By Bizimana Jean Damascène *
Le 21 avril 1994 est le jour où ont été tués le plus grand nombre de Tutsi en même temps dans le pays. Ci-après le rappel des massacres de plus cent cinquante mille Tutsi le 21 avril 1994.
1. Le Conseil de Sécurité de l’ONU a réduit le mandat de la MINUAR et le nombre de ses troupes au Rwanda.
Le 21 avril 1994, le Conseil de Sécurité de l’ONU, dans sa résolution 912, a réduit le mandat de la MINUAR à sa plus simple expression, ne lui laissant seulement que 250 militaires. Pourtant le General Dallaire qui était à la tête de la MINUAR, envoyait chaque jour des rapports à l’ONU sur les massacres de Tutsi au Rwanda. Dallaire comparait la Garde Présidentielle à un “virus” des plus nuisibles. L’ONU n’a pas accordé de valeur à ces informations, a pris la décision d’abandonner le Rwanda à son sort, et les massacres furent commis au grand jour.
2. Massacres de Tutsi à Murambi, Gikongoro, Nyamagabe
Alors que le Génocide avait commencé dans les localités avoisinantes de Murambi, les Tutsi qui venaient de Mudasomwa, Kinyamakara, Musebeya, Muko et d’autres communes, ont commencé à s’y réfugier. Les Tutsi qui venaient à Murambi avaient été exhortés par les autorités locales à s’y rendre tous pour, leur disaient-ils, que leur sécurité puisse y être assurée, mais il ne s’agissait évidemment qu’un mensonge éhonté car le président du gouvernement dit des « Abatabazi » (sauveurs), Sindikubwabo Theodore, et son Premier Ministre, Jean Kambanda, étaient récemment venus à Gikongoro tenir une réunion pour donner les instructions de déclencher le Génocide.
Apres cette réunion, les autorités locales ont incité les Tutsi de se rendre à Murambi en leur affirmant mensongèrement qu’ils assureront leur sécurité. Ceux qui s’étaient réfugiés en différents endroits, aux bureaux de communes, dans les églises et autres lieux de prière, ceux qui étaient cachés par des Hutu, tous ont été amenés à Murambi, certains d’entre eux par des véhicules tandis que les autres s’y sont rendus à pied. Partout où ils passaient sur le chemin de Murambi, les Interahamwe leur lançaient des pierres. Arrivés à Murambi, les Interahamwe se sont mis à casser les canalisations qui approvisionnaient Murambi en eau, pour pouvoir venir plus tard tuer les Tutsi qui, assoiffés, seraient très affaiblis. Alors qu’ils étaient très affamés, les réfugiés ont pris la décision de sacrifier une partie de leur cheptel bovin qu’ils avaient amené avec eux, pour en consommer la viande et ne pas mourir de faim. Les gendarmes leur ont demandé de faire leur propre recensement pour pouvoir demander de l’aide alimentaire par rapport à leur nombre, mais le riz qu’ils leur distribuèrent peu après s’est avéré de quantité insuffisante parce que les réfugiés étaient devenus très nombreux et avait atteint les 50,000 personnes.
Entretemps les réfugiés Tutsi subirent des attaques d’Interahamwe mais se sont défendus en utilisant des pierres et ont pu les repousser. Dans la nuit du 20 au 21 avril 1994, vers 3h du matin, les gendarmes ont commencé à lancer des grenades et à tirer sur les réfugiés Tutsi, ensuite les Interahamwe et les Impuzamugambi (CDR) ainsi que des citoyens ordinaires, armés de gourdins, de machettes, de lances et de haches ont achevé tous ceux qui n’avaient pas été tués par les armes à feu ainsi que les blessés.
Les tueurs et les responsables des massacres de pres de 50,000 Tutsi qui s’étaient réfugiés à Murambi sont : le Préfet de la Préfecture de Gikongoro Bucyibaruta Laurent (réside en France), Semakwavu Felicien, Bourgmestre de la Commune Nyamagabe, le Capitaine Faustin Sebuhura commandant de la gendarmerie à Gikongoro, le Colonel SIMBA Aloys, Justin Ayurugari, chef de la station Electrogaz à Gikongoro, Venuste Nyombayire qui dirigeait le centre d’accueil d’enfants SOS Gikongoro, David Karangwa greffier au tribunal de Canton de Gikongoro, Celse Semigabo Procureur à Gikongoro, Alphonse Nsengumukiza agent de l’Electrogaz, des gendarmes et des Interahamwe, Munyangoga agent de l’Electrogaz, Musekura Aloys, Ngirumpatse Venuste et d’autres.
Les troupes françaises de la zone turquoise ont installé un poste sur le site de Murambi ; les français avaient prétendu venir au secours des Tutsi qui étaient massacrés, mais c’est avéré faux car les quelques survivants Tutsi qui sont allés à Murambi étaient régulièrement kidnappés et tués par les Interahamwe sous les yeux des français passifs. Des militaires français ont violé des femmes et jeunes filles Tutsi, et ont commis d’autres infractions comme documenté dans le rapport Mucyo. A la fin de leur mission les militaires français ont demandé à ceux qui se trouvaient encore dans le camp de Murambi, de se réfugier au Congo en leur promettant qu’ils allaient les aider a revenir au Rwanda. Ceux qui venaient d’exécuter le Génocide, les escortèrent au Congo où se trouvaient déjà de nombreux autres réfugiés, en leur disant que les Inkotanyi les tueraient, mais c’était une manœuvre des génocidaires qui comptaient s’en servir comme otages une fois dans les forêts du Congo.
Au mémorial du Génocide de Murambi ont été inhumés près de 50,000 corps de victimes du Génocide perpétré contre les Tutsi, de ceux qui furent massacrés à Murambi, et d’autres corps qui ont été déplacés du mémorial de Gasaka.
3. Massacres de Tutsi à l’église catholique de Cyanika, Nyamagabe
Cette paroisse a une histoire particulière par rapport aux Tutsi car en 1963, des massacres de masse ont visé les Tutsi de la région, massacres qui ont été désignés dans les rapports internationaux et les media comme étant constitutifs d’un génocide. Tous les rwandais ont appelé cette période « Noël de sang ».
Depuis 1990-1994 les Tutsi de Cyanika ont encore été persécutés sous l’instigation du Bourgmestre de la Commune Karama Désiré Ngezahayo, car désignés comme étant des complices des Inkotanyi tout comme, en 1963, ils avaient été désignés comme étant les complices des Inyenzi, et dont certains furent tués et d’autres emprisonnés.
Le 8 avril 1994, le nombre des réfugiés Tutsi, venant des Communes Karama, Kinyamakara, Nyamagabe, Rukondo, Karambo et d’autres, a augmenté à la Paroisse Cyanika, où ils étaient accueillis par le Père Joseph Niyomugabo. La raison pour laquelle la plupart d’entre eux s’y sont réfugiés, est que le Bourgmestre Ngezahayo et des Conseillers avaient fait le tour de la commune et, à l’aide d’un porte-voix, ont exhorté ceux qui s’étaient cachés à aller se réfugier à la paroisse, en leur assurant, faussement, que leur sécurité y sera assurée.
Le 11 avril 1994, le Sous-préfet de la Sous-préfecture de Karaba, Joseph Ntegeyintwari, a tenu une réunion des Bourgmestre des Communes Rukondo, Karama et Kinyamakara, au terrain de football de Cyanika, à Murizo, et ont peaufiné leur plan d’extermination des Tutsi. Il y avait également un groupe de tueurs qui s’était fait appelé « minwari (MINUAR) » et qui était dirigé par Ntaganira Emmanuel alias Muturage et Rubera ; ils recevaient des armes du Colonel Simba qui rencontrait ceux-ci à leur bureau situé a la Commune Karama ; les tueurs distribuaient à leur tour les armes à la population. Ce groupe de tueurs avait comme mission de tuer les Tutsi et de porter main force aux génocidaires qui rencontraient de la résistance. Un des leurs, l’Interahamwe Kazungu, lança ce même jour une grenade sur les réfugiés de Cyanika, avant même que ceux-ci ne subissent l’attaque ultime.
A l’aube du 20-21 avril 1994, les Tutsi qui s’étaient réfugiés à Murambi furent massacrés par de tueurs qui, après leur forfait, sont allés à Cyanika le 21 avril 1994 où ils arrivèrent vers 10h du matin ; les Interahamwe et les gendarmes ont lancé des grenades sur les réfugiés de la paroisse, et d’autres utilisèrent des armes traditionnelles pour tuer les Tutsi. Le même jour, ont été tués près de 35,000 Tutsi dont les corps ont été inhumés au mémorial du Génocide de Cyanika.
A la tête des autorités qui ont planifié et mis en œuvre les massacres des Tutsi qui s’étaient réfugiés à la Paroisse catholique de Cyanika, il y avait le Préfet de la Préfecture Gikongoro Laurent Bucyibaruta, le Colonel SIMBA Aloys, le Sous-préfet Joseph NTEGEYINTWARI, le Bourgmestre NGEZAHAYO Désiré, le Député HANYURWIMFURA Marc, MUNYANDINDA Joel inspecteur des écoles dans la commune Rukondo, NKURIKIYIMANA Jean Bosco qui dirigeait le Centre de Santé de Cyanika, Charles UGIRINDEGE Assistant bourgmestre de Rukondo, son beau-frère SEBAKIGA Jean Bosco alias Kinigamazi, vétérinaire de la Commune Karama, MUNYANEZA Jean Bosco, IPJ à la Commune Karama, MPAKANIYE Froduald, encadreur de la jeunesse de la Commune Karama, Jean Baptiste KAYIGAMBA agent du Centre de Santé de Cyanika, GAHAMANYI Callixte, commerçant, les Conseillers MUNYANKINDI Callixte, BASHIMUBWABO Jean Baptiste, MURINDABABISHA Directeur du Groupe Scolaire Cyanika, HISHAMUNDA Charles, encadreur de la jeunesse à Gikongoro, GATARI Jean Damascene, agronome, GASHARA Alphonse enseignant a Mbazi, NZUNGIZE Azaria, secrétaire à la Sous-préfecture de Karaba, KAREKEZI Kizito étudiant à l’Université Nationale du Rwanda et footballeur de l’équipe Mukura, MAGEZA Onesphore policier à Rukondo, MUDENGE Yuvenali (réserviste), les policiers HABIMANA et MUNYANEZA Sipiriyane et certains des responsables de cellules des Secteurs Cyanika, Kibingo, Gitega, Ngoma, Muganza, Kiraro, Kiyumba et Nyanzoga.
Les Interahamwe qui ont participé aux massacres des Tutsi à la Paroisse de Cyanika sont : DEMOKARASI Joseph alias Rubera, ULINZWENIMANA Etienne alias Kazungu, NTAGANIRA Emmanuel alias Muturage, NKURIZA Anastase alias Serufirira, KABERA Vianney et son grand frère GASURIRA, NIZEYIMANA Athanase alias Musebeya, MUSONI Anselme, MUGAMBIRA Apollinaire, BIZIMANA alias Munyu, KARAMIRA Maurice, KAYIHURA Joseph, MUGENGA Joseph, MUBIRIGI Zakariya, RWAMAKUZA Cyriaque, RUDAHANWA Telesifore, BUKEYE Alfonsi, MUTAJUGIRE Francois alias Rupajyama, MIYERI, NAMBAJE Alfonsi, Aloyizi SEKAGANDA fils de Ntwarabashi, RUTEBUKA Martin, RWAGASANA Venant, BIZIMANA alias Nderema, MUHAYA fils de Mishogoro, Dominiko fils de Busizori, RUKARA Mariko, SENYANA fils de Butuyu, et d’autres.
4. Massacres de Tutsi à la Paroisse catholique de Kaduha, Nyamagabe
La Paroisse de Kaduha est située dans l’ancienne Commune Karambo, Sous-préfecture de Kaduha, Préfecture de Gikongoro. Les Tutsi qui, espérant y trouver sécurité, s’y sont réfugiés venaient de différentes Communes dont celles de Muko, Musange, Karambo et Musebeya. Les Tutsi ont commencé à y arriver le 8 avril 1994. Le 17 avril 1994, le gendarme présent à la paroisse a confisqué les armes traditionnelles que les réfugiés avaient avec eux, leur disant qu’ils seront protégés. Avant cette date les réfugiés partageaient entre eux les provisions avec lesquelles ils s’étaient enfuis, la sœur allemande MILGHITA qui dirigeait le Centre de Santee, cuisinait de la bouillie pour les enfants. Les prêtres avaient un stock de riz mais les réfugiés ne pouvaient en bénéficier à cause du Père Nyandwi Athanase Robert, de nationalité burundaise, qui était parmi ceux qui planifiait leur mort.
Le 20 avril 1994, ce prêtre Nyandwi Athanase Robert a demandé aux réfugiés d’acheter le riz en stock, à 5 francs le kilo alors qu’il savait qu’ils mourraient de faim. Ils ont dépensé jusqu’à leur dernier franc pour acheter de ce riz.
Le 21 avril 1994, est arrivé un groupe de nombreux tueurs dont des gendarmes, des réservistes de l’armée et autres génocidaires venant des Communes Muko, Karambo, Musange et Musebeya ; ils étaient armés d’un grand nombre d’armes diversifiées et ont encerclé les réfugiés. Le même jour, près de 45,000 Tutsi ont été tués à la Paroisse catholique de Kaduha, il y eu très peu de survivants.
Les massacres ont été encouragés et dirigés par des personnes intellectuelles parmi lesquelles il y avait le Pere Nyandwi Robert, le Sous-préfet Joachim Hategekimana, un agent du projet PDAG surnommé Katasi et qui est réputé pour avoir tué de nombreux Tutsi à Kaduha, Ngezahayo Straton, réserviste de l’armée, Karangwa François agent du Tribunal, le réserviste Gerivasi, Kayihura Albert, Bourgmestre de la Commune Muko, les Interahamwe Rukokoma, Ntawera, Matabaro, et d’autres ; ils ont collaboré avec d’autres Interahamwe et des étudiants de Ruhengeri qui s’y étaient réfugiés fuyant les troupes du FPR en route vers la libération du pays. Tous étaient dirigés par des gendarmes qui étaient venus de Gikongoro le 8 avril 1994 et recevaient leurs instructions du Colonel Simba qui était le responsable à Gikongoro et Butare de ce qui avait été appelé « Auto-défense civile ».
Le nombre de ceux qui ont été inhumés jusqu’ici au mémorial du Génocide de Kaduha est de 47,311. Dans cette région, les Tutsi survivants ont continué a être pourchassés et tués parce que Kaduha était situé dans la zone turquoise contrôlée par les troupes françaises, ce pourquoi le FPR Inkotanyi n’y avait pas accès.
5. Massacres de Tutsi en différents endroits dans la Commune Ntongwe, Ruhango
a) Sur les collines de Ntongwe
Les 18-19 avril 1994 jusqu’au 20 avril 1994, des Tutsi sont allés sur les collines et ont essayé de se défendre. Sur la colline de Nyiranduga, se sont rassemblés de nombreux Tutsi venant de Gisali et Kibanda, Mbuye, et Mukinga dans l’ancienne Commune Mugina ; ils ont résisté pendant quatre (4) jour, se battant contre les tueurs qui les attaquaient et les repoussant à chaque fois ; ensuite le Bourgmestre de la Commune Ntongwe, Kagabo Charles, et le Sous-préfet de la Sous-préfecture de Ruhango, Placide Koroni ainsi que des gendarmes ont exhorté les Tutsi de se rendre à la commune où ils leur promettait d’assurer leur sécurité, mais c’était une manœuvre pour pouvoir les rassembler et les tuer tous.
Des tutsi se sont également défendus sur la colline de Gacuriro, Nyakabungo, mais ont été amenés par le Bourgmestre Kagabo à la commune où il leur a promis protection. C’était évidemment une astuce pour pouvoir les tuer. C’était le 19 avril 1994.
Un autre endroit de résistance a été Ntungamo, Kayenzi dans Nyabitare. Ils se sont battus contre les Interahamwe en utilisant lances, arcs et surtout les pierres, mais après ils ont été attaqués par d’autres Interahamwe venant de Nyakabungo et du Secteur Ntongwe qui les ont défaits, certains ont fui vers Tambwe et Ruhango, d’autres furent tués en cours de route.
b) Massacres de Tutsi au bureau de l’ancienne Commune Ntongwe
Les Tutsi ont commencé à s’y refugier depuis le 10 avril 1994 parce que les Hutu avaient commencé à incendier leurs maisons, les tuer et abattre leur cheptel bovin pour en consommer la viande. Sur certaines collines les Tutsi ont commencé de se défendre mais le Bourgmestre de la Commune Ntongwe et le Sous-préfet Placide Koroni se sont servis des Conseillers de secteurs pour les convaincre de se rendre à la commune où ils leur promettaient sécurité. Les derniers Tutsi arrivèrent à la commune les 19 et 20 avril 1994, et même ceux qui s’étaient cachés ailleurs sont allés à la commune, faisant confiance au Bourgmestre Charles Kagabo et au Sous-préfet Placide Koroni, ignorant que c’était un piège préparé à l’avance pour pouvoir les exterminer.
Depuis les 17-18 et 19 avril 1994, les Tutsi qui s’étaient réfugiés à la commune se sont d’abord défendus avec des pierres et ont repoussé leurs assaillants jusqu’au 20 avril 1994. Les Bourgmestre Kagabo Charles et le Sous-préfet Placide Koloni, lorsqu’ils rassemblaient les Tutsi à la Commune Ntongwe, de l’autre côté ils rassemblaient également les tueurs : des Interahamwe sont venus de Bugesera, des réfugiés burundais de leur camp de Nyagahama, ainsi que d’autres génocidaires et des gendarmes que Kagabo était allé quérir à Nyanza. Ils se sont tous rencontrés à la Commune Ntongwe pendant la nuit du 20 au 21 avril 1994, attaquèrent les réfugiés Tutsi et les exterminèrent. Cette attaque avait été planifiée entre le 17 et le 19 avril 1994 lors de réunions à Mitima, dirigées par des gendarmes et auxquelles participaient le Bourgmestre Kagabo et des réfugiés burundais. Ils ont cherché un chemin où passer inaperçus et surprendre les Tutsi qui se trouvaient à la commune. C’est ainsi qu’ils sont passés par Gako au lieu de passer par Nyakabungo pour que les Tutsi n’entendent pas le bruit des moteurs et s’enfuient ; arrivés à Mitima, ils ont arrêté les véhicules et ont continué à pied guidés par Kagabo.
Dans la nuit du 20 avril 1994, tous les groupes de tueurs se sont rencontrés à la commune la nuit jusqu’au 21 avril 1994, les militaires et les policiers ont tiré sur les réfugiés et lancé des grenades, ceux qui fuyaient rencontraient devant eux des tueurs armés de machettes et d’armes traditionnelles qui les tuaient, il était évident que les massacres avaient été bien préparés dans les réunions de Mitima.
c) Massacres de Tutsi dans la vallée de Nyamukumba
Les massacres ont été commis le 21 avril 1994. A Nyamukumba, c’est à deux kilomètres à partir du bureau de l’ancienne Commune Ntongwe vers Ruhango. Il y a une très grande vallée. La vallée a été comparée à l’apocalypse des Tutsi qui s’étaient réfugiés à la Commune Ntongwe à cause des massacres et du nombre élevé de Tutsi tués qui avaient pu survivre aux grenades, balles et machettes lors de l’attaque sur la Commune Ntongwe, certains étaient grièvement blessés.
Sans la moindre pitié, les militaires ont posté des armes de gros calibres sur les collines surplombant Nyamukumba, de sorte que tout fuyard était immédiatement repéré parce que la vallée était grande ; les survivants des massacres de la commune ont ainsi été poussés vers la vallée et tous les autres chemins bloqués. Au centre commercial de Kinazi il y avait des Interahamwe et des réfugiés burundais, à Nyagahama des burundais et des Interahamwe de Bugesera; les militaires tiraient sur les survivants pour les pousser vers Nyamukumba. Lorsque ceux-ci sont arrivés à Nyamukumba, tous ceux qui les attendaient sur les collines tirèrent en même temps, et les Interahamwe armés de machettes, gourdins et lances ont achevés ceux qui respiraient encore, un très grand nombre de Tutsi y furent massacrés. Cet endroit a été appelé « apocalypse de Nyamukumba ».
d) Massacres de Tutsi à l’endroit appelé “CND” à Rutabo
La fosse appelée CND était très large et profonde, elle avait été creusée en 1992 derrière l’école primaire de Rutabo. Y ont été tués de nombreux Tutsi et d’autres tués ailleurs y étaient jetés. CND est une appellation qui fait allusion au CND à Kigali, où campaient les troupes du FPR venus assurer la protection de leurs dirigeants qui devaient participer au gouvernement de transition. En d’autres mots, amener à la fosse des Tutsi pour les y tuer est une manière de les envoyer auprès des leurs au CND Kigali.
Les tueurs de cette fosse étaient dirigés par Nsabimana Jacques qui dirigeait les CDR à Ntongwe, surnommé pilato parce qu’il torturait d’abord tous ceux qui allaient être tués a cette fosse. Parmi les plus redoutables tueurs il y avait Kagabo Charles, Bourgmestre de la Commune Ntongwe, Placide Koroni, Sous-préfet de la Sous-préfecture de Ruhango, les Conseillers de tous les 13 secteurs qui composaient la Commune Ntongwe, les militaires Hitabatuma, Rucyeragabiro de Nyabusinzu chez Kamugunga, Visenti de chez Birara, Vianney lui aussi de Nyabusinzu,… un tueur nommé Ntintanguranwa qui a brûlé un nouveau-né sur du charbon ardent à Gishari, Kareba, le Conseiller de Kareba, Kanyandekwe Zefaniya et le responsable Kageruka Aristarque, l’enseignant Nsabimana Jacques (qui s’était donné le nom de Pilato), un commerçant de Kareba du nom de Simoni Munyentama et son grand frère, Nahayo Florent, des burundais non identifiés qui habitaient le camp de Nyagahama, qui ont tué des Tutsi et qui ont extirpé après du corps des victimes leurs cœurs qu’ils ont grillés sur du charbon ardent puis mangés.
6. Massacres de Tutsi à la Paroisse catholique de Karama, Runyinya, Huye
Le 8 avril 1994, les Tutsi ont commencé à se réfugier à Karama. Ils venaient de Ramba et de la Préfecture Gikongoro pour se réfugier à la Paroisse de Karama. Ils étaient apeurés, fatigués et certains d’entre eux étaient blessés.
Le 10 avril 1994, le Bourgmestre Hategekimana Deogratias a appelé en réunion tous les Conseillers Hutu, tous les responsables de cellule Hutu, et d’autres personnes influentes comme le directeur de l’école secondaire APAREC, et des commerçants, pour planifier le Génocide. Aucun Tutsi ne pouvait y participer et deux barrières filtrantes avaient été installées, une devant la commune, et l’autre à l’entrée du centre, elles étaient gardées par des policiers qui ne laissaient passer que ceux qu’ils connaissaient. Serutwa Damien, responsable de la cellule Umuyange s’est vu refuser l’entrée parce qu’il était Tutsi.
Le 11 avril 1994, le Bourgmestre Hategekimana Deogratias est allé avec le policier du nom de Gatitiba Thomas, sur une moto de la commune, à Ramba, et ont ordonné aux réfugiés Tutsi qui s’y trouvaient de se rendre à Karama. Le même jour de nombreux Tutsi y sont arrivés, dont des blessés en grand nombre. Le Père Ngomirakiza François a amené les plus grièvement blessés à l’hôpital universitaire de Butare et a commencé à chercher de l’assistance pour pouvoir nourrir les réfugiés qui étaient devenus très nombreux à Karama.
Les 14-16 avril 1994, les maisons des Tutsi furent en même temps et le même jour incendiées sur les collines avoisinantes de Karama : Nyarusange-Mukongoro-Kibingo-Buhoro-Bunazi-Uwarugondo…tous les réfugiés ont été rassemblés à Karama à l’église, dans les écoles, au marché ; ils étaient venus de communes de Gikongoro et Butare : Runyinya, Rwamiko, Mubuga, Kinyamakara, Huye (Muyogoro), Maraba, Mudasomwa, Nyakizu (Rusenge), Kivu. Ils ont tous été recensés et placés dans les salles de classe selon leur secteur d’origine.
Le 16 avril 1994, le nommé Myandagara a été le premier à être tué à Karama, dans un cabaret à Kibingo. Le 18 avril 1994, le Bourgmestre et des policiers ont amené le trésorier d’une coopérative appelée KOPIARU, pour qu’il leur montre les clés du coffre-fort et il a été immédiatement tué. Les tueurs ont sabordé une canalisation d’eau, ont versé du poison dans la rivière Agatenga pour empoisonner les réfugiés Tutsi. Le Bourgmestre Hategekimana Deo est allé chercher des gendarmes originaires de Karama dont Twagirumukiza Charles, lesquels ont amené des munitions et des fusils ; Hategekimana a fait cuire un bœuf entier pour les gendarmes, et a mentit aux Tutsi en leur disant qu’ils étaient venus assurer leur sécurité.
Le 20 avril 1994, les gendarmes dirigés par Rwasamanzi et Kimasa, des employés de l’APAREC, sont allés à Bunazi où s’étaient aussi réfugiés des Tutsi et ont tiré et lancé des grenades sur ceux-ci. Les survivants ont rejoint les autres réfugiés à Karama. Cette nuit, le Père Nomirakiza a dit aux réfugiés qu’il n’y avait plus moyen de fuir, et ceux qui l’ont essayé ont été interceptés à la barrière de Rugondo, on leur lança des pierres et ils furent ramenés.
Le 21 avril 1994, de très nombreux Hutu armés de gourdins et de machettes entrèrent à l’endroit où se trouvaient les réfugiés et les toisèrent ; à 11h de l’avant midi de nombreux Interahamwe habillés de feuilles de bananiers sèches sont venus de tous les côtés, ont encerclé les réfugiés et les ont massacrés. Ensuite ils ont rassemblés les enfants qui avaient survécu à ces massacres, leur ont fait cuire de la bouillie dans laquelle ils versèrent de l’acide ; les enfants ont bu la bouillie et moururent tous.
Près de 70,000 victimes ont été inhumées au mémorial du Génocide de Karama.
7. Massacres de Tutsi sur la colline de Gashinge, Kamonyi
Gashinge est une colline située dans le village de Gasharu, Cellule Nyamirembe, Secteur Karama, District de Kamonyi mais était à l’époque située dans la Commune Kayenzi qui était dirigée par Mbarubukeye Jean.
Le 19 avril 1994, des Tutsi se sont réfugiés sur cette colline, ils venaient des Communes Nyabikenke, Rutobwe, Musasa, Taba et ailleurs. Depuis le 19 avril 1994, ils ont commencé à subir des attaques menées par des Hutu venant des Communes qui avaient des Tutsi réfugiés sur cette colline. Les Tutsi se sont défendus avec des pierres et repoussèrent leur assaillants, et ceux-ci ont pris la décision de raser l’endroit des bananiers et d’un bois appartenant à l’Etat qui s’y trouvaient.
Le 21 avril 1994, les Tutsi furent attaqués par un groupe de nombreux tueurs, dont des militaires, des policiers et d’autres génocidaires dirigés par Buyumbu qui a également dirigé des attaques sur Bibare. Ils ont tué les Tutsi avec des grenades, des fusils, et ensuite les Interahamwe se sont rués sur les Tutsi et les massacrèrent avec leurs machettes, houes, haches et piques. Les massacres ont commencé le matin et cessèrent l’après-midi. Les survivants se sont réfugiés sur la colline de Bibare et y furent massacrés le 22 avril 1994. D’autres qui ont pu survivre sur cette colline et d’autres enlevés de leurs domiciles, les premiers jours devaient marcher des kilomètres et des kilomètres pour être amenés être tués dans la rivière Nyabarongo. Les autres ont été rassemblés sur le terrain du Secteur Nyamirembe, appelé CND, et tués sur place.
8. Massacres de Tutsi à Cyakabiri, Rutobwe, Gitarama, Muhanga
Cyakabiri est situé en Cellule Kigarama, Secteur Cyeza, District Muhanga. C’est un endroit très connu dans la région à cause d’une barrière qui y a été installée et sur laquelle ont été tués près de 100 Tutsi, l’endroit est situé entre Kayumbu et Cyeza, et la barrière était destinée à intercepter et tuer les Tutsi qui étaient sur le chemin pour aller se réfugier à Kabgayi ; ils venaient des Communes Rutobwe, Nyabikenke, Kayenzi et Rukoma.
Cette barrière a été installée vers le 14 avril 1994 parce que les massacres dans Rutobwe ont commencé vers le 13 avril 1994, mais de nombreuses personnes y ont été tués surtout le 21 avril 1994, même si avant cette date et après y ont été tués des Tutsi jusqu’à ce que le FPR Inkotanyi arrête les massacres dans cette localité. Ceux qui étaient tués étaient jetés dans la fosse appelée CND, ils étaient tués de façon atroce par des armes traditionnelles, dont des gourdins cloutés – dits « nta mpongano y’umwanzi » ou « pas de pitié pour l’ennemi » – , des bâtons, des piques, machettes et autres. En général dans la localité les Tutsi étaient torturés car on leur coupait des parties du corps comme les oreilles, les talons d’Achille pour revenir les achever petit à petit. L’autre particularité de la localité est que les Tutsi étaient tués par empoisonnement, les tueurs mettaient dans des bouteilles des produits destinés à tuer des insectes malfaisants et forçaient les Tutsi à boire, leur disant que c’était du lait et qu’ils aimaient le lait.
Parmi les responsables des massacres il y a le Ministre de la Jeunesse et des coopératives, Nzabonimana Callixte qui était à la tête de ceux qui incitaient la population de Rutobwe à tuer les Tutsi. Il utilisait un véhicule de marque Volkswagen dans laquelle il avait installé un porte-voix, et il passait par Rutobwe en se rendant chez ses parents dans l’ancienne Commune Nyakabanda, et incitait la population à tuer les Tutsi qu’il leur disait être leurs ennemis. Nzabonimana a également amené de nombreuses machettes qu’il distribuait en cours de route à la population. Il avait également des grenades qu’il ne distribuait qu’aux initiés car beaucoup ne savaient pas les manier. Il y en a d’autres comme SEROMBA Barthazar, secrétaire du MDR dans la commune, MUVUZAMPAMA vice-président du MDR, MPARABANYI, AYIDINI, DUSABE, KAMPAYANA, HARINDIKIJE et d’autres.
Après le Génocide, les corps récupérés à Cyakabiri ont été inhumés au mémorial du Génocide de Kayumbu où reposent 428 corps récupérés dans Rutobwe. Ce mémorial est érigé dans le Secteur de Kayumbu en District de Kamonyi.
9. Massacres de Tutsi dans le Secteur Tumba (Mpare na Musange), Huye
Mpare est actuellement situé dans le Secteur Tumba, et à l’époque était situé dans l’ancienne Commune Huye. Lors du déclenchement du Génocide, toute la population s’est mise ensemble pour aller à Muyogoro intercepter les tueurs qui venaient de Nyaruguru.
Le 20 avril 1994, le Bourgmestre Ruremesha Jonathan qui dirigeait la Commune Huye et était originaire de Mpare, a organisé une réunion pour les seuls Hutu, les Tutsi en ont été chassés.
Le lendemain 21 avril 1994, tous les Hutu ont marqué leurs maisons par des feuilles de bananiers sèches, et ont commencé à tuer les Tutsi, les piller, détruire leurs maisons et incendier celles-ci, Les militaires, les gendarmes et la population Hutu ont tous participé à l’extermination des Tutsi. Les militaires et les gendarmes sont allés à l’endroit sur les hauteurs appelé Nganzagihendo pour tirer sur les réfugiés Tutsi qui y étaient rassemblés.
Près de 11,000 Tutsi y ont été tués et venaient de Musange, Mpare, Vumbi, Gishamvu, et Nyaruguru.
A la tête des planificateurs et ceux qui ont mis en œuvre le Génocide, il y a le Bourgmestre RUREMESHA Jonathan et le Député BANYANGIRIKI Zacharie, originaire de Mpare, il a organisé une réunion à l’endroit appelé Kabuga dans laquelle il a incité la population a tuer les Tutsi, notamment en ces termes : « notre ennemi est le Tutsi, quel qu’il soit ».
Les tueurs qui ont commis les massacres sont HARINDINTWARI Theogene qui est allé à Butare chez Ntahobari Maurice amener de l’essence pour incendier les maisons des Tutsi. BUYENGE Charles, Conseiller du Secteur Musange, Nzabahimana Vianney Conseiller du Secteur Mpare, Hangimana Chrisostome qui a fui en Zambia, Bungurubwenge Augustin qui s’est évadé de la prison et a fui en Afrique du Sud, Mondi Mazuru chauffeur du DGB, a fui au Malawi, et d’autres.
10. Massacres de Tutsi à Gishubi, Gisagara
Pendant le Génocide, Gishubi était dirigé par le Conseiller Ugirashebuja François lequel a dirigé les massacres, en collaboration avec son compagnon Ndayishimiye Augustin, Conseiller du Secteur Nyaranzi qui était à proximité. Les réunions qui préparaient le Génocide se tenaient à Gabiro chez Mukurarinda Innocent. Ce Mukurarinda était comptable dans la Commune Kibayi.
Ceux qui sont réputés avoir tué les Tutsi sont:
-Ugirashebuja Francois Conseiller du Secteur Gishubi, Mukurarinda Innocent qui a fui en Uganda, le policier Ubarijoro Gaspard qui a tué de nombreux Tutsi avec son fusil, Nkurikiyinka Viateur alias MDR, Ntahobavukira Jerome, Matene de Rubayi, Yoboka Anasthase, Munyagandwi Anasthase, Ndekezi Augustin, Nyandwi Francois, Rwamakuba, Bugirimfura Visenti, Semicaca, Kabandana Jean Bosco, Nyirishema Saveri, Ugaragaye Emmanuel, Shyirambere Francois alias Nyabarongo, l’enseignant Mwumvaneza Alexandre , Ngwenyerezi Vianney, Rukundo fils de Njogori qui a semé la désolation dans la région, Niyongira Bonaventure, policier, Mbanzwirikeba Cassien, militaire, Ruzindana fils de Nzirumbanje, a fui en Afrique du Sud, Rugira Emmanuel, condamné à la prison à perpétuité, il s’est évadé de la prison et a fui en Europe, Havugimana Anatole (+) étudiait à l’université, Rutebuka Alexandre encadreur de la jeunesse de la Commune Muganza, Munyagandwi Venuste, a plaidé coupable et a eu sa peine réaménagée, donne de nombreuses informations sur le Génocide, des burundais de la famille de Mushatsi qui ont tiré sur de nombreux Tutsi avec leurs arcs et parmi eux il y a notamment Karuhije, Macumi, Sekimonyo, Muhitira, Ndururutse (ils sont retournés au Burundi).
Le 20 avril 1994, les maisons des Tutsi ont été incendiées pendant la nuit, et ils ont commencé à être tués le 21 avril 1994. Les Tutsi qui ont été tués à Gishubi sont ceux qui y habitaient et ceux qui sont venus de diverses localités, notamment Ndora, Musha, Gikongoro, et qui voulait fuir. Ils ont été tués en très grand nombre le jeudi 21 avril 1994, et les derniers le furent le vendredi 22 avril 1994, et les tueurs continuèrent pour tuer à Musha, et le samedi 23 avril 1994 ils sont allés à Kabuye.
Au Secteur Gishubi et aux alentours ont été tués plus de 2,000 Tutsi.
A chaque intersection de routes il y avait des barrières au bureau du Secteur, au centre de Gabiro il y en avait deux, dans Busave, à Gafita, dans Gatare, à Muswa, à Zanwe sur la route qui mène à Kigozi, a Mbonwa et dans Bitare.
Gisovu a cette particularité qu’aucun Tutsi qui y était présent n’a survécu. Lorsqu’un Tutsi manquait à l’appel dans les corps des victimes, il était traqué dans les Secteurs du voisinage jusqu’à ce qu’il soit découvert et tué, et seulement les tueurs revenaient. Ont survécu ceux qui avaient réussi à quitter le secteur et se réfugier ailleurs.
11. Massacres de Tutsi à Musha, Commune Mugusa, Gisagara
Les réunions qui planifiaient le Génocide se tenaient dans le bâtiment de l’IGA, et étaient dirigées par le président du MRND, Muramba Augustin. Y participaient Kanyabikari Telesphore, Ngango Viateur, Mukasangwa Alice, Sekamana Jean Marie Vianney, Muzigirwa Francois, Muhozi Bernard…
Les endroits où ont été tués de nombreux Tutsi sont le centre commercial de Musha, le Secteur Cyayi et à Murama, ainsi qu’au centre de santé de Musha.
A la tête des tueurs il y a Kabayiza, Bourgmestre de la Commune Mugusa, Ngango Viateur Conseiller du Secteur Musha, Muramba Augustin, Inspecteur des écoles primaires, Kanyabikari Telesphore, directeur des écoles primaires. Il y a aussi des policiers dont Gasasira, Panueri et Emmanuel Nsanzimana. Et encore Sibomana Ignace, directeur de l’hôpital et Habyarimana Stanislas, qui dirigeait la barrière du centre de Musha.
12. Massacres de Tutsi en différents endroits de la ville de Butare, Huye
Le 19 avril 1994, Sindikubwabo Theodore, président du gouvernement dit Abatabazi, a organisé une réunion à la salle polyvalente de la Préfecture de Butare. A cette réunion avaient été conviées toutes les autorités de toutes les structures de la Préfecture, lesquelles ont reçu des instructions pour déclencher le Génocide. Ces instructions ordonnaient de tuer tous les Tutsi sans exception, et décrétaient que celui qui refusera de le faire ou les protègerait sera lui-même tué.
La réunion a commencé par l’annonce du limogeage du Préfet de Butare Jean baptiste Habyarimana, Tutsi qui sera lui-même tué avec toute sa famille. Il a été remplacé par Nsabimana Sylvain qui a immédiatement organisé une réunion le 20 avril 1994, et donna instruction de commencer le Génocide à tous les Bourgmestres. Les conseillers ont le même jour réuni tous les responsables de cellules, et aucun Tutsi n’était autorisé à participer à ces réunions, même s’il était une autorité du rang des autres conviées aux réunions.
Dans la ville de Butare un grand nombre de Tutsi ont été tués à la Préfecture de Butare, à l’hôpital universitaire (CHUB), à l’Ecole des Sous-Officiers (ESO), dans le bois appelé « arboretum », à l’Université Nationale du Rwanda, à l’usine de fabrication d’allumettes (SORWAL), à l’EAV Kabutare, au Groupe Scolaire Officiel de Butare, dans le bois du centre caraes de Butare, dans le bois du Musée, à la Paroisse Ngoma, au centre de santé de Matyazo, au petit pont de Cyarwa, et sur les différentes barrières dont celle de l’hôtel Faucon, celle de l’université, à Mukoni devant les domiciles de Ntahobari Maurice et Nyiramasuhuko Pauline, devant chez Bihira Juvenal, au-dessus du Musée, à Rwabuye et ailleurs.
Les Tutsi qui s’étaient réfugiés au groupe scolaire officiel ont commencé à être tués le 21 avril 1994. Ils ont été tués par de nombreux Interahamwe et des militaires. Le même jour ont été tués les Tutsi à l’Université Nationale de Butare. Beaucoup parmi les enseignants Hutu renseignaient sur les positions de leurs collègues et des employés Tutsi. Beaucoup parmi les enseignants, les employés et les étudiants Hutu allaient sur les barrières de Mukoni et de chez Sebukangaga. Ceux qui survivaient aux massacres étaient sujets à d’incessantes tracasseries au bureau de la Préfecture, à l’Elise anglicane et à l’hôpital universitaire (CHUB). A l’hôpital ils avaient une tente devant les services dermatologie et pédiatrie, ils étaient tués pendant la nuit et le matin un véhicule venait transporter les corps sans vie des Tutsi pour aller les jeter dans la nature.
Les Tutsi qui se sont rendus à la Préfecture de Butare depuis le 19 avril 1994, étaient tués et les femmes violées chaque jour. Chaque nuit un véhicule venait chercher ceux qui devaient mourir, sous la supervision d’Arsene Shalom Ntahobari, Nyiramasuhuko Paulina, Joseph Kanyabashi, Jumapili et Nsengiyumva. Les massacres étaient dirigés par le Préfet Nsabimana, les gendarmes et les militaires.
Nyiramasuhuko est allée à l’EAR et ordonna aux réfugiés de quitter l’endroit parce que les réfugiés amenaient de la saleté en ville. Utilisant un porte-voix elle a exhorté la population Hutu à enlever les broussailles et la saleté de la ville. Les réfugiés Tutsi se rendirent à la Préfecture de Butare et y vécurent des moments très difficiles. Ensuite, sur ordre de Kanyabashi, des bus ont transporté les réfugiés pour les amener à Nyange, mais les tueurs qui escortèrent les bus tuèrent les réfugiés à Kibirizi. Les survivants sont revenus en très petit nombre à la préfecture, et à la suivante opération de propreté dans la ville, il furent amenés à Rango où ils ont vécu dans des conditions très difficiles et où les FPR Inkotanyi ont trouvé ceux qui avaient survécu et les a sauvés.
Le 30 avril 1994 ont été tués les Tutsi qui s’étaient réfugiés à la Paroisse de Ngoma.
Parmi les responsables des massacres dans la ville de Butare il y a le Bourgmestre Kanyabashi Joseph, Munyagasheke Isaac et son fils Désiré Munyaneza, Ntahobari Arsene Shalom, Nyiramasuhuko Pauline, Ntiruhanwe Jean, Kayibanda Jules Nkiko, Amandin Rugira Pacifique, Karabaranga Isaie, Murangwa Innocent, Emmanuel Setakwe, Jacques Habimana qui était Conseiller du Secteur Ngoma et d’autres. Il y a également des militaires handicapés de guerre, et des réfugiés Burundais.
Les endroits où ont été tués de nombreux Tutsi dans la ville de Butare le 21 avril 1994 sont :
A la Préfecture de Butare : y ont été rassemblées des personnes venant de régions diverses (Kigali, Nyaruguru, Gikongoro, Butare, Karama…).Les Tutsi ont vécu dans des conditions très difficiles, taraudés par la faim et la soif, les femmes subissant des viols, tandis que à chaque instant des véhicules venaient chercher des Tutsi qui allaient être tués, ils l’étaient semble-t-il dans le bois de Kabutare et à Mukoni. Ils ont ensuite amenés des bus sans sièges qui ont embarqué tous les Tutsi pour aller les tuer en dehors de la ville. La plupart ont été tués à Nyange, Kibirizi et au petit pont de Cyarwa.
A l’hôpital universitaire (CHUB) : un Génocide des plus cruel y fut commis ; à part les malades, ceux qui veillaient sur ceux-ci, les médecins Tutsi qui y travaillaient, il y avait également d’autres Tutsi qui s’y étaient réfugiés et dont la plupart étaient blessés et avaient besoin de soins ; les réfugiés furent rassemblés dans une tente de fortune, les autres se trouvaient au service dermatologie, en chirurgie et devant la morgue. Chaque matin à 9h,un véhicule Daihatsu de couleur bleue venait embarquer les corps de Tutsi qui avaient été tués pour aller les jeter ailleurs. Les blessés n’étaient jamais soignés. La plupart étaient amenés à l’ESO et dans le bois de l’IRST pour y être tués. D’autres ont été amenés par les autorités locales à la Préfecture de Butare, ils furent tués par les militaires, les réfugiés burundais et les Interahamwe de la ville de Butare.
A l’EAR Butare ; de nombreux Tutsi y sont morts de soif et de faim. Personne ne pouvait les aider. Nyiramasuhuko a utilisé un porte-voix et a demandé aux tueurs d’enlever la saleté de l’EAR. Ils ont été amenés, malmenés et battus, à la préfecture, et ils ont été embarqués dans des véhicules pour aller les tuer plus loin. Ils ont été amenés à Nyange, Kibirizi où les Interahamwe qui les escortaient les ont tués après les avoir dépouillés.
Dans le bois de l’arboretum et a l’Universite Nationale du Rwanda : L’Université était entourée de barrières. L’une était devant le domicile de Sebukangaga, devant l’entrée principale, l’autre était à Mukoni. De nombreux Tutsi furent tués à l’Université, dans l’arboretum et aux barrières mentionnées ci haut. Ont été tués des étudiants, des enseignants et des employés Tutsi de l’Université, tout comme ceux qui s’y étaient réfugiés. Un ratissage de l’arboretum a été organisé pour traquer les Tutsi qui s’y seraient cachés, le ratissage était très serré et ceux qui y ont participé étaient nombreux. Les Tutsi qui ont été débusqués dans l’arboretum furent tués.
Dans l’EAV Kabutare : y ont été tués des jeunes gens qui y étudiaient, dont la plupart étaient venus du Groupe Scolaire de la Salle de Byumba, pour fuir la zone de guerre. Ils ont été tués par le directeur de l’établissement scolaire qui était le fils de Gitera Joseph Habyarimana qui a fondé le parti APROSOMA et proclamé les 10 commandements des Hutu en 1959. Dans le présent établissement a été érigé un mémorial où reposent les corps des Tutsi qui ont pu être récupérés.
A l’IPRC (ESO) : pendant le génocide des militaires handicapés de guerre y furent amenés, y rejoignant d’autres militaires qui y étaient affectés. Des Tutsi étaient régulièrement amenés à l’ESO et tués sur place, les femmes et les filles Tutsi étaient violées avant d’être tués.
13. Massacres de Tutsi à l’église catholique de Rugango, Huye
A Rugango les Tutsi ont commencé à s’y refugier le dimanche 17 avril 1994 dans l’après-midi. Ils venaient de la Commune Maraba. Le lendemain lundi, ceux qui habitaient les collines avoisinantes de la Paroisse Rugango ont commencé eux aussi à s’y réfugier et ont campé dans l’atelier et l’école. D’autres s’étaient réfugiés au monastère de Gihindamuyaga et ont campé au « camp des jeunes » ; d’autres encore s’étaient réfugiés à Sovu au couvent des sœurs bénédictines. Les Tutsi qui s’étaient réfugiés à l’église de Rugango ont été tués le 21 avril 1994 au matin, depuis 8h. Les tueurs étaient dirigés par Rekeraho Emmanuel qui a dirigé d’autres attaques dans les Communes Maraba, Mbazi, Huye et Ruhashya.
14. Massacres de Tutsi à Kibirizi, Gisagara
De nombreux Tutsi de l’ancienne Commune Nyaruhengeri se sont réfugiés à la commune sur instructions du Bourgmestre Kabeza Charles, et ont été tués dans la nuit du 21 avril 1994. Les femmes et les filles ont été violées avant qu’elles ne soient tuées, des Tutsi ont été tués après avoir creusé la fosse où leurs corps allaient être jetés, d’autres furent jetés vivants dans des latrines. Les Conseillers de secteurs ont déclaré au porte-voix que la paix était revenue et les Tutsi qui s’étaient cachés se sont mis à découvert et furent immédiatement tués. Des chiens ont été utilisés pour débusquer les Tutsi cachés dans les broussailles.
Endroits où il y avait des barrières :
– A l’endroit appelé ‘’Ku giti cy’umukiza » il y avait une barrière dirigée par une femme du nom de Jacqueline, soeur de Gapiri
– Chez les chinois, il y avait une barrière gardée notamment par des femmes dont Mukamuganga, Musanganire, Furaha, Dusabe…
– A Mbeho il y avait une barrière dirigée par Karambizi Alphonse
– Au Secteur Nyaruhengeri, il y avait une barrière dirigée par Ruccyahana Nikodemu
Ceux qui étaient à la tête des tueurs :
-Kabeza Charles Bourgmestre de la Commune Nyaruhengeri
-Mujyarugamba Pascal, Brigadier
-Ruberabahizi Venuste, agronome de la Commune Nyaruhengeri
-Nsabumukunzi Faustin Conseiller du Secteur Kibirizi
-Hakizayezu Augustin
-Sematama Gaspard, est venu de Kansi pour tuer à Kibirizi
-Kavamahanga Charles
-Musonera Barthazar
-Habyarimana Noheri
-Munyashyaka Francois
CONCLUSION
Le Génocide perpétré contre les Tutsi a été planifié et mis en œuvre par l’Etat rwandais. Les Massacres des Tutsi à partir du 7 avril 1994 au matin, en même temps et à travers tout le pays, est la preuve que le plan du Génocide avait été préparé par l’Etat. (Fin).
* Bizimana Jean Damascène, Secrétaire Exécutif Commission Nationale de Lutte contre le Génocide (CNLG)