Des habitants de la région de Beni en RDC saluent le passage de soldats de la paix dans un véhicule blindé de transport de troupes de la MONUSCO.
La Représentante spéciale de l’ONU pour la République démocratique du Congo a appelé mardi le Conseil de sécurité à continuer son appui à la population et au gouvernement congolais, en renouvelant le mandat de la MONUSCO, la mission de paix onusienne dans le pays.
Selon la cheffe de la MONUSCO, le Plan de transition conjoint qui a été soumis au Conseil, est une « véritable opportunité » et une feuille de route pour préparer la sortie « ordonnée et responsable » de la mission dans les années à venir.
« Cela ne doit pas occulter le fait qu’il reste beaucoup à faire pour faire taire les armes dans les provinces de l’est, favoriser le dialogue politique nécessaire pour ouvrir la voie à des élections crédibles et transparentes en 2023 et soutenir le renforcement à long terme des institutions du pays », a affirmé Bintou Keita.
Des femmes soldats de la paix de Tanzanie interagissent avec des femmes et des enfants à Beni, en RDC
La sécurité demeure le plus grand défi
Mme Keita, a fait état des progrès en ce sens, tout en soulignant le défi majeur que reste la situation sécuritaire à laquelle est confrontée la RDC.
La sécurité et la protection des civils dans l’est du pays reste le premier défi et « est sans aucun doute le plus grand », a-t-elle dit devant les Quinze.
Elle a expliqué que l’état de siège mis en place par le gouvernement dans l’Est du pays avait a permis un renforcement du partenariat entre la MONUSCO et les forces armées nationales (FARDC), qui a son tour se traduit « par des progrès en termes de planification et d’exécution des opérations ».
« A cet égard, l’ensemble des unités de réaction rapides devraient être déployées d’ici fin octobre pour renforcer nos capacités à protéger les civils lors des opérations conjointes contre les groupes armés, en conformité avec la politique de diligence voulue en matière de droits de l’homme », a-t-elle indiqué.
Droits humains et discours de haine
« Néanmoins beaucoup reste à faire, y compris pour faire en sorte que les droits humains de la population soient systématiquement respectés dans le cadre de la lutte contre les groupes armés », a estimé la cheffe de la MONUSCO, signalant le nombre préoccupant de violations des droits de l’homme par des acteurs étatiques et non étatiques, en particulier dans les provinces de l’Ituri, du Nord-Kivu et du Sud-Kivu.
« Entre juin et août, 367 personnes ont été victimes d’exécutions arbitraires et extrajudiciaires. 203 personnes, surtout des femmes et des enfants, ont subi des violences sexuelles », a précisé Mme Keita.
Des soldats de la paix tanzaniens de la mission des Nations Unies en RDC (MONUSCO) discutent avec des jeunes de la communauté dans la province du Nord-Kivu.
Elle a signalé que « dans certaines régions, notamment au Sud-Kivu, les conflits intercommunautaires sont alimentés par des discours de haine ».
« Je condamne sans réserve tout discours de haine, y compris les récentes déclarations encourageant le « nettoyage » des hauts plateaux et justifiant le meurtre de membres de la communauté Banyamulenge. Ces discours populistes et belliqueux sont un danger pour la stabilité du pays et devraient faire l’objet de sanctions judiciaires exemplaires », a martelé la Représentante spéciale de l’ONU.
1 personne sur 3 a besoin d’assistance, mais l’accès humanitaire est entravé
La situation sécuritaire et les contraintes d’accès à l’Est du pays continuent d’entraver les opérations humanitaires, dans un contexte où une personne sur trois a besoin d’assistance, a fait valoir la Représentante.
« L’insécurité alimentaire et les épidémies cycliques sont des préoccupations majeures. Les attaques contre des écoles et des hôpitaux ont exacerbé les défis humanitaires dans plusieurs régions de l’Est, en particulier l’Ituri. Avec plus de 5 millions de personnes déplacées à l’intérieur du pays, le pays a le nombre plus élevé de personnes déplacées sur le continent africain. Plus de 26 millions de Congolais souffrent d’insécurité alimentaire, soit 29% de la population », a précisé Mme Keita.
Face à cette situation, elle a exhorté les États membres à augmenter leurs contributions au plan de réponse humanitaire 2021, qui prévoit 1,98 milliard de dollars pour répondre aux besoins prioritaires et qui à ce jour, n’est financé qu’à un peu plus du quart.
Mme Keita a souligné « l’engagement ferme » de la MONUSCO et l’Equipe Pays des Nations Unies à suivre une politique de zéro tolérance pour l’exploitation et les abus sexuels, et assurer une assistance globale aux victimes.
« Suite aux récentes allégations concernant la riposte à l’Ebola, l’équipe humanitaire en RDC a renforcé ses systèmes de prévention et de lutte contre l’exploitation et les abus sexuels. Pour ce faire, 1,5 million de dollars ont été mis à disposition à travers le Fonds commun humanitaire », a indiqué la cheffe de la MONUSCO.
La consolidation démocratique et l’espoir des élections
« Si la formation d’un nouveau gouvernement en avril de cette année a été l’occasion d’avancer sur des réformes essentielles, l’attention des acteurs politiques comme de la société civile se porte de plus en plus sur les élections de 2023 », a déclaré Mme Keita abordant le processus de consolidation démocratique, « deuxième défi » en RDC selon elle.
Signalant le manque de consensus autour de la composition de la Commission électorale nationale indépendante, Mme Keita a réitéré la « nécessité d’un processus électoral inclusif et pacifique fondé sur le dialogue, la confiance et la transparence » et affirmé que « la MONUSCO poursuit ses bons offices auprès des acteurs de l’ensemble du spectre politique, notamment pour plaider en faveur d’une participation accrue des femmes à ce processus ». (End)