«L’infrastructure de qualité est constituée par huit piliers qui constituent des standards pour participer au commerce mondial» -L’Expert Coulibaly

L’Expert Adama Ekberg Coulibaly

Bujumbura: L’Expert Adama Ekberg Coulibaly (A.E.C.), Chef des initiatives sous-régionales au Bureau sous-régional de UNECA pour l’Afrique Centrale, explique dans une interview à André Gakwaya de Rwanda News Agency (RNA) que L’infrastructure de qualité est constituée par huit piliers qui constituent des standards pour participer au commerce mondial. C’était lors de la réunion des Hauts Fonctionnaires et Experts de l’Afrique de l’Est et du Centre à Bujumbura tenue du 26 au 29 Septembre 2023. Lire l’interview :

RNA – Infrastructure de qualité, c’est quoi ?

A.E.C. –  Nos institutions et nos Etats membres se sont déplacés ici à Bujumbura pour nous pencher sur la problématique de la qualité qui est aujourd’hui au cœur des enjeux. Surtout des enjeux de pouvoir disposer des produits d’exportation qui nous permettent de gagner des parts des marchés.

Les parts des marchés de l’Afrique au niveau des marchés mondiaux. Nous disposons seulement de 3 % des parts des marchés parce que nous n’arrivons pas à exporter suffisamment des produits sur les marchés mondiaux.  Alors que derrière la qualité, il y a les standards. Il faut disposer des meilleurs standards du monde au niveau de notre approche de transformation pour participer à près de 93 % du commerce mondial. Et nous n’avons pas aujourd’hui l’infrastructure qu’il faut pour pouvoir nous appuyer sur ces standards pour pouvoir exporter nos produits, nos matières premières après leur transformation en produits finis. Nous n’avons pas ces standards-là.  Et pour les avoir, il faut mettre en place une architecture, une infrastructure de qualité. Quand vous regardez une maison, il y a le toit et les piliers. Et c’est sur ces piliers que repose le toit. Il faut avoir aussi une fondation. L’image ici, c’est pour vous dire que quand nous parlons d’infrastructure de qualité, cela repose sur huit piliers : il faut avoir un cadre réglementaire, des textes pour créer un environnement légal, infrastructures d’évaluation de la conformité aux standards qui sont mises en place à travers des activités de normalisation. Il faut aussi des activités de surveillance des marchés pour éviter que nos économies deviennent la poubelle du monde. Donc, il y a un certain nombre de piliers qu’il faut mettre en place. Ce sont ces piliers qui constituent ce qu’on appelle l’infrastructure de qualité. Selon les enquêtes, l’Afrique ne dispose pas aujourd’hui de ces piliers qui constituent l’infrastructure de qualité. Le travail ici, c’était de venir expliquer l’urgence de vraiment travailler ensemble pour créer des ponts, des passerelles entre les pays. Ceux qui sont très avancés et ceux qui sont moins avancés, c’est voir comment travailler ensemble pour bâtir ces standards pour qu’on puisse vraiment participer au commerce mondial.

Durant son Exposé devant Mama Keita de UNECA Bureau de Kigali et les participants

« Les standards, c’est la route pour pouvoir accéder aux marchés les plus lucratifs. Les standards aussi, c’est la voie la plus rapide pour nous industrialiser » – Adama E. Coulibaly.

Les standards comptent aussi pour l’industrialisation. Quand on regarde aujourd’hui sur les marchés mondiaux, dans l’économie mondiale, ceux qui ont la maîtrise des standards industriels, ce sont ces pays qui arrivent à mieux exporter les produits industriels.  Il y a près de 14.000 normes ou standards dans le domaine seulement de ce qu’on appelle l’ODD 9. Au niveau des objectifs de développement durable, c’est l’ODD9 qui porte sur l’industrialisation, sur l’innovation, sur les infrastructures. Nous avons beaucoup de peines au niveau des économies africaines à nous approprier ces standards. Les standards, c’est la route pour pouvoir accéder aux marchés les plus lucratifs. Les standards aussi c’est la voie la plus rapide pour nous industrialiser. Mais nos pays n’ont pas encore mis en place ni les capacités, ni les institutions pour pouvoir rapidement se mettre à niveau pour s’aligner sur les standards internationaux pour que nous puissions participer au commerce mondial et compter parmi les économies industrialisées. Donc, c’est très important de venir aujourd’hui au Burundi avec tous ces Etats qui sont avec nous, de leur expliquer clairement le contour, le contenu, mais aussi les enjeux pour nous propulser vers l’agenda 2030 et 2063 de l’UA. Nous attendons donc des pays de vraiment se mettre dans une logique de coopération pour très rapidement apprendre comment fabriquer ces standards, comment mettre sur les marchés des produits de qualité et de pouvoir accéder à des parts des marchés plus grands.

RNA – C’est la base même pour mettre en œuvre la ZLECAF.

A.E.C –  Si si. Alors le projet de mettre en place une ZLECAF entre les économies africaines est le plus grand accélérateur, catalyseur de notre vaste projet d’intégration, de nous mettre ensemble en tant qu’Africain, en tant qu’économie appartenant à un même continent.  Ce projet de ZLECAF permettra de construire le plus grand marché jamais construit au monde. C’est très important que les grands décideurs, techniciens, planificateurs mettent en priorité l’élimination de toutes les barrières pour que nous ayons un seul marché, une seule norme pour pouvoir véritablement tirer les bénéfices, les dividendes, de pourvoir mettre à la disposition de nos producteurs, de nos entrepreneurs, de nos industrialistes, le marché le plus grand du monde. C’est aujourd’hui un marché d’environ 1,3 milliards d’habitants et qui va très vite passer à 2 milliards et même aller à 3 milliards d’ici quelques décennies. Donc, c’est important de pouvoir nous organiser à travers le développement, la promotion des standards qui seront bien entendu des stands africains, mais des standards qui sont une étape pour pouvoir très rapidement nous aligner sur les standards internationaux pour que nous puissions non seulement conquérir le marché africain, mais aussi des parts des marchés au niveau du commerce mondial.

Vue d’autres panélistes

RNA – La prochaine Expo de Novembre au Caire, vous êtes au courant ?

A.E.C –  Oui. C’est la Commissions Economique des Nations Unies qui fait en sorte que le continent africain devienne un seul marché, une seule usine, un espace de transformation de ses riches dotations dont elle a l’avantage de disposer, et cet évènement dont vous parler, c’est un évènement auquel nous nous sommes associés pour pouvoir accompagner le Secrétariat de la ZLECAF qui est basé à Accra. La CEA travaille avec l’UA, avec des institutions pour faire en sorte que cette opportunité de venir exposer ce que font nos entrepreneurs, l’exploitation familiale, ce que nos industrialistes ont pu mettre au point. C’est une opportunité pour la CEA d’accompagner ce processus, de montrer au monde entier ce qu’il y a de mieux, de bien fait aujourd’hui en Afrique. Comme vous le savez, le continent africain a toujours été un fournisseur des matières premières aux autres pour enrichir les autres. Aujourd’hui, nous voulons vraiment changer de cap. Nous voulons faire en sorte que l’Afrique devienne plutôt l’atelier du monde, le centre de gravité du commerce mondial. Pour que nous puissions devenir la vitrine de l’industrie, du commerce, il faut mettre dans un premier temps la ZLECAF, mais aller plus loin, cibler, viser très haut pour parvenir très vite au marché commun unique de l’Afrique. Voilà. C’est ça notre objectif ultime à atteindre. Donc, la ZLECAF n’est qu’une étape pour permettre en tout cas de nous former, de donner la possibilité à nos jeunes et à nos femmes ou à ces entreprise, ces PME qui existent aujourd’hui sur le continent africain, de mieux se préparer à la concurrence, de devenir des chaînes de valeur qui soient très compétitives, très agiles pour pouvoir vraiment tirer le plus grand profit de ce grand marché qui va se mettre en place. Nous ne voulons pas à travers la réalisation de cette grande entreprise regarder les jeunes et les femmes devenir plutôt des observateurs. Nous voulons qu’ils soient plus le moteur de ce processus qui va se mettre en place au niveau du continent.   

RNA- Mais nos économies ne sont pas encore attractives…

A.E.C –  L’attractivité. Nos économies ne sont pas attractives. Qu’est-ce qu’il faut faire pour changer ce visage-là que nous n’arrivons pas à attirer les investisseurs ? Qu’est-ce qu’il faut faire pour changer cela ? Ça c’est la thématique de l’attractivité. C’est le deuxième thème de notre réunion. Le premier thème, c’est la qualité ; le deuxième thème, c’est l’attractivité. Comment faire en sorte que nos économies deviennent attractives ? Donc ça c’est l’investissement.  (Fin)