LES MANŒUVRES DE RÉCUPÉRATION DU STATUT DE RESCAPÉS DU GÉNOCIDE PERPÉTRÉ CONTRE LES TUTSI A DES FINS NÉGATIONNISTES

By Dr Bizimana Jean Damascène*

INTRODUCTION

A l’heure de la commémoration du Génocide, et pendant que le monde entier met tout en œuvre pour rechercher et amener devant la justice ceux qui ont planifié et mis en œuvre le Génocide perpétré contre les Tutsi, parmi lesquels Kabuga Félicien, en cavale depuis 26 ans, qui a finalement été arrêté le 16 mai 2020 en France, des groupuscules de négationnistes du Génocide perpétré contre les Tutsi continuent à propager leurs mensonges sur les réseaux sociaux.

Une des actions qui nient et minimisent le Génocide perpétré contre les Tutsi, a été propagée sur les réseaux sociaux dès le 3 mai 2020, sous l’appellation de « Ribara uwariraye » ; la Voix de l’Amérique (VOA) a donné la parole à ces négationnistes en diffusant les propos de leur porte-parole, Gatebuke Claude, qui a déclaré qu’ils commémorent la mémoire des Rwandais qui ont été tués pendant la période 1990 – 2000. Gatebuke a parlé au nom des organisations African Great Lakes Action Networks (AGLAN, en sigle) qui a son siège aux Etats Unis d’Amérique et qui est dirigée par Gatebuke lui-même, Global Campain for Rwandans Rights (Claire, en sigle) qui a son siège en Grande Bretagne, et enfin les organisations Campagne Amahoro Iwacu et Fondation Kizito Mihigo for Peace pour lesquelles les lieux où elles ont leurs sièges sociaux n’ont pas été mentionnés.

Les auteurs de ce texte n’ont révélé rien de neuf si ce n’est de reprendre la théorie selon laquelle il y aurait eu deux (2) génocides au Rwanda, propre aux négationnistes du Génocide perpétré contre les Tutsi, seul Génocide qui a été commis sous les yeux du monde entier et qui a été formellement reconnu par la communauté internationale.

1.   LE MENSONGE DE GATEBUKE CLAUDE SELON LEQUEL IL SERAIT UN RESCAPÉ DU GÉNOCIDE PERPÉTRÉ CONTRE LES TUTSI, DANS LE BUT DE SEMER LA CONFUSION DANS LES ESPRITS, POUR SERVIR SES OBJECTIFS.

Dans son entretien avec la VOA, conformément à ce qu’il répète à l’envi sur les réseaux sociaux, Gatebuke Claude affirme être un rescapé du Génocide perpétré contre les Tutsi, mais qu’il milite également pour la reconnaissance d’un génocide qui aurait été commis contre les Hutu et dont la mémoire devrait par conséquent être commémorée quand bien même la communauté internationale ne l’ait jamais reconnu. Il propage ses mensonges sous le couvert de son faux statut de rescapé du Génocide perpétré contre les Tutsi qu’il fabrique à tort.

Gatebuke s’est exprimé en ces termes : « Au Rwanda les rescapés sont discriminés : il y a les rescapés du Génocide perpétré contre les Tutsi dont je fais personnellement partie. Nous reconnaissons ce Génocide perpétré contre les Tutsi, et cela doit toujours rester dans les esprits ; il y a aussi un autre génocide qui a été commis contre les Hutu et qui doit être mentionné, il y a eu des massacres de Hutu au Congo, des massacres de Hutu avant le Génocide de 1994, des massacres commis contre eux à Byumba et à Kibeho (…) c’est une réalité, les Tutsi ont été tués pour appartenir à leur ethnie, tout comme les Hutu ont été tués pour appartenir à leur ethnie. Il y en a qui ont été victimes de la guerre. Ceux qui disent que nous sommes des négationnistes veulent nous faire taire. Le Rwanda oblige les gens à se réconcilier quand pour nous se réconcilier doit être volontaire. Le Gouvernement rwandais devrait instaurer la commémoration de la mémoire de tous pour que tous les Rwandais se sentent concernés, chacun se remémorant les siens, c’est ce qui mènera vers la véritable réconciliation. »

QUELLE EST LA VERITÉ SUR LE CAS GATEBUKE?      

Gatebuke Claude n’est pas Tutsi, sa famille n’a pas été victime du Génocide perpétré contre les Tutsi et il ne peut donc pas en être un rescapé. Gatebuke Claude est le fils de Gatebuke Justin qui est originaire de l’ancienne Cellule Mugara, Secteur Gishwati, Commune Kayove en Préfecture Gisenyi. Gatebuke Justin est lui-même fils de Rwamwaga alias Kinyuka, et avait deux épouses, Nyambuga Agnes et Ntabugi qui est la mère de Gatebuke Claude.

Gatebuka Justin, le père de Gatebuke Claude est né en 1956, a fait son école primaire dans sa région d’origine de Kayove, à Vumbi, et a poursuivi ses études secondaires à Rubengera et supérieures à l’Université Nationale du Rwanda. Gatebuke Justin a parmi ses frères et soeurs, Enias Ukwitegetse qui était boucher au marché de Nkora, Théophile Burindi qui a longtemps été secrétaire à la Commune Kayove, et sa sœur Nyiramakuba. Ceux-ci n’ont jamais été Tutsi.

Gatebuke Justin a étudié à l’Université Nationale du Rwanda  à Ruhengeri, où il s’est inscrit sous le numéro 81/145 à l’Ecole supérieure des techniques médicales (ESTM), dont le siège était à Butare.  Dans le rapport de l’année académique 1982-1983, rédigé le 7 février 1983 par Ntakirutinka Charles qui était Secrétaire General de l’Université, est repris la liste des étudiants de l’ESTM dans laquelle était mentionné que Gatebuke Justin était en troisième année (Bac. III), qu’il était né en 1956 dans la Commune Kayove, et qu’il était Hutu.

Après ses études universitaires, Gatebuke Justin a travaillé à l’ONAPO, dont il a été le représentant dans les Préfectures de Gitarama et Byumba, et est allé poursuivre ses études aux Etats Unis d’Amérique. Dans tous les postes qu’il a occupés, il n’a jamais été Tutsi, et son fils se prétend l’être dans le seul but de pouvoir nier le Génocide perpétré contre les Tutsi.

Etant donné toutes les informations reprises ci-dessus, comment Gatebuke Claude peut-il prétendre être un rescapé du Génocide perpétré contre les Tutsi ? Ce sont des mensonges sous le couvert desquels il a l’intention de nier et minimiser le Génocide perpétré contre les Tutsi.

2.   IL N’Y A JAMAIS EU DE GÉNOCIDE COMMIS CONTRE LES HUTU DANS L’HISTOIRE DU RWANDA

Le crime de génocide est défini de façon précise par la loi. Tout génocide est planifié. Il est caractérisé par l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux Le FPR Inkotanyi n’a jamais eu l’intention de commettre un génocide. Gatebuke et son groupe n’ont pas le droit d’inventer un génocide qui aurait été perpétré contre les Hutu et d’en rendre responsable celui qu’ils haïssent pour protéger leurs petits intérêts, à cause de la haine qu’ils lui vouent et de la zizanie et de l’idéologie du génocide que leur ont  léguées leurs parents et dont ils ne veulent pas se séparer.  S’il y a eu un génocide perpétré contre les Hutu, où et par qui a-t-il été planifié, qui l’a arrêté ?

Le FPR menait une guerre de libération contre l’armée du Gouvernement Habyarimana. Le FPR a respecté toutes les lois qui régissent la guerre et qui sont définies dans les conventions de Genève du 4 août 1949 et du 7 juin 1977, dont notamment l’obligation d’évacuer la population civile des zones de combat, de les protéger, de soigner les blessés, et de s’occuper en particulier des femmes et des enfants. Les militaires du FPR qui ont désobéi aux instructions de leur commandement et commis des crimes, ont été sévèrement punis. Certains d’entre eux ont été jugés, condamnés à mort par les juridictions militaires et exécutés. Le commandement militaire du FPR a veillé depuis le début de la guerre à ce que ses troupes sachent que la vengeance n’était pas permise. Gatebuke et son groupe propagent leurs mensonges comme quoi des massacres de Hutu auraient été planifiés par l’Etat à Kibeho. 

Les auteurs de ces mensonges se gardent d’expliquer que le camp de Kibeho était rempli de militaires ex-FAR et d’Interahamwe/Impuzamugambi du MRND et de la CDR qui en avaient fait une zone de combat à partir de laquelle étaient menés des actes de violence contre la population et des opérations militaires contre les troupes du FPR, désormais gouvernementales, qui venaient d’arrêter le Génocide.

3.   LA VÉRITÉ A ÉTÉ RÉVELEE DANS LE RAPPORT DES EXPERTS INTERNATIONAUX SUR LA PRÉSENCE D’INTERAHAMWE DANS LE CAMP DE KIBEHO EN 1995.

Dans leurs mensonges, Gatebuke Claude et son groupe se gardent de parler de ce qui a été révélé dans le rapport du 18 mai 1995 d’un groupe d’experts internationaux sur la planification par les ex-FAR de crimes contre les civils dans le camp de Kibeho. Ce rapport a affirmé que le camp était le refuge de militaires ex-FAR et de miliciens Interahamwe et Impuzamugambi qui l’avaient transformé en une zone de combats, où ils s’entrainaient militairement et à partir duquel ils menaient des opérations militaires contre les troupes gouvernementales dans le but de réactiver la guerre pour reprendre le pouvoir et achever le Génocide une fois pour toutes.

Le groupe d’experts internationaux qui a publié ce rapport était composé des 10 personnes, de différentes nationalités, ci-après :

Mr Marc Foucault, procureur, France

Mr Bernard Dussault, diplomate, Canada

Mr Koen de Feyter, professeur de droit international, Belgique

Mr Karl Flittner, diplomate, Allemagne

Mr Ataul Karim, diplomate, Organisation des Nations Unies

Dr Ashraf Khan, specialiste en pathologie médico-légale, Grande Bretagne

Mr Maurice Nyberg, juriste, USA

Colonel-major Abdelaziz Skik, expert militaire, Organisation de l’Union Africaine

Mr Ernst Wesselius, procureur, Pays Bas

Ms Christine Umutoni, juriste, Rwanda.             

En ce qui concerne le Congo, rappelons que les troupes du Gouvernement d’Union Nationale ont libéré une population de plus de deux millions de Rwandais qui avaient été pris en otage par le Gouvernement génocidaire et ses troupes dans les camps au Congo. Cette population, dont la plupart était en mauvais état, a pu rentrer chez elle grâce à l’armée du Gouvernement rwandais, et a été soignée, protégée et reçu le nécessaire pour réintégrer ses biens. Pour Gatebuke et son groupe, tous ces soins constitueraient ils un génocide ?

4.    « RIBARA UWARIRAYE » DE GATEBUKE CLAUDE EST UN NOUVEL OUTIL AU SERVICE DES NÉGATIONNISTES DU GÉNOCIDE PERPÉTRÉ CONTRE LES TUTSI

Ceux qui sont à la tête de ces négationnistes disent qu’ils sont membres de cinq (5) organisations non gouvernementales qui fonctionnent toutes à l’étranger, et la plupart d’entre eux ont des parents qui ont porté une responsabilité directe ou indirecte dans la planification et la mise en œuvre du Génocide et dans la propagation de l’idéologie génocidaire, et parmi lesquels il y en a qui ont été condamnés pour crime de génocide par les juridictions du Rwanda ou par la justice internationale. D’autres comme Shingiro Mbonyumutwa, Ndagijimana Jean Marie Vianney, se cachent à l’étranger pour éviter d’être poursuivis en justice pour le crime de génocide ou pour le détournement de fonds de l’Etat comme c’est de notoriété publique le cas pour Ndagijimana Jean Marie Vianney.

Nous rappelons en effet que Ndagijimana Jean Marie Vianney a fui le pays fin 1994 alors qu’il était Ministre des Affaires Etrangères du Gouvernement d’Union Nationale. Ndagijimana a été envoyé en mission de travail avec le Président Pasteur Bizimungu aux Etats Unis d’Amérique, mais a préféré s’éclipser en détournant la somme qu’il avait en sa possession de plus de deux cent mille dollars américains qui étaient destinés à l’Ambassade du Rwanda à New York. Et maintenant c’est cet individu qui passe son temps à propager le mensonge, notamment au sein de la jeunesse, comme quoi il y a eu deux génocides. 

Il est évident que les quelques rescapés du Génocide perpétré contre les Tutsi qui soutiennent Gatebuke et son groupe, le font par solidarité avec des membres de leurs familles qui ont commis divers crimes au Rwanda et dont certains se sont enfuis à l’étranger lorsqu’ils ont été poursuivis. Lorsqu’ils arrivent à l’étranger, le seul atout qui leur reste est de s’allier avec les négationnistes du Génocide perpétré contre les Tutsi. La jeunesse devrait se distancier d’un tel comportement des plus répréhensibles.

5.   LA JEUNESSE QUI A PRÉPARÉ RIBARA UWARIRAYE A ÉTÉE MANIPULÉE PAR LEURS AÎNÉS QUI SONT DES NÉGATIONNISTES DU GÉNOCIDE PERPÉTRÉ CONTRE LES TUTSI

Comme l’affirme Pierre Vidal-Naquet, dans ses écrits sur le Génocide perpétré contre les Juifs, il y aura toujours des négationnistes qui feront tout leur possible pour blesser les rescapés. Ce n’est pas la première fois que les négationnistes du Génocide perpétré contre les Tutsi utilisent l’expression “ Commémorer la mémoire de tous”. Il s’agit de concepts dépassés qui émaillent les discours de personnes qui ont travaillé dans la première et la deuxième Républiques, parmi lesquels Ndagijimana Jean Marie Vianney et Ruhigira Enock, qui ont grandi imprégnés de l’idéologie du PARME HUTU, ou les jeune gens de l’association Jambo asbl qui disent militer en faveur de Hutu dont la mémoire n’est jamais commémorée.

Depuis que le Génocide a été perpétré contre les Tutsi en 1994, et après que les troupes du FPR Inkotanyi l’ont arrêté, ceux qui ont commis le crime de génocide et leurs amis ont commencé à réunir des théories pour le nier et le minimiser.

Nous trouvons ces théories surtout dans les écrits de Filip Reyntjens, Pierre Pean, Robin Philpot, Bernard Lugan, Serge Desouter, Madeleine Raffin, Luc De Temmermann, Peter Erlinder, Peter Verlinden, Judi Rever, Charles Onana, et d’autres. Ils sont les théoriciens du négationnisme qui mettent en musique les lignes générales des théories utilisées pour nier le Génocide perpétré contre les Tutsi. Leurs « laboratoires » concoctent le matériel utilisé par certaines associations de jeunes gens qui nient et minimisent le Génocide perpétré contre les Tutsi. Parce que ces vieilles personnes comme Reyntjens qui ont longtemps propagé le négationnisme du Génocide perpétré contre les Tutsi, ont été découverts et ont perdu toute crédibilité, ils ont désormais choisi de manipuler la jeunesse pour tromper le monde. D’où la naissance de Jambo ASBL en Belgique et d’autres organisations comme celle de Gatebuke et ses compagnons.

6.   “RIBARA UWARITAYE », DANS LA DROITE LIGNE DE L’INTENTION DE CEUX QUI ONT PLANIFIÉ ET MIS EN ŒUVRE LE GÉNOCIDE PERPÉTRÉ CONTRE LES TUTSI.

Adolphe HITLER qui dirigeait le Gouvernement Nazi qui  a exterminé les juifs, est allé jusqu’à se suicider sans avoir une seule fois accepté de dire que les juifs ont été tués pour leur seule appartenance à la race juive. Et le Colonel Bagosora a lui-même déclaré qu’il n’y a pas eu de Génocide perpétré contre les Tutsi. Lorsque Gatebuke dit que lui et ses compagnons commémorent la mémoire de tous, c’est dans le droit chemin de l’intention de Bagosora et des autres génocidaires.

C’est faire fi de ce qu’entre 1990 et 2000 et même après, comme ils l’avouent eux-mêmes, que les tueurs qui étaient du côté du Gouvernement qui a planifié et mis en œuvre le Génocide perpétré contre les Tutsi, leurs forces armées et la jeunesse Interahamwe ont continué à commettre leurs crimes au Rwanda et à l’étranger au sein des groupes génocidaires, les FDLR, FDU-Inkingi, RUD-URUNANA et d’autres groupes similaires et leurs ramifications. Ce sont ces criminels qui ont pris en otage et entraîné par la force au Congo une population qui n’avait rien à voir avec le Génocide. Il est donc évident que les membres du FDLR et tous ceux avec qui ils partagent la même idéologie génocidaire, ne participeront jamais à la commémoration du Génocide perpétré contre les Tutsi.

7.   LA MÉMOIRE DU GÉNOCIDE PERPÉTRÉ CONTRE LES TUTSI SERA TOUJOURS COMMÉMORÉE

La commémoration du Génocide perpétré contre les Tutsi a été consacré dans la Constitution rwandaise votée par les Rwandais en 2003, et modifiée de par leur volonté en 2005, là où elle déclare : « Nous commémorons le Génocide perpétré contre les Tutsi qui a emporté plus d’un million d’enfants du Rwanda, tout en nous remémorant les tristes évènements qui ont marqué l’histoire de notre pays. »

 Commémorer est un acte posé par les Rwandais qui savent d’où ils viennent et où ils vont. Tous les Rwandais commémorent le Génocide perpétré contre les Tutsi parce c’est lui qui a réellement eu lieu.

Les rescapés livrent leurs témoignages tout comme ceux qui ont eu le courage de sauver des vies livrent leur témoignage de solidarité, ceux qui ont avoué leurs crimes sollicitent le pardon de leurs victimes et le reçoivent, preuve que les Rwandais peuvent cohabiter dans l’unité nationale. Tel est réellement le Rwanda.

CONCLUSION

Le Génocide perpétré contre les Tutsi sera commémoré encore et toujours. Gatebuke et ses compagnons qui le nient et le minimisent ne pourront empêcher la commémoration de ce qui fait désormais partie de l’histoire du Rwanda. Si Gatebuke croit que les réseaux sociaux qu’il utilise lui permettront de gagner de nombreux adeptes, il se trompe et devrait plutôt venir au Rwanda sa patrie se joindre à ses compatriotes parce que c’est se tromper de continuer à propager des mensonges sur le Rwanda. (Fin).

* Dr Bizimana Jean Damascène, Secrétaire Exécutif Commission Nationale de Lutte contre le Génocide (CNLG)