"A Shalio (Nord-Kivu), il semblerait que les forces armées de la RDC aient attaqué un camp de fortune de réfugiés hutu rwandais le 26 avril 2009. Les FARDC ont entouré le camp, tiré et battu à mort au moins 50 réfugiés et ont entièrement brûlé le camp", a déclaré Philip Alston, rapporteur spécial de l'ONU sur les exécutions extra-judiciaires, lors d'une conférence de presse à Kinshasa.
"Il semblerait que quelques 40 femmes aient été enlevées dans ce camp. Une petit groupe de dix femmes qui a pu s'échapper a témoigné avoir subi des viols collectifs. Les femmes portaient des marques de blessures graves. On leur avait coupé des morceaux de seins. Le sort des trente autres femmes est inconnu", a ajouté le rapporteur qui a effectué une visite de 12 jours en RDC, selon l’agence AFP.
"Le 10 mai, au moins 96 civils ont été massacrés par les rebelles hutus des Forces démocratiques de libération du Rwanda à Busurungi (près de Shalio, ndlr), à titre de représailles des tueries de Shalio", a précisé M. Alston.
Ce dernier massacre était connu, mais celui de Shalio n'avait pas été officiellement signalé jusque-là.
Interrogé sur l'identité des auteurs de la tuerie du 26 avril, M. Alston a déclaré: "Je crois pouvoir dire que c'étaient des ex-CNDP", les anciens rebelles congolais du Congrès national pour la défense du Peuple, ralliés à Kinshasa en début d'année et dont les membres ont été intégrés au sein des FARDC.
Les rebelles hutus rwandais, autrefois supplétifs des forces gouvernementales congolaises, sont poursuivis depuis mars dans le Nord et le Sud-Kivu par l'armée de Kinshasa, appuyée par les Casques bleus de l'ONU pour la logistique et la stratégie, dans la foulée d'une opération conjointe en janvier-février des armées congolaise et rwandaise.
Baptisée Kimia II, l'opérations actuelle des FARDC souffre d'un "manque de planification, de coordination et de coopération (…) à l'origine de tueries prévisibles et répétées", perpétrées également par les rebelles FDLR, selon la déclaration du rapporteur.
Depuis janvier, les rebelles rwandais, estimés entre 4 et 6.000 combattants, "ont commis en moyenne 50 à 60 tueries par mois, alors qu'il y en avait moins de 10 par mois en 2008. Des cas de viols brutaux ont accompagné ces atrocités", a-t-il relevé.
"Il est clair que l'opération Kimia II a été une catastrophe, un désastre, en matière des droits de l'Homme", a-t-il jugé.
Concernant la traque des rebelles ougandais de l'Armée de résistance du Seigneur (LRA) dans le nord-est du pays, "le gouvernement s'apprête à crier victoire (…) mais la triste réalité est que la LRA sévit toujours, les exécutions et les enlèvements suivent leurs cours", a estimé Philip Alston.