Des tâches sur le corps ou symptômes de la lèpre
Bugesera: Ernest Bizimungu du village Kigeme, cellule Nemba, secteur Rweru, district de Bugesera, a un âge qui tourne autour de la cinquantaine. Il a vécu avec la lèpre durant quatre ans sans savoir qu’il avait cette maladie.
« J’ai su que j’avais la lèpre en 2005. Je me suis rendu à Kigali où j’ai bénéficié d’un traitement gratuit durant quatre ans. Maintenant je suis guéri. Je fais partie des agents communautaires de la santé et je mobilise les autres afin qu’ils évitent ce mal. La lèpre débute par une tâche tendant vers le rouge. Ce peut être une ou plusieurs tâches. Avec le temps, la partie avec une ou des tâches peut occasionner de douloureuses démangeaisons. Vous ne sentez aucune douleur au début. Seuls les médecins savent identifier le patient porteur de la lèpre, ainsi que ceux qui en ont été malades ou qui ont été formés. Les tâches peuvent couvrir le dos ou sous les pieds. Sans démangeaisons. Avec le temps, les doigts ou les orteils se durcissent ou commencent à tomber subitement. J’ai perdu mon temps en me faisant soigner dans la médecine traditionnelle où j’ai dépensé plus de cinq cent mille Frw. L’on me faisait croire que j’avais été empoisonné. Ce qui était faux », confie Bizimungu.
L’infirmier Célestin Rukundo
Il a tenu ces propos devant une vingtaine des journalistes en visite au Centre de Santé de Nzangwa, secteur Rweru, district de Bugesera, sous la supervision de RBC (Rwanda Biomedical Center) et du Forum des ONG du Rwanda, juste à la veille de la Journée Mondiale contre les maladies tropicales négligées (NTDs) ou neglected tropical diseases, dont fait partie la lèpre.
« Le médecin qui travaillait au centre de santé m’a identifié au marché comme présentant des symptômes de la lèpre. Mes oreilles avaient gonflé et pendaient comme celles d’une vache laitière. Il a décidé de m’emmener à Kigali. J’ai attrapé la lèpre par contamination. Et pendant les quatre années sans soins, j’ai contaminé deux membres de ma famille : mon épouse et un de mes enfants. Quand j’ai été testé porteur de la lèpre, l’on a procédé à l’examen de toute ma famille. Maintenant je suis un agent communautaire de santé pour conseiller les autres », poursuit Bizimungu.
Mme Esther Byukusenge de la cellule Batima, secteur Rweru, affirme qu’elle habitait l’île de Mazane au milieu du Lac Rweru où la lèpre est fréquente. Des médecins se rendent sur cette île pour soigner la lèpre. C’est durant leur visite qu’une tâche a été constatée sur son corps et la lèpre a été confirmée. Elle s’est fait soigner à temps et elle a été vite guérie.
« Quand vous constatez une tâche tendant au rouge sur votre corps, il faut vite se faire examiner. La lèpre se transmet par l’air infecté émanant d’une personne souffrant de cette maladie. L’île de Mazane est habitée par des gens d’origine diverses, rwandaise et burundaise.
L’île de Mazane a totalisé vingt cas de lèpre à un moment donné. Je connais d’autres personnes qui n’ont pas interrompu le traitement ou qui ont mal pris les médicaments, et qui ont des plaies incurables. Une de ces personnes en est morte. Il est des fois que l’on tend à stigmatiser les lépreux. Mais la population a été sensibilisée et sait que celui qui a commencé le traitement ne peut pas contaminer les autres », a encore dit Byukusenge.
Elle ajoute que les symptômes de la lèpre peuvent mettre entre 5 et 20 ans pour se manifester. Il importe de toujours mener une observation de la population pour dépister les cas de la lèpre. Les proches d’un patient doivent prendre un comprimé en guise de prévention.
Pour éradiquer la lèpre, l’on mènera toujours une mobilisation accrue de la population.
Hakizimana Kizito de RBC, division des NTDs
Pour Célestin Rukundo, infirmier du Centre de Santé de Nzangwa en charge des cas de lèpre et tuberculose, l’on peut garder le bacille de la lèpre durant une à deux ans sans manifester des symptômes. A cette étape, si on n’a pas fait soigner le bacille, les doigts commencent à tomber et les mains se rétrécissent. La situation devient extrême.
« Le Centre de Santé de Nzangwa compte 29 patients soignés qui ont pris des médicaments de façon régulière, et ils sont guéris. Cinq autres sont encore en cours de traitement », dit-il.
Hakizimana Kizito de RBC, division des NTDs, tuberculose et lèpre, confirme le propos de Mme Byukusenge sur les symptômes de la lèpre.
« Selon une étude menée en 2023 au Rwanda, il a été établi que le Rwanda compte 37 cas de lèpre dont 29 nouveaux cas et d’autres 8 cas dont la lèpre a récidivé. Les districts qui accusent plus de cas sont ceux frontaliers avec la Tanzanie, le Burundi et la RDC, c-à-d, Bugesera, Gisagara et Rusizi. Pour confirmer qu’un pays a éradiqué la lèpre, il faut que sur dix mille habitants, l’on ait moins d’une personne malade de la lèpre au moins chaque année. Le Rwanda arrive à 0,02 cas pour dix mille habitants. Il s’achemine vers l’éradication », a relevé Hakizimana. (Fin)