Le procureur en chef du Mécanisme pour les tribunaux pénaux internationaux-le «Mécanisme» son nom raccourci –, Serge Brammertz, a accusé le gouvernement sud-africain de refuser d’appréhender le fugitif du génocide Fulgence Kayishema qui vivrait depuis des années dans ce pays d’Afrique australe.
Serge Brammertz s’adressait au Conseil de sécurité des Nations Unies le lundi 14 décembre au sujet du travail judiciaire des tribunaux et de ses progrès face aux défis de la Covid-19.
Brammertz a déclaré au conseil que Kayishema était situé en Afrique du Sud, mais qu’il est toujours en liberté en raison de l’incapacité de ce pays à fournir une coopération efficace au cours des deux dernières années et demie.
Il a déclaré que l’Afrique du Sud a refusé d’arrêter Kayishema au motif qu’il a le statut de réfugié, ajoutant qu’il avait été ultérieurement vérifié que le suspect n’avait pas de dossier de réfugié.
«Pourquoi les autorités sud-africaines n’ont-elles pas pris des mesures évidentes après avoir été informées qu’un fugitif recherché au niveau international inculpé de génocide était présent dans leur pays? Il reste le plus important et l’Afrique du Sud devrait habiliter ses services opérationnels à travailler directement avec le Bureau du Procureur au jour le jour », a-t-il déclaré.
Il a rappelé que sa cour était toujours déterminée à poursuivre les fugitifs restants et à achever les activités de suivi, mais que cela ne serait possible qu’avec la coopération des États membres du Conseil de sécurité.
«Nous ne devons rien de moins aux victimes et aux survivants du génocide de 1994. Nous garantissons une coopération totale avec le procureur général du Rwanda alors qu’il cherche à poursuivre des centaines de fugitifs supplémentaires qui sont toujours en liberté », a-t-il déclaré.
En 2012, le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), qui a été remplacé par le «Mécanisme», a remis le dossier de Kayishema au bureau du procureur général rwandais. Le tribunal a décidé qu’une fois arrêté, Kayishema devait être renvoyé au Rwanda pour y être jugé.
Le suspect est l’ancien chef de la police judiciaire de la préfecture de Kibuye. Selon l’acte d’accusation du TPIR, Kayishema est accusé de quatre chefs de génocide, d’extermination en tant que crime contre l’humanité, de complot de génocide et de complot en vue de commettre un génocide.
Depuis janvier 2016, toutes les fonctions résiduelles du TPIR sont assurées par une structure de taille beaucoup plus modeste, le «Mécanisme», créée par l’ONU en décembre 2010.
Le « Mécanisme » a reçu pour mission principale d’achever le mandat judiciaire du TPIR : rechercher les huit accusés en fuite et juger trois d’entre eux, considérés comme des « poids lourds ». Il s’agit de l’homme d’affaires Félicien Kabuga arrêté en France et souvent présenté comme l’argentier du génocide des Tutsis de 1994, de l’ex-ministre de la Défense, Augustin Bizimana, dont la mort a été confirmé par le « Mécanisme », et le major Protais Mpiranya qui commandait la garde du président Juvénal Habyarimana qui est toujours en cavale.
S’ils sont arrêtés, ces trois « gros poissons » doivent être jugés par le «Mécanisme », alors que les dossiers des cinq autres accusés en fuite dont celui de Fulgence Kayishema ont été confiés à la justice rwandaise. (Fin)