De g. à D.: Mohamed Kacimi, Roland Rugero, et la facilitatice Carole Karemera.
Au 2ème jour des Rencontres du Livre Francophone qui se tiennent à Kigali, les écrivains ont abordé le rôle politique et social de l’écrivain qui demeure important dans la mesure où il oriente la société sur de nouveaux horizons.
Le journaliste et écrivain burundais Roland Rugero estime que la littérature doit créer un remous dans la société. Il note que l’écriture est un exercice récent dans une société burundaise baignant dans l’oralité et caractérisée par des mémoires blessées suite aux événements de 1972 et 1993.
« Avant l’école occidentale, le Burundi avant des formes de savoir-faire, de savoir-vivre, et des références philosophiques. L’école traditionnelle façonnait un citoyen burundais avec une identité. Ceci doit servir de référence pour reconstruire une société humanisée après les troubles de 1972 et 1993. En témoigne un recueil qui montre la réconciliation intercommunautaire où les femmes sont pionnières pour dépasser les clivages ethniques. Ce sont de petits pas au quotidien de la société burundaise pour ressouder ses membres », informe Rugero.
Pour Mohamed Kacimi, tout artiste est engagé sur la galère de son temps, comme le répétait Albert Camus qui disait qu’on est mêlé à la tourmente de son temps et de sa société. Mais l’impact de l’écrivain pour transformer la société reste dérisoire si on le compare à celui des églises, des mosquées et des banques. Et puis à voir les tirages qu’on fait avec un bon livre, cela ne suffit pas pour faire vivre l’écrivain. Mais l’homme des lettres doit rester à l’avant-garde comme éclaireur et visionnaire.
La littérature change l’état d’âme du lecteur. L’indignation demeure vaste devant les maux de la société dans divers pays. L’idéologie du génocide, l’extrémisme et la violation massive des droits de la personne et autres multiples atteintes à l’intégrité des citoyens doivent être dénoncés toujours, selon Kacimi.
Rugero cite qu’en collaboration avec l’UNICEF, le magazine « Ijambo » a été créé et il est distribué dans les écoles du Burundi afin de créer la soif de la lecture dès le bas âge. Pour lui, cette rencontre de Kigali a été utile, car il a rencontré des éditeurs de livres qui permettront à son pays de diffuser plus d’ouvrages.
De g.à d.: Natacha Muziramakenga, et Fanta Dramé
« C’est bon aussi que pour le moment, le Rwanda et le Burundi ont ouvert leurs frontières et les populations des deux pays se retrouvent, se rendent des visites. Une ouverture qui sera bénéfique pour chacun », note-t-il.
Il reconnaît que l’écrivain doit être prudent et lucide par rapport à toutes les choses que nous traversons.
Un participant rappelle l’association « Tsimbure » des écrivains du Burundi, RDC et Rwanda qui devrait être active pour dénoncer le mal de la région tout en dessinant de nouveaux horizons axés sur des relations de collaboration pour assoir la paix et la croissance dans les Grands Lacs.
En début d’après-midi, deux écrivaines talentueuses Ntacha Muziramakenga du Rwanda et Fanta Dramé de France ont abordé le thème de la violence et du dépaysement qu’ils ont vécus chacune dans son pays. Leur écriture limpide. Fiction et réalité se mêlent.
Fanta est née à Paris en 1987. C’est là qu’elle a grandi. Après un Master des lettres modernes à la Sorbonne-Nouvelle, elle enseigne les lettres à Pantin. Elle a publié Ajar-Paris qui est un contraste entre le village des origines de se parents sénégalais et la modernité occidentale de Paris où elle vit.
Natacha Muziramakenga, elle, est une artiste multidisciplinaire. Elle travaille depuis 15 ans comme poète, performeuse, comédienne et réalisatrice. Elle a contribué à la fois en tant qu’auteure et interprète de la pièce « Learning Feminism from Rwanda » qui a tourné en Allemagne et en Suisse avec la compagne Flinn Works entre 2020 et 2021. Les œuvres de Natacha ont été publiées dans le magazine Wasafari le 18 novembre 2020 et en 2019 dans un ouvrage collectif « Au-dessous des Volcans ». (Fin)