L’ancien député burundais Fabien Banciryanino
By LewisMudge*
La décision des autorités judiciaires burundaises de poursuivre un ancien membre du parlement indépendant – connu pour être un fervent défenseur des droits humains – vient s’ajouter à une série de signes préoccupants. Fabien Banciryanino, qui représentait la province de Bubanza avant les élections de cette année, est mis en examen pour atteinte à la sécurité de l’État, dénonciation calomnieuse et rébellion.
Le 2 octobre, un fonctionnaire administratif local et une dizaine de policiers ont mis fin à une conférence de presse au domicile de Fabien Banciryanino à Bujumbura et lui ont ordonné de se présenter à un centre de détention de la police connu sous le nom de Bureau spécial de recherche.
Le 8 octobre, un juge de la cour d’appel de Ntahangwa a rejeté sa demande de libération provisoire et l’a officiellement placé en état d’arrestation. Il a été transféré à Mpimba, la prison centrale de Bujumbura, où il aurait été contraint de rester sous le soleil pendant au moins une heure en dépit de sa santé fragile, en guise de « punition ».
En février, Fabien Banciryanino a voté contre une loi qui visait à donner au président de l’époque Pierre Nkurunziza le titre officiel de « Guide suprême du patriotisme ». Il a fait valoir qu’« il y a eu de nombreux meurtres ; des corps ont été jetés dans les rivières tandis que d’autres ont été enterrés après avoir été mutilés… [Pierre Nkurunziza] pourrait plutôt être traduit en justice ».
Le 7 octobre, Fabien Banciryanino a adressé un courrier à la Commission nationale indépendante des droits de l’homme (CNIDH) avançant qu’il était poursuivi pour ses prises de parole au Parlement protégées par la Constitution.
Des poursuites à l’encontre de Fabien Banciryanino pour avoir appelé à ce que justice soit rendue pour les atteintes aux droits humains violeraient son droit à la liberté d’expression. Les procureurs devraient présenter des preuves irréfutables reliant les actes ou les déclarations de Fabien Banciryanino aux accusations graves dont il fait l’objet et justifiant sa détention ou devraient le libérer sans condition. Dans le cas contraire, cette arrestation enverra un message délibérément glaçant aux politiciens tous azimuts.
Le nouveau président du Burundi, Évariste Ndayishimiye, a prêté serment en juin après des élections contestées et après le décès inattendu de l’ancien président Pierre Nkurunziza plus tôt ce mois-là. Depuis lors, la société civile burundaise a documenté près de 200 meurtres. La semaine dernière, le Burundi a rejeté la décision du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies de renouveler le mandat de la Commission d’enquête des Nations Unies sur le Burundi, jugeant la décision politisée.
L’arrestation de Fabien Banciryanino montre de manière saisissante le prix à payer lorsque l’on dénonce les abus au Burundi. Il est évident qu’une surveillance internationale est plus que jamais nécessaire. (Fin).
*Lewis Mudge dirige la division Afrique centrale de Human Rights Watch, une organisation internationale de défense des droits humains basée à New York.