Des véhicules de particuliers et d’agences de voyage à la frontière de Ruhwa, le 30 septembre 2022
Les frontières entre le Burundi et le Rwanda sont ouvertes depuis vendredi dernier. Des passagers ont également affirmé ne plus être obligés de présenter une autorisation du ministère en charge de la sécurité jadis exigée pour traverser la frontière. Les agents d’immigration disent avoir reçu une note verbale leur instruisant de ne plus exiger l’autorisation du ministère.
Mais le porte-parole du président burundais Evariste Ndayishimiye affirme que les frontières entre le Burundi et le Rwanda restent fermées. Selon le Collectif SOS Médias Burundi qui livre cette information, Diomède Nzeyimana a annoncé vendredi dans une conférence publique des porte-paroles des institutions étatiques que la seule condition pour la réouverture des frontières est « l’extradition des putschistes ».
A la frontière de Kanyaru-Haut située dans la commune de Busiga de la province de Ngozi (nord du Burundi), des passagers ont découvert que la permission exigée par les autorités burundaises pour traverser la frontière n’est plus de mise vendredi matin.
« Je suis venue avec mes deux amies. J’avais entendu que la frontière est ouverte depuis hier soir et j’ai pris le soin de demander à quelqu’un des services de l’immigration à la PAFE (Police de l’air, des frontières et des étrangers). Il m’a confirmée qu’ils ont reçu une note verbale. Alors quand nous sommes arrivées à Kanyaru-Haut, seul le passeport nous était demandé et c’est tout. Voilà nous sommes au Rwanda », a indiqué une Burundaise qui s’est rendue à Kigali ce vendredi.
Coté Rwanda, les frontières sont ouvertes depuis plusieurs mois.
« De l’autre coté au Rwanda, d’abord on se fait tester le Covid-19 à 15.000 Frw (ou 15$). Et puis si les résultats sont négatifs, la police de l’immigration vérifie juste le passeport et ils te disent aisément ‘bon voyage’ », soulignent des femmes qui sont passées par Kanyaru-Haut.
Le seul souci pour les passagers est de trouver un moyen de transport Kanyaru-Kigali car, affirment-ils « les agences de voyage n’avaient pas encore apprêté les véhicules le matin de vendredi ».
Le Collectif SOS Médias Burundi a vérifié sur d’autres postes frontaliers comme à Gasenyi-Nemba (province de Kirundo au nord). Des sources sur place ont confirmé que « nous avons reçu une note verbale nous instruisant de ne plus exiger l’autorisation du ministère ». C’était en milieu d’après-midi. Jusqu’en début d’après-midi, l’autorisation exigée par les autorités burundaises était toujours demandée à cette frontière où passent les réfugiés burundais, rapatriés du camp de Mahama (province orientale du Rwanda).
À la frontière de Ruhwa (Cibitoke- nord-ouest), la frontière est aussi ouverte. Les petits commerçants et commerçants transfrontaliers se réjouissent.
« Nous allons pouvoir écouler de grandes quantités de viande comme avant », a indiqué, avec fierté, un vétérinaire qui tient un commerce à la frontière.
« Nous allons pouvoir traverser la frontière sans aucune entrave, vendre nos produits de l’autre côté de la frontière, y acheter ce dont on a besoin. On n’aura plus de problèmes pour acheter les cahiers à nos enfants ou des souliers », se réjouissent deux femmes rencontrées à cette frontière beaucoup plus utilisée par les Congolais.
Ce ne sont pas les commerçants seulement qui célèbrent. Des habitants ayant de la famille au Rwanda comme cet homme disent que « je pourrais aller visiter aisément ma belle-famille au Rwanda. Mon beau-père me manquait beaucoup ».
Les habitants proches de la frontière plaident pour la levée de l’exigence d’un passeport ou d’un laissez-passer pour avoir la permission de traverser la frontière.
« Nous n’avons pas assez de moyens pour s’acheter un passeport ou un laissez-passer. Nos autorités devaient accepter que l’on traverse la frontière en utilisant la carte d’identité comme cela était le cas avant », ont indiqué à SOS Médias Burundi plusieurs Burundais, surtout à Cibitoke.
Les frontières entre le Burundi et le Rwanda sont fermées depuis bientôt six ans. La situation a été aggravée par la pandémie de Covid-19.
Kigali de sa part a ouvert toutes ses frontières même du côté du Burundi, il y a plusieurs mois.
Le Burundi, lui, persiste arguant que « ses frontières ne seront rouvertes que le jour où les putschistes qui sont au Rwanda seront livrés à la justice burundaise ».
« Les relations entre le Burundi et le Rwanda se portent bien mais pour qu’elles soient rétablies à 100%, il y a une condition que le gouvernement burundais a posé : le Burundi a demandé au Rwanda d’extrader les putschistes pour qu’ils soient jugés par la justice burundaise. Le bon voisinage à la frontière y est et même les bus circulent. Toutefois, la reprise de relations saines ne pourra être possible que quand le Rwanda aura livré ces gens qui ont tenté de renverser le pouvoir », a annoncé Diomède Nzeyimana, porte-parole du président burundais lors d’une conférence publique des porte-paroles des institutions étatiques ce vendredi à Kayanza (nord du Burundi).
Kigali nie et précise qu’il n’a donné « asile » qu’à « des réfugiés qui demandaient asile et se trouvant sous protection du HCR qui les prend en charge ».
Les putschistes dont il s’agit avaient tenté de renverser le pouvoir de feu président Pierre Nkurunziza en mai 2015. Son dernier mandat controversé a récemment été jugé « illégal par la cour de justice de l’EAC ». (Fin)