Le Président du Pan African Movement Rwanda (1er à gauche), le Secrétaire d’Etat pour les pays de l’EAC, le Prof Nshuti Manasseh, remettant un certificat, la DG Shakila Umutoni, et d’autres membres du Mouvement
Le Mouvement Panafricain Branche du Rwanda a organisé à Kigali ce 25 Mai 2023 le 60ème Anniversaire de l’UA, et l’idée qui prédomine est : « Africa we want signifie : nous voulons des Africains engagés pour la défense des intérêts des Africains ».
« Je travaillais à l’UA et j’ai fait partie d’une délégation qui a participé à un Forum sur la lutte contre le terrorisme organisé en Arabie Saoudite. A la fin de la rencontre, des Africains demandent que la prochaine réunion soit tenue sur notre continent. Mais l’Arabie Saoudite souhaite la tenue sur son sol. C’est alors qu’un membre d’un pays africain se lève et émet la suggestion de maintenir la tenue de la prochaine réunion en Arabie Saoudite. L’assemblée conclut dans ce sens que le prochain Forum sera tenu en Arabie Saoudite. Sidérées, les délégations africaines se sentirent vaincues et abattues par la cacophonie qui persiste dans leur groupe. Alors que l’Afrique que nous voulons doit parler une même langue dans le concert des nations. L’Afrique que nous voulons, c’est d’abord des Africains engagés pour la défense des intérêts des Africains », confie aux participants l’actuel DG au MINAFFET en charge de l’Asie et du Moyen-Orient, Philippe Karenzi.
Certes, il y a beaucoup d’interventions pour rappeler l’engagement des Pères Fondateurs de l’UA (Nkrumah-Jomo Kenyatta-Nyerere, Hailé Sélassié-Hasting Banda-Kenneth Kaunda) pour montrer la vision qu’ils avaient : Un Afrique indépendante libérée du joug colonial, et solidaire, mais aussi avec une économie robuste et stable. Ce rêve rejoint les aspirations actuelles d’une Afrique que nous voulons : intégrée-prospère-pacifiée.
L’idée correspond au discours d’ouverture de la célébration du 60ème Anniversaire de l’UA par le Président du Pan African Movement, Hon. Protais Musoni, et la DG Shakila Umutoni en charge de l’Afrique au sein du Minaffet rwandais.
L’UA est maintenant dans la mise en place de la CFTA/ZLECAF. Elle est en train de créer un commerce vibrant entre pays africains, en renforçant plus de liens entre pays. On veut faciliter le libre mouvement des personnes et des biens au sein même du continent. On veut faciliter le droit de résidence et d’établissement. La stratégie de mise en œuvre de la CFTA/ZLECAF est de créer plus d’emplois par l’industrialisation et la transformation des ressources du continent. A part la guerre actuelle au Soudan, et des actes de terrorisme dans certains pays, l’Afrique est en général stable.
« Elle se bat pour être celle que nous voulons. Il faut investir dans ses différents secteurs : santé, infrastructures, transport, sécurité alimentaire, technologies, industrialisation. C’est la condition pour réaliser nos rêves pour le bon futur continent. Des mécanismes de collaboration et coordination entre pays ont été mis en place pour arriver », a indiqué la DG Shakila.
Dans le même cadre de la célébration, trois panélistes ont fait des présentations intéressantes qui ont retenu l’attention du public.
-L’ex Ministre en charge du Minaffet du Rwanda et ex-SG de l’EAC, Dr Richard Sezibera, a parlé de « pourquoi célébrer les 60 ans d’anniversaire de l’UA? »
-Dr Éric Ndushabandi, chercheur et Directeur de l’IRDP (Institut de Recherche et de Développement pour la Paix, interroge : Où est l’Afrique après 60 ans ? ».
-Le DG au MINCOM chargé de la CFTA/ZLECAF a parlé de la ZLECAF comme solution aux défis du continent.
Au 5ème Congrès du Pan African Movement (PAM) tenu à Manchester, des leaders africains comme Nkrumah-Nyerere-Banda, Kenyatta ont décidé que l’Afrique devait être indépendante. Il fallait éveiller tout le monde à lutter pour son indépendance. Nyerere devait aussi éveiller la RDC, le Burundi et le Rwanda.
Au 7ème Congrès du PAM à Kampala en 1964, l’on s’est penché sur les étapes franchies.
Shalika a souligné que Africa Freedom Day ou Africa Day vise à célébrer la lutte pour l’indépendance du continent certes. Mais c’est aussi une journée de réflexion sue les Pères Fondateurs de l’UA, sur l’histoire chargée des guerres dévastatrices comme le Génocide au Rwanda ou l’Apartheid en Afrique du Sud.
La lutte pour l’indépendance fut une époque difficile. Après les indépendances aussi, le colonisateur est revenu pour asseoir le néocolonialisme. Le Rwanda et ses divisions qui ont abouti au Génocides en est une illustration.
Il nous faut des Africains valeureux et intègres pour faire face aux défis et aux conflits. L’on compte certes 15 conflits en Afrique, en plus des pandémies. Mais le continent doit faire face à des grands défis à surmonter : le Marché Commun Africain (CFTA/ZLECAF), l’Agenda 2063 avec ses composantes qui sont les infrastructures, l’industrialisation et la sécurité alimentaire. L’important est de mettre ensemble nos capacités pour les exploiter. L’Afrique a 60 % des terres arables dans le monde. Elle regorge de 90 % des ressources minières du monde. Nous ne mettons pas en commun ces atouts pour les exploiter et être forts », a déploré Dr Sezibera.
Solution : il faut changer de perception
L’Ambassadeur Sezibera souligne que les Africains doivent changer de perception. Car, le grand obstacle n’est vraiment pas financier.
« L’autre problème est la prévention des conflits ; il faut revoir ici l’idéologie de la gouvernance. Africa for who ? Country for who ? Quelles sont l’identité et la gouvernance? C’est l’Afrique pour les Africains qu’il faut protéger, considérer leurs intérêts. Ensuite, l’on fera face aux problèmes émergents et urgents liés au changement climatique et aux pandémies », fait encore remarquer Dr Sezibera.
Dr Ndushabandi est plus analytique et plus critique envers ce 60ème Anniversaire. Il faut se relever et considérer le sens de cet anniversaire.
« L’afro-pessimisme fait un retour aux problèmes qui n’ont jamais été résolus, mais dont on ne doit pas rester prisonnier. La réalité est que l’Afrique est arrivée à une belle étape d’optimisme. L’important est de protéger encore des atouts en place, comme notre biodiversité, célébrer les riches ressources, la voie exemplaire de nos Pères Fondateurs de l’UA. Nous avons gardé notre identité depuis la colonisation, ainsi que nos valeurs. C’est un atout pour réaliser nos rêves et nos programmes politiques. Nous avons refusé la négation de soi. Nous réfléchissons toujours à des obstacles à relever. Nous bâtissons une destinée commune. Il faut nous en réjouir et la protéger. Nous avons des principes et des valeurs à partager avec d’autres », note Dr Ndushabandi.
Il relève qu’à un moment, l’Afrique croulait sous le poids de lourdes dettes qui ont été par la suite transformées en aides.
Certes, nous sommes encore bloqués par la médiocrité
La solution à ce culte de la médiocrité est de viser l’excellence et la performance afin de renforcer les systèmes en place. « Il faut des principes directeurs permanents solides qui nous servent de remparts en vue de cheminer toujours vers le succès et le but », dit-il, en poursuivant:
« L’interdépendance entre pays s’impose. La priorité est le leadership écologique. L’énergie de transition et les priorités de l’environnement sont en première place. Nous nous acheminons vers un leadership qui privilégie l’écologie. On ne peut pas bien entretenir un pays sans chercher à le rendre beau et sain. Un leadership visionnaire doit préserver la qualité de la vie dans la gestion du pays. L’on doit éviter la paresse et construire une société vibrante qui sait avoir des réponses concertées. Après avoir confronté ses vues à celles des autres. En guise de conclusion, il est bon d’aller de l’avant, mais en prenant des actions tangibles », conclue-t-il.
L’intervention du jeune DG Tony Kajangwe souligne la nécessité de connecter les jeunes générations aux rêves des Pères Fondateurs de l’UA.
Kajangwe déplore que pour aller de Kigali au Niger, l’on doit prendre un vol qui passe par l’Europe (Turquie, Espagne, Portugal, etc.). Faire de même au retour.
Il déplore la lenteur de certains négociateurs africains qui bloquent le processus d’intégration du continent et de mise en œuvre de la CFTA/ZLECAF. Pour rendre effective la CFTA/ZLECAF, il faut changer 660 lois au sein des pays de la CEA (Communauté Est-africaine). Autrement, il faut une législation forte des frontières.
Pour réussir la CFTA/ZLECAF, au niveau technique, on sait ce qui doit être fait. Il faut des négociateurs supranationaux, avec un esprit ouvert, qui ne se cramponnent pas aux petits intérêts actuels des Etats. Le Pan African Movement (PAM) a mobilisé les autres institutions pour dépasser ces blocages. Il nous faut des Africains qui ont de bonnes perceptions, qui visent loin à l’horizon une Afrique en marche », souligne le DG Kajangwe.
Dr Ndushabandi estime nécessaire de mobiliser les universités africaines pour les impliquer dans le Pan African Movement (PAM). Les jeunes peuvent être connectés aux aînés. Les professeurs peuvent mettre leurs cours à jour, et viser les priorités. Le Rwanda peut montrer ses publications sur les Juridictions à Justice Transitionnelle Gacaca, ainsi que leurs innovations. L’on recourra aussi à la Diplomatie Parlementaire et le Secteur Privé pour accélérer des transformations nécessaires.
Le DG Tony Kajangwe relève que les pays du Sud-Est Asiatique se sont développés par l’industrialisation, l’exportation et l’intégration. En une génération, ces pays ont connu un boom économique en utilisant le commerce. « Des pays importent le coton qui n’est produit qu’en Afrique. Ils transforment et nous ramènent des habits chers. L’inde, la Turquie, la Chine opèrent de cette façon. Il faut investir dans nos économies et transformer nos matières premières. Il nous faut aussi commencer par le commerce, exporter dans certains pays. Les autres suivront progressivement. Mais il faut rendre autonome l’UA, contribuer pour les 0,2% sur les exportations qui ont été convenues par les pays », note-t-il.
Le Ministre Jean-Chrysostome Ngabitsinze en Charge du Commerce et Industrie abonde dans le même sens et déplore qu’il y ait encore des négociateurs africains qui n’accordent pas de l’importance aux avis des jeunes et des femmes dans des négociations. C’est un constat qu’il a établi depuis qu’il a participé à six rencontres sur la CFTA/ZLECAF. Il déplore aussi que la CFTA/ZLECAF n’ait pas les moyens financiers suffisants pour son autonomie, afin qu’il vole de ses propres ailes.
« Nous continuerons à y réfléchir davantage et utiliserons les moyens en place pour avancer en esquissant d’autres innovations », dit-il.
Dans la même soirée, au Park Inn Hôtel de Kiyovu/Kigali, le Pan African Movement a reçu les Ambassadeurs accrédités pour continuer à échanger sur la célébration du 60ème Anniversaire de l’UA.
En date du 31 Mai 2023, en direction du Secteur Privé du Rwanda, le Pan African Movement branche du Rwanda a organisé une demi-Journée de célébration du 60ème Anniversaire de l’UA, avec des échanges sur les moyens de booster la CFTA/ZLECAF.
Sur le même thème de célébration du 60ème Anniversaire de l’UA, la Télévision du Rwanda (TVR a animé une riche émission instructive de 30 minutes de 14h00 à 14h30 en date du 30 Mai 2023 sur les Hauts et les Bas et leur Impact sur l’UA depuis 1963. L’on a déploré les divisions apparues au sein de cette organisation panafricaine depuis les pays des groupes Monrovia (pays tournés vers l’Occident) et Casablanca (pays africains tournés vers l’idéologie communiste et socialiste). Mais dans l’ensemble, les pays africains sont restés soudés pour la décolonisation de tout le continent et l’effondrement de l’Apartheid.
L’on a déploré que le Royaume du Maroc ait dû quitter l’UA suite au conflit du Sahara. Il est revenu plus tard, surtout que ce problème a été confié à l’ONU, et que le conflit est pratiquement en voie de solution finale, la marocanité de la Province du Sahara demeurant aujourd’hui une vérité confirmée et reconnue unanimement.
Aujourd’hui, les pays africains travaillent ensemble pour leur intégration et la réalisation de la Vision et de l’Agenda 2063 du continent, mais aussi la réussite de la mise en œuvre du Marché Commun Africain ou la CFTA/ZLECAF. Des défis subsistent et les pays travaillent pour les surmonter. Des stratégies sont mises en place pour atteindre les buts fixés. L’optimisme est permis. (Fin)