Ce Lundi 09 mai 2022, à 14h30 heure de Paris, a commencé devant la Cour d’Assises de Paris, l’audience au fond du procès Laurent BUCYIBARUTA, un ancien Préfet rwandais, poursuivi pour des crimes liés au génocide perpétré contre les Tutsi.
L’accusé et les chefs d’accusation
Né dans la commune de Musange en 1944, dans l’ancienne préfecture de Gikongoro dans le sud-ouest du Rwanda, Laurent BUCYIBARUTA, a été Préfet de la préfecture de Kibungo (de 1985 à 1992) avant d’assurer la même fonction dans la préfecture de Gikongoro sa région natale de juillet 1992 à juillet 1994. Il est accusé de génocide, complicité de génocide et complicité de crimes contre l’humanité. Les faits qui lui sont reprochés sont notamment l’organisation ou la participation à plusieurs réunions auxquelles ont été planifiés des massacres des Tutsi. Il est en particulier mis en cause en rapport avec le massacre de près de 50,000 Tutsi rassemblés à l’Ecole Technique de Murambi. Laurent BUCYIBARUTA nie toutes les accusations portées contre lui.
Mise en examen et procédure devant la chambre d’instruction
Laurent BUCYIBARUTA réfugié en France depuis 1997, a été visé depuis l’an 2000, par une plainte déposée par les associations SURVIE et FIDH et par des familles de victimes, plainte à laquelle le Collectif des Parties Civiles pour le Rwanda (CPCR) s’était joint en 2001. Il était également recherché par le Tribunal Pénal International pour le Rwanda (TPIR) qui l’accusait d’avoir ordonné aux miliciens Interahamwe qui étaient sous ses ordres de commettre plusieurs massacres contre les Tutsi. Selon l’acte d’accusation du TPIR, Laurent BUCYIBARUTA était poursuivi sur la base de sa responsabilité pénale individuelle et de sa responsabilité pénale en tant que supérieur hiérarchique pour six chefs d’inculpations : crime de génocide, de complicité de génocide, d’incitation directe et publique à commettre le génocide, de crime contre l’humanité constitué par les actes d’extermination, d’assassinat, et de viol.
Laurent BUCYIBARUTA avait été incarcéré en France entre juillet et septembre 2007, suite à un mandat d’arrêt décerné par le TPIR. Le Tribunal international avait fini par se dessaisir de l’affaire au profit de la justice française.
Le juge d’instruction en charge de l’affaire a émis le 24 décembre 2018 une “ordonnance de non-lieu partiel, de requalification et de mise en accusation devant la Cour d’assises”. C’est suite à ce renvoi que, cet ancien haut fonctionnaire rwandais se trouve devant la Cour d’Assises de Paris pour y répondre des charges de génocide, complicité de génocide et complicité de crimes contre l’humanité.
Procès devant la Cour d’Assises
L’audience de l’affaire de Laurent BUCYIBARUTA devant la Cour d’assises de Paris est fixée sur une période de deux mois allant du 9 mai au 12 juillet 2022. Ce procès, quatrième après celui des deux anciens Bourgmestres de Kabarondo (Octavien Ngenzi et Tito Barahira), celui de Pascal Simbikangwa – ancien officier des forces armées rwandaises, et celui de Jean Claude Muhayimana – un ancien chauffeur de la Guest House de Kibuye, est un procès historique dans la mesure où cet ancien préfet est le plus haut fonctionnaire jugé en France à ce jour pour des faits liés au génocide perpétré contre les Tutsis.
Dans ce procès, est prévu la comparution de plusieurs témoins – une centaine – dont certains devront faire le voyage Kigali – Paris, alors que d’autres seront entendus par visioconférence.
Suivi du procès
RCN Justice & Démocratie et ses partenaires ont mis en place un dispositif pour le suivi du procès en vue de faciliter l’accès à l’information aux populations rwandaises. Dans ce cadre, deux journalistes rwandais assureront la couverture du procès sur place à Paris sur toute la durée ; leurs comptes rendus du déroulement des audiences seront publiés par les soins de Pax Press dans les différents médias rwandais. De même, seront organisées des réunions d’informations avec les populations et avec les victimes dans les régions affectées, notamment dans le District de Nyamagabe. (Fin).
Ndlr : Cette note d’information est une communication du programme « Justice et Mémoire » qui vise à renforcer l’implication des populations affectées (hommes et femmes, jeunes et vieux) et des acteurs locaux dans les procès internationaux et nationaux de compétence universelle liés au génocide, afin de consolider l’unité, la réconciliation, la pérennisation de la mémoire du génocide et la cohésion sociale au Rwanda.
Ce programme est conduit par les organisations RCN Justice & Démocratie, PAX PRESS, Haguruka et Association Modeste et Innocent (AMI). Le programme entend suivre la suite de la procédure et informer sur le déroulement de ces procès.
Ce programme bénéficie du soutien financier de la Belgique à travers la Direction générale au développement (DGD). Il bénéficie également du soutien de l’Ambassade de France au Rwanda.
Les diffusions du programme n’engagent que RCN Justice et Démocratie et ses partenaires AMI, HAGURUKA et PAX PRESS.