
Des experts internationaux s’adressent au personnel du Centre hospitalo-universitaire de Kigali (CHUK) pour mieux comprendre les ressources humaines nécessaires à la lutte contre le cancer au Rwanda. (Photo : L. Haskins/AIEA)
Selon une récente évaluation internationale, le Rwanda a pris des mesures décisives pour lutter contre les cancers évitables à l’échelle nationale. Il s’agit notamment de mesures visant à améliorer les services de cancérologie, à élaborer des documents administratifs clés et à former des spécialistes de l’oncologie. Il reste néanmoins des obstacles à lever pour améliorer l’accès à une prise en charge complète en cancérologie dans tout le pays.
L’examen imPACT, mené et achevé courant janvier par l’AIEA, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), a évalué les capacités du système de santé et les besoins en matière de traitement et de lutte contre le cancer au Rwanda.
« Cet examen arrive à point nommé, puisque le Rwanda commence à mettre en œuvre son nouveau programme national de lutte contre le cancer pour 2025-2029 ainsi que sa stratégie accélérée d’élimination du cancer du col de l’utérus », a déclaré Claude Mambo Muvunyi, directeur général du Centre biomédical rwandais auprès du Ministère de la santé. « Le Rwanda ne cesse d’améliorer les services de prévention et de traitement du cancer pour le bien de sa population ».
Avec 7 000 nouveaux cas diagnostiqués et plus de 4 800 décès par an dans le pays, selon les données du CIRC pour 2022, le cancer est un problème de santé qui continue de s’aggraver, en partie à cause d’agents infectieux comme le virus du papillome humain (VPH). Le cancer du col de l’utérus est le cancer le plus fréquent chez les femmes, suivi par les cancers du sein et de l’estomac. Chez les hommes, c’est celui de la prostate, suivi des cancers de l’estomac et du foie.
La mission dans le pays
Durant la mission qui s’est déroulée dans le pays du 20 au 24 janvier, des administrateurs techniques de l’AIEA, de l’OMS et du CIRC et huit experts internationaux d’Afrique et du continent américain ont rencontré des représentants des autorités nationales, de la société civile, des groupes de survivants et d’autres parties prenantes afin de mieux comprendre la situation de la lutte contre le cancer dans le pays.
Ils se sont également rendus dans les principaux établissements de santé et de formation, notamment l’hôpital militaire de référence et centre hospitalo‑universitaire du Rwanda, qui héberge le Centre anticancer rwandais, et le centre hospitalo-universitaire de Kigali (CHUK), ainsi que des centres locaux de soins de santé dans tout le pays.
Ils ont félicité le Rwanda pour sa détermination à renforcer la lutte contre le cancer et pour les progrès notables qu’il avait accomplis depuis un précédent examen imPACT effectué en 2014. Le Rwanda met actuellement à jour son programme national de lutte contre le cancer (PNLC), qui doit être mis en œuvre durant la période 2025-2029, et les recommandations issues de la récente évaluation internationale contribueront à nourrir ses activités.
« Le PNLC, en tant qu’outil stratégique, est essentiel pour que la priorité soit donnée à la maladie dans le contexte sanitaire national, ainsi que pour guider les mesures qui traitent les problèmes urgents liés au cancer et les questions de répartition des ressources », a déclaré Laura Haskins, administratrice de projet dans le cadre du Programme d’action en faveur de la cancérothérapie de l’AIEA qui dirigeait l’équipe d’examen imPACT.
Des efforts en matière de prévention du cancer salués
L’équipe imPACT a également salué l’action menée par le Rwanda en matière de prévention du cancer, qui comprend des programmes visant à soutenir l’activité physique, à renforcer la lutte contre le tabac et à promouvoir la vaccination contre le VPH, responsable de plus de 95 % des cancers du col de l’utérus chez la femme. Le Rwanda a été le premier pays d’Afrique à adopter le vaccin contre le VPH et, selon les données du programme national de vaccination, en 2023, le taux de couverture pour la première dose était de 90 % chez les adolescentes de 15 ans. Cette année, il prévoit de redoubler d’efforts pour éliminer le cancer du col de l’utérus en lançant une campagne nationale de vaccination et de dépistage.
Malgré ces progrès, l’équipe internationale a constaté que la lutte contre le cancer au Rwanda continuait de se heurter à des obstacles, notamment la répartition inégale des soins de santé spécialisés dans le pays et une certaine dépendance vis‑à-vis des financements extérieurs des initiatives nationales en faveur de la santé.
L’équipe a formulé des recommandations pour contribuer à résoudre ces problèmes, en exhortant le Rwanda à accroître les investissements publics/privés internes dans le domaine de la santé et en soulignant l’importance d’intégrer la lutte contre le cancer dans d’autres programmes de santé afin d’améliorer l’accès aux services et aux centres compétents.
« Le bureau de pays de l’OMS s’est engagé à aider le Rwanda à améliorer les systèmes de lutte contre le cancer, en particulier pour en assurer l’intégration dans les programmes et structures existants », a déclaré le représentant de l’OMS, Brian Chirombo.
Développement de la radiothérapie en projet
Entre 50 et 70 % des patients atteints de cancer doivent recourir à la radiothérapie, et plus de la moitié d’entre eux vivent dans des pays à revenu faible et intermédiaire. En Afrique, plus de 70 % de la population n’a pas accès à la radiothérapie, et pour cause : une vingtaine de pays africains ne dispose d’aucune machine de radiothérapie. Dans un établissement de santé à Kigali pourvu de deux accélérateurs linéaires, le Rwanda fournit certains services de radiothérapie, mais les temps d’indisponibilité des appareils dus à la pénurie de personnel d’entretien restent un obstacle à un accès rapide aux traitements. L’équipe imPACT a recommandé d’étendre les services de médecine radiologique – y compris la curiethérapie – au‑delà de la capitale, conformément aux plans du Ministère. Elle a également recommandé d’investir dans la formation afin de faciliter l’entretien des appareils dans le pays. Les capacités en médecine nucléaire se développent, et l’équipe imPACT a suggéré de former d’autres spécialistes à diverses modalités d’imagerie, entre autres choses.
Dans le cadre de ses programmes de coopération technique et de santé humaine, l’AIEA aide notamment le Rwanda à augmenter ses capacités en ressources humaines et en assurance de la qualité aux fins de la lutte contre le cancer. « Après l’examen imPACT de 2014, l’Agence a également adressé des avis spécialisés au gouvernement sur la conception et l’implantation de services de radiothérapie », a ajouté Tomoaki Tamaki, chef de la Section de la radiobiologie appliquée et de la radiothérapie à la Division de la santé humaine de l’AIEA. Ce soutien s’est notamment traduit par l’élaboration d’un plan chiffré qui a débouché sur la création du premier centre de radiothérapie du pays, inauguré en 2019.
L’initiative Rayons d’espoir de l’AIEA a été lancée en 2022 à Addis-Abeba en marge du Sommet de l’Union africaine, avec l’appui des chefs d’État africains et de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS). L’initiative vise à élargir l’accès aux soins contre le cancer dans les pays à revenu faible et intermédiaire en améliorant la disponibilité des services de radiothérapie, d’imagerie médicale et de médecine nucléaire. (End)