadre de l’initiative nommée «Kwibuka Tour», qui vise à amener des milliers de jeunes sur ces sites commémoratifs afin qu’ils puissent en apprendre davantage sur le génocide contre les Tutsi.
«Nous avons sélectionné dix sites mémoriaux, y compris Murambi, où les jeunes se rendent pour comprendre l’histoire du génocide et s’efforcer de préserver la mémoire et les preuves puisque près de 70% de la population actuelle du Rwanda a moins de 30 ans», a-t-il déclaré.
Les dix sites sont Bisesero dans le district de Karongi, Mwulire dans le district de Rwamagana, ISAR Rubona à Huye, la Commune Rouge à Rubavu, Kibirizi à Nyanza, Rukumberi à Ngoma, Kinigi à Musanze et Bitare à Nyaruguru.
Les jeunes visiteront également le musée du parc de la libération nationale pour la lutte de libération menée par le FPR-Inkotanyi afin de retracer le chemin parcouru par les forces qui ont libéré le pays et mis fin au génocide contre les Tutsi.
Pendant ce temps, Bizimana a indiqué que Murambi faisait partie de la préfecture de Gikongoro, qui retrace l’histoire des pogroms contre les Tutsi depuis 1959.
Le mémorial de Murambi, en revanche, est l’une des horreurs les plus inoubliables du génocide contre les Tutsi de 1994, car les réfugiés affluaient dans l’école technique en cours de construction quand ils ont appris qu’ils allaient être en sécurité.
C’était un stratagème qui permettait aux dirigeants de l’époque de rassembler leurs cibles pour qu’elles puissent être facilement massacrées. Le 21 avril, l’armée et la milice Interahamwe ont envahi et tué plus de 50 000 Tutsi.
Certains des restes des corps des victimes du génocide ont été exhumés et conservés avec de la chaux en poudre ainsi que leurs effets personnels, tels les vêtements qu’ils portaient lorsqu’ils ont été tués, comme preuve du génocide qui a eu lieu dans la région.
Pour pouvoir préserver la mémoire, le mémorial a été divisé en différentes sections et l’une d’entre elles est la tombe commune où reposent victimes.
Certaines salles de l’ancienne école technique ont également été converties en zones de préservation, où les corps embaumés des victimes sont conservés dans un espace ouvert afin que les visiteurs puissent voir l’ampleur et la nature du décès subi par les victimes.
Il y a aussi une section de tranchées où les corps des victimes ont été jetés après leur massacre et un terrain de volley-ball où un drapeau français a été hissé, la zone se trouvant à proximité d’un camp militaire pour l’armée française qui se trouvait au Rwanda dans le cadre de la soi-disant mission humanitaire Opération Turquoise.
Les soldats français, déployés au Rwanda au plus fort du génocide, au lieu de sauver les Tutsi tués en milliers par jour, ont travaillé sans relâche pour offrir un couloir d’évasion aux génocidaires, qui tuaient tout le chemin jusqu’à leurs camps de réfugiés en RD Congo.
L’embaumement des corps des victimes du génocide est effectué avec le soutien d’experts de l’Institut de médecine légale de l’Université de Hambourg (Allemagne) et de l’Université de Hanovre (Allemagne).
Le ministre de la Justice et garde des sceaux, Johnston Busingye, a réitéré les efforts pour poursuivre les fugitifs du génocide où qu’ils se trouvent, y compris ceux qui ont planifié et exécuté le génocide à Murambi.
Il a également critiqué le Mécanisme résiduel pour les tribunaux pénaux internationaux, qui a succédé au Tribunal pénal international pour le Rwanda, pour avoir accordé la libération anticipée aux auteurs du génocide jugés par la cour, sans justification.
«Parmi les auteurs du génocide dans cette ancienne préfecture de Gikongoro, on compte le colonel Aloys Simba, récemment libéré avant d’avoir purgé sa peine – qui était déjà trop petit compte tenu des atrocités qu’il a commises. Nous continuerons à travailler avec ces tribunaux pour veiller à ce que de telles décisions soient évitées », a-t-il déclaré.
Il a également pointé du doigt à Laurent Bucyibaruta, alors préfet de Gikongoro, qui reste en France.
“Bucyibaruta est en France et nous espérons qu’un jour, il sera poursuivi, car toutes les preuves nécessaires sont réunies”, a-t-il déclaré.
Naphtal Ahishakiye, secrétaire exécutive d’IBUKA, a déclaré que beaucoup a été fait pour reconstruire le pays et redonner espoir aux rescapés du génocide, ainsi que traduire devant la justice les auteurs du génocide. (Fin)