Dr Valentin Stanislas Edgar Traoré
Dr Valentin Stanislas Edgar Traoré est un Expert scientifique détenteur d’un PhD originaire du Burkina Faso. Il a fait partie des scientifiques africains réunis durant une semaine jusqu’au 30 Août 2024 à Kigali. Ils ont abordé la manière de donner une face africaine à la recherche sur les biotechnologies et les Organismes Génétiquement Modifiés (OGM). Il affirme que les OGM sont un outil pour la sécurité alimentaire et nutritionnelle en Afrique. Lire son interview à André Gakwaya de l’Agence Rwandaise d’Information (ARI-RNA) :
Je vais faire un résumé de ce que les Experts scientifiques ont dit sur les OGM et la biotechnologie. C’est neuf pays qui se croisent ici. Ces chercheurs qui sont venus sont qualifiés pour travailler dans n’importe quel labo dans le monde. Que ce soit en Europe ou aux Etats-Unis. Le chercheur africain ne baisse la … devant le chercheur européen ou américain parce que nous allons à la même école, nous utilisons les mêmes sciences. Et nous avons besoin de ces sciences pour nourrir nos populations.
Par rapport au financement de la recherche : L’Afrique n’hésite pas à dépenser des milliards dans le domaine des technologies tels que le IPhone, les véhicules de marques. Nous n’avons pas la technologie de l’aviation, mais nous volons, mais nous volons de Ouaga à Kigali en faisant escale d’une heure à Addis-Abeba sans aucune peur au ventre parce que nous avons une technologie qui nous transporte à 8000 Km, à 12 Km au-dessus des nuages, et nous atterrissons sans jamais voir le pilote qui nous prend.
Les technologies agricoles sont généralement mal comprises parce que quand les gens attendent la biotechnologie, on voit derrière les OGM. La biotechnologie, c’est au-delà des OGM. Les OGM ce n’est que l’un des produits des biotechnologies agricoles. Ici nous avons besoin des OGM, ce n’est pas parce que nous n’avons pas le cerveau nécessaire pour les développer. Nous avons les hommes qu’il faut. Nous avons quelques labos à travers l’Afrique capable de le faire. Mais la plupart des discussions, c’est autour de la mauvaise information, de la sous-information, et de la propagande anti-technologie.
En compagnie d’autres scientifiques africains Professeurs d’université
Cette propagande anti-technologie tente de décourager nos populations. Ce sont des populations qui sont nombreuses à travers toute l’Afrique, et quand on veut présenter un pays africain, la première des choses, c’est qu’on a besoin d’être autosuffisant du point de vue alimentaire. Nous dépensons également des milliards pour importer la nourriture. Nous n’avons même pas le moyen de savoir quelle est la qualité exacte de cette nourriture. Et on n’a même pas peur de ça. Nos pharmacies sont remplies de médicaments qui nous soignent et que nous ne connaissons pas. Quand on te dit de prendre ce médicament, tu le prends sans problème. Mais lorsqu’il s’agit des technologies qui doivent nous permettre d’augmenter le rendement des productions dans nos cultures, il se trouve qu’il y a une peur derrière, et cette peur est animée par des gens qu’on appelle les activistes. Mais les activistes ne peuvent pas toujours être négativistes. Nous devons nous concerter entre scientifiques et voir comment on peut faciliter l’acceptation de ces technologies par nos populations. En commençant par les politiciens, et ça implique évidemment vous les journalistes pour faire connaître les vérités scientifiques derrière les produits OGM pour que les populations soient sûres, aient confiance en la recherche nationale. C’est pour ça qu’une des thématiques était comment donner une face africaine à la recherche sur les biotechnologies. Et Mme ici est docteur, elle a développé un sujet pour démontrer la confiance des populations africaines par rapport aux produits sortis de nos labos. Si vous doutez des produits qui sortent de nos labos, c’est une habitude des Africains, ils veulent surtout ce qui vient de l’Europe, d’Asie. Nous voulons que les Africains aient confiance aux chercheurs africains pour que la recherche africaine puisse développer les produits qui vont résoudre les problèmes de la sécurité alimentaire et nutritionnelle. Si nous avons acté la révolution verte, l’année 90, cette révolution biotechnologique, nous avons encore le temps de le rattraper et j’étais vraiment ému de voir que plusieurs pays africains se concertent, et qu’ensemble, nous comprenons que c’est un outil qui est à la portée des Africains, et que vous autres communicateurs, vous devez nous accompagner pour rassurer les populations qu’un OGM ne se fabrique pas pour mystifier les populations, et que ça suit des étapes. Un Docteur du Nigeria présent dans cette réunion a pris l’exemple d’Adam et Eve pour dire que la femme est venue du corps de l’homme pour dire qu’à partir d’un morceau de plant, on peut avoir plusieurs plantes, c’est le clonage. Si jamais on fabrique un OGM dans un labo, si vous prenez une variété de maïs, lorsque cette variété va être transformée en OGM, ça veut dire qu’on a ajouté un gène qui va résoudre un problème. C’est généralement un problème d’insecticide. Au lieu de pulvériser le poison sur ce maïs pour le protéger contre les chenilles, ce maïs se défend lui-même. Lorsqu’on va faire l’analyse compositionnelle, on doit montrer que le maïs jaune conventionnel et le maïs jaune génétiquement modifié sont exactement les mêmes en dehors du produit qui a été donné à l’OGM pour contrôler l’insecte. Et ce produit, on va voir, est-ce qu’il est toxique ou non ? Est-ce qu’il est toxique pour les animaux. Est-ce qu’il est toxique pour notre environnement? Sinon, de quoi avez-vous peur ? Puisque que quand vous allez aux Etats-Unis, vous mangez ça, quand vous allez en Afrique du Sud, vous consommez.
Le présent meeting des scientifiques venus de partout du Nigeria, du Kenya, de l’Ethiopie, du Burkina, nous sommes tous d’accord que les biotechnologies, c’est un moyen pour développer l’Afrique. Maintenant il se trouve que nos populations ont peur de ces biotechnologies. Et ça fait en sorte que la communauté scientifique se réunit à travers l’AATF (Fondations Africaine pour les Technologies Agricoles) pour voir les moyens qu’il faut mettre en place pour faciliter l’acceptation. Qu’est ce qui fait peur à nos frères ? Vous êtes communicateurs, moi je suis scientifique, sélectionneur des plantes, pourquoi moi je n’ai pas peur de manger, alors que vous, vous craignez ? Nous sommes réunis pour voir comment on peut développer un message fort pour nos politiques. Parce que dans le cadre de la conférence qui arrive l’an prochain, qui est organisée par l’AATF, il y aura des ministres, des députés, des investisseurs, il faut qu’on puisse venir avec un message pour qu’ils comprennent que les scientifiques africains se sont concertés et ils ont pensé que les biotechnologies, y compris le OGM, c’est un outil pour la sécurité alimentaire et nutritionnelle en Afrique. Pour dire que les Africains eux-mêmes sont capables de faire des OGM.
La biotechnologie, c’est de la science. Il faut que les pays acceptent d’investir un minimum. On parle de 0,2% du PIB investi dans la science. A l’intérieur de la science, nous allons parler de biotechnologie, nous allons développer nos propres technologies. Parce que si nous devons faire venir des technologies de l’Europe et des Etats Unis. C’est plus difficile de convaincre quelqu’un. Mais si ce sont vos propres frères qui sont dans les labo et qui développent ces produits, à travers les connaissances, les mêmes connaissances que les Chinois ont, que les Japonais ont, que les Français et les Américains ont, nous les avons. Et grâce à nos connaissances, nous pouvons développer nos propres produits et donner un visage africain aux OGM. On peut africaniser, harmoniser, se compléter. L’Afrique est un continent qui a été morcelé par son histoire, mais quand nous nous rassemblons, ici qui peut savoir qui est zambien, kenyan, rwandais ? Si on ne se présente pas, personne ne sait d’où je viens. De l’autre côté, on nous dit que, au Rwanda, au Kenya, chaque pays a sa politique. On ne peut pas harmoniser. Parlons le même langage quand il s’agit de financer la recherche, quand il s’agit de partager les technologies à travers notre continent. (Fin)