Le monde affiche son indifférence face à plus de mille fugitifs génocidaires recherchés et toujours en liberté

Transfert d’au suspect au TPIR

A 31ème Commémoration du Génocide des Tutsi au Rwanda ce 07 Avril, le monde affiche son indifférence face à plus de mille fugitifs génocidaires recherchés et toujours en liberté dans différents pays du monde. Malgré la gravité des crimes commis, une grande partie du monde reste indifférente, la justice étant lente, voire inexistante.

Depuis le génocide, selon la Section des fugitifs du génocide du Procureur général, le Rwanda a soumis 1 149 dossiers à des juridictions étrangères, sollicitant la coopération des autorités pour retrouver, arrêter et extrader les personnes ayant joué un rôle dans l’une des atrocités les plus horribles du XXe siècle. Pourtant, seulement 62 affaires ont été résolues : 31 fugitifs ont été poursuivis à l’étranger ; et 31 ont été renvoyés au Rwanda par extradition, expulsion ou transfert.

Cela signifie que 1 087 fugitifs – des individus accusés d’avoir organisé, dirigé ou participé au massacre de plus d’un million de personnes – continuent de vivre librement, souvent sous de nouvelles identités dans des pays qui ont soit retardé l’action, soit fermé les yeux.

Le rôle des notices rouges

Un mécanisme clé utilisé par le Rwanda pour poursuivre les fugitifs est la notice rouge d’INTERPOL – une demande de localisation et d’arrestation provisoire d’un suspect en attente d’extradition. Bien qu’il ne s’agisse pas d’un mandat d’arrêt international, il s’agit d’un outil essentiel pour la justice transfrontalière.

La première notice rouge du Rwanda a été émise en 2006, suivie d’une demande en 2008 visant Léopold Munyakazi, un ancien syndicaliste installé aux États-Unis. Il a été expulsé en 2016 après des années de manœuvres juridiques. En 2014, INTERPOL avait émis 23 notices rouges liées au génocide, à la demande du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR). Ces notices ont permis de traquer des suspects sur tous les continents, mais elles ne sont efficaces que si les pays coopèrent. Trop souvent, ce n’est pas le cas.

Justice, mais justice, mais seulement

Malgré les difficultés, le Rwanda a progressé grâce à la volonté d’agir de ses partenaires internationaux 

Félicien Kabuga, autrefois le suspect de génocide le plus recherché, a été arrêté à Paris en 2020. Il est accusé d’avoir financé le régime génocidaire, notamment par l’achat d’armes utilisées dans des massacres.

Fulgence Kayishema, arrêté en Afrique du Sud en 2023, est toujours détenu au centre de détention des Nations Unies à La Haye. Cependant, il a été déclaré inapte à être jugé en raison d’une démence sévère, ce qui a suspendu la procédure pour une durée indéterminée. Jean Uwinkindi, pasteur accusé de génocide, a été arrêté en Ouganda et transféré au TPIR.

Beatrice Munyenyezi, expulsée des États-Unis en 2021, est jugée pour des crimes allant du meurtre à la complicité de viol commis à un barrage routier à Butare (aujourd’hui Huye).

Ahmed Napoléon Mbonyunkiza, condamné par contumace en 2007, a été remis aux autorités rwandaises par les services d’immigration américains en Mars 2025.

Emmanuel Mbarushimana et Wenceslas Twagirayezu, extradés du Danemark, ont été jugés au Rwanda ; Twagirayezu a été acquitté en 2024.

Ces exemples montrent que la justice est possible, mais rare.

Deux fantômes toujours recherchés

Le TPIR, désormais appelé Mécanisme international doté d’une mission d’exercer les fonctions résiduelles des tribunaux pénaux (IRMCT), a inculpé 93 personnes. Seuls deux fugitifs sont toujours portés disparus : Il s’agit de Charles Sikubwabo et de Charles Ryandikayo

Tous deux sont originaires de l’ancienne préfecture de Kibuye (aujourd’hui district de Karongi). Leurs photos n’ont pas été rendues publiques, mais une prime de 5 millions de dollars est offerte pour toute information permettant leur capture.

Un échec Mondial

Le fait que plus de mille fugitifs soient toujours en liberté, malgré des preuves évidentes et des inculpations formelles, n’est pas seulement imputable au Rwanda. Cela reflète l’échec plus large de la communauté internationale à traiter le génocide comme un crime exigeant une responsabilité mondiale, et non une coopération sélective.

Le Rwanda continue de poursuivre ces affaires avec détermination, honorant la mémoire des personnes disparues et la douleur des survivants qui attendent toujours leur tourment. Cependant, la justice ne peut être unilatérale. Tant que les pays abritent ou retardent les poursuites contre les suspects de génocide, le message reste terriblement clair : le monde se souvient, mais il ne s’en soucie pas toujours. (Fin)

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