Faisant partie du cours supérieur du Nil, la rivière Muvumba située dans le district de Nyagatare est l’un des principaux cours d’eau tant par sa taille que par son importance économique au Rwanda. Son cours supérieur fournit de l’eau pour les plantations de thé dans les hautes altitudes du Nord, tandis que son cours inférieur sert et facilite l’irrigation des rizières, du maïs, d’autres cultures, et fournit de l’eau douce aux éleveurs.
Avec le soutien financier de la Banque mondiale, le Gouvernement rwandais a construit en 2015 un barrage et un réservoir d’eau pour US$ 10 millions pour aider les agriculteurs à faire face aux deux principales saisons sèches les plus rudes qui varient entre 3 et 5 mois.
Aujourd’hui, le barrage joue un rôle vital dans le district. I améliore la sécurité hydrique, énergétique, alimentaire et nutritionnelle en exploitant les ressources en eau pour l’irrigation, l’utilisation domestique, l’élevage et la production d’hydroélectricité, tout en assurant la durabilité des ressources et en renforçant la résilience face au changement climatique, et la variabilité.
Le projet fournit actuellement de l’eau potable à plus de trois cent mille (300 000) personnes et garantit que 7 380 hectares de terres agricoles sont irrigués pendant que les éleveurs peuvent faire paître et nourrir leur bétail.
Muhire Ganza, père de quatre enfants et propriétaire de deux parcelles de terres agricoles dans le secteur de Rukomo, est l’un des bénéficiaires qui en récoltent les fruits. Il cultive à la fois du riz et du maïs pour la consommation domestique et vend le reste au marché.
Il dit que le barrage et le système d’irrigation changent des vies à Nyagatare et que c’est un changement important. La saison dernière, il a profité avec jubilation d’une récolte exceptionnelle de sept tonnes dont trois tonnes de riz et de maïs respectivement, grâce au système d’irrigation par aspersion.
« Le projet a amélioré l’accès à l’eau potable et à l’irrigation, augmenté la production agricole et animale, ainsi que les revenus des agriculteurs. Avec les bénéfices de la vente de ses produits, le revenu supplémentaire lui a permis d’acheter du bétail et de payer les frais de scolarité et l’assurance médicale de ses enfants », a-t-il souligné.
Aujourd’hui, le projet profite au développement de l’agriculture dans les secteurs de Tabagwe, Gatunda, Karama, Rukomo, Nyagatare, Rwempasha, Musheri et Rwimiyaga.
Outre Muhire, Vincent Masengesho, un éleveur reconnaissant, dit qu’avant, ils nourrissaient le bétail avec de l’eau non propre d’Umuyanja, une petite rivière entre le Rwanda et l’Ouganda. Il a expliqué qu’ils parcouraient une longue distance à la recherche d’eau et qu’ils n’étaient pas productifs.
La FAO a contribué à résoudre les disputes entre éleveurs et agriculteurs en matière d’utilisation de l’eau.
Cependant, Masengesho note que son approvisionnement en lait pour la collecte de lait est passé de 20 litres à 50 litres par jour. Auparavant, les agriculteurs qui cultivaient la partie supérieure de la colline de Rukoma et d’autres secteurs détournaient d’énormes quantités d’eau de pluie collectée qui se déversaient dans le bassin versant, laissant d’autres agriculteurs et éleveurs se débattre dans des soucis, ce qui a déclenché des différends et des disputes.
Cependant, grâce au dialogue mutuel, les agriculteurs ont pu résoudre les problèmes d’utilisation du barrage grâce à des parties prenantes comme la FAO.
Elyse Kamurenge, la responsable agricole de l’Association des agriculteurs de Rurenge, apprécie la FAO d’être venue juste au bon moment, car en 2016, le rapport d’évaluation des besoins de la FAO a révélé que le manque de collaboration était le principal facteur à l’origine des différends et des disputes.
Pour éviter d’autres querelles et affrontements, la FAO a formé des agriculteurs et des dirigeants communautaires locaux à Nyagatare sur la manière de trouver un moyen de résoudre d’autres problèmes futurs en introduisant une solution innovante de gestion de l’eau.
Jean Bosco Manirafasha, du secteur de Karama, cellule de Gikagati, village de Nyakibanda comme l’un des apprentis, explique que les éleveurs de bétail ont eu des disputes avec d’autres agriculteurs parce qu’ils pensaient qu’ils avaient le droit d’accéder gratuitement à l’eau, mais la formation a ensuite permis aux agriculteurs de résoudre leurs problèmes.
Finalement, cela a motivé un cadre de partenariat entre les utilisateurs d’eau qui a contribué à augmenter la productivité ainsi qu’à assurer une utilisation équitable de l’eau.
“Grâce à la formation, tout le monde a appris à se connaître, à écouter. Nous avons appris à mieux communiquer, à développer la confiance entre nous”, a-t-il déclaré, en ajoutant :
“Avant, différents groupes d’agriculteurs ne pensaient qu’à eux-mêmes. Mais aujourd’hui, ils sont solidaires”.
En plus de cela, les agriculteurs ont été formés à la tenue de registres, à la transparence et au partage des informations financières, ce qui les aide également à négocier des paiements anticipés pour leurs récoltes et leur bétail avec les acheteurs.
Damascène Ngabo, un agronome du secteur de Kiyombe, cellule Gataba, qui conseille les agriculteurs au quotidien, déclare que pour soutenir les agriculteurs, les coopératives et le périmètre d’irrigation de Muvumba, les agriculteurs devraient être initiés à des programmes agricoles innovants, tels que la mécanisation agricole.
« Les agriculteurs devraient être formés à l’application d’engrais appropriés, à l’utilisation efficace de produits chimiques, tels que les pesticides et les herbicides afin d’augmenter la production agricole. Pour que l’agriculture irriguée soit durable, différentes parties prenantes doivent intervenir, des infrastructures doivent être construites pour le transport des produits t
Ngabo pense que l’introduction de pratiques agricoles améliorées comme l’irrigation a entraîné une augmentation de la productivité. Il affirme que les agriculteurs du district de Nyagatare ont acquis des compétences en gestion d’entreprise, élargissant ainsi leur accès aux marchés du pays en signant des contrats avec des acheteurs dans des districts comme Kigali.
Effet COVID-19 sur les agriculteurs de Nyagatare
Comme dans beaucoup de pays à travers le monde, COVID-19 a changé la situation au Rwanda. Les agriculteurs ont dû détourner l’argent qu’ils auraient investi dans les activités agricoles. Ils ont utilisé cet argent pour aider leurs familles à répondre à leurs besoins les plus immédiats.
Espérance Dusabimana du secteur de Gikagati, l’une des agricultrices touchées dans la riziculture, a dit que les premiers stades du confinement suite à la COVID-19 en raison des perturbations de la mobilité mises en place ont affecté les petits agriculteurs.
« Le transport et l’atteinte des clients étaient un défi, car nous n’avions pas de clients permanents. Nous allions généralement dans la Ville de Kigali pour chercher des clients, mais cette fois-là, ce n’était pas possible. Même les clients que nous avions, pendant ce temps-là, nous ont quittés parce que nous ne pouvions pas leur faire parvenir les produits », a-t-elle expliqué.
Dusabimana affirme en outre que même si le confinement a été levé, ils doivent encore se stabiliser financièrement. Elle dit qu’ils n’ont pas assez de capital pour réinvestir dans les activités agricoles. Bien que la mise en place du périmètre d’irrigation de Muvumba constitue un effort pour améliorer le bien-être de la population sur les plans social et économique et assurer la sécurité alimentaire, elle reste un problème urgent pour certains ménages dans certaines zones du district de Nyagatare.
L’explication avancée à ces limitations qui empêchent d’atteindre la croissance est que certains ménages pilotés par des femmes seules vivent d’une consommation alimentaire pauvre. Leurs bras pour nourrir l’ensemble des membres de la famille n’ont pas suffisamment de force pour travailler plus et atteindre une plus grande productivité.
Puis il y a d’autres ménages souffrant d’un membre atteint d’une maladie chronique. Le peu de revenu obtenu sert aux soins de santé de la patiente.
La troisième limitation est que les ménages qui exploitent des parcelles réduites à une superficie de moins de 0,1 hectare de terre cultivable n’ont pas un espace suffisant pour produire des aliments à la hauteur des besoins. Le risque est de se maintenir dans une pauvreté extrême au cas où l’on ne trouve pas une solution à leur problème. (Fin)