Par André Gakwaya
Huye: La communauté et l’Association Modeste et Innocent (AMI) en collaboration avec les autorités du Service des prisons (SCR) et des districts ont commencé à préparer les détenus qui seront libérés de prison après 25 ans de bagne à vivre en paix avec la société, selon le Coordinateur de AMI, Jean-Baptiste Bizimana.
«Ces détenus vont être libérés certes, mais leurs enfants et leurs familles ont honte des crimes que ces criminels ont commis. Bien plus, les femmes restées à la maison se sont mues en de véritables chefs de ménage, surtout que la femme comme pilier de la famille jouit maintenant de ses droits d’égalité. Face au rejet exprimé par la communauté envers les criminels, AMI a développé des programmes au niveau des prisons pour préparer les criminels qui seront libérés à pouvoir s’intégrer dans leurs familles, même s’ils y sont incompris. Le grand défi est que certains des détenus n’ont pas accepté de se repentir», a indiqué le Coordinateur de AMI, Jean-Baptiste Bizimana.
Il a tenu ces propos à Huye devant une dizaine de professeurs belges des écoles secondaires dans leurs pays et qui séjournent au Rwanda pour apprendre les bonnes pratiques de reconstruction du pays après le Génocide, surtout en matière de réconciliation et de consolidation d’une paix durable.
Après la visite à AMI, ces visiteurs ont effectué pendant deux jours des échanges avec les enseignants et les élèves des écoles secondaires qui sont le Groupe Scolaire de Huye, l’Ecole Notre Dame de la Providence (ENDP) de Karubanda, et l’Ecole Regina Pacis (ERP) de Tumba.
«Il faut préparer les jeunes afin qu’ils ne se comportent pas à l’avenir comme les adultes de 1994. Il faut éduquer et encadrer la jeune génération. L’on a commencé par les familles, les parents et les enseignants qui sont tous en contact permanent avec les jeunes. Pour ce qui est des génocidaires relaxés, ils sont prêts à vivre avec les autres. Nous ne devons pas les lâcher. Surtout qu’après un travail intensif d’une décennie pour les amener à changer, nous avons constaté une transformation profonde en eux. L’on peut être un cruel féroce au moment de génocide. Mais à un moment donné, il y a étincelle d’humanité qui se ravive pour inciter au changement. Nous avons su réveiller le sens de l’humain chez eux. Il faut toucher leurs consciences et ils avouent qu’ils ont fait du mal et qu’ils ont obéi aux ordres de leurs supérieurs», a encore relevé le Coordinateur de AMI.
A ce propos, l’on rétorque que les criminels auraient dû refuser de tuer leurs semblables et se comporter comme les Justes qui ont été même immolés parce que ils ont porté secours aux personnes en détresse.
«Il y a des détenus qui sont prêts à changer et à communiquer ce changement par des témoignages en public. La Prison de Huye compte douze mille détenus dont huit mille qui ont été condamnés pour crimes de génocide. Une grande partie de ce chiffre peut être libérée lors de la 25ème Commémoration du Génocide des Tutsi cette année. Mais l’on ne libérera pas les planificateur», a encore poursuivi le Coordinateur Bizimana.
Il a reconnu que le processus de transformation et de réconciliation a abouti à un résultat qui affiche un bon nombre de mariages entre jeune Hutu et Tutsi
«C’est certes le résultat du programme de réconciliation des Rwandais. Mais c’est aussi le triomphe de la force de l’Amour et de refus des divisions aberrantes entre Rwandais», a-t-il dit.
Les visiteurs professeurs belges ont voulu savoir s’il y a des femmes qui ont tué pendant le Génocide et qui sont condamnées par la justice, le Coordinateur Bizimna a répondu par l’affirmative, en déplorant qu’il y a des femmes malheureusement qui ont osé même aller déshabiller d’autres femmes rwandaises tuées pour s’approprier leurs habits. L’ex Ministre des Affaires Sociales Pauline Nyiramasuko qui purge sa peine en prison et le symbole hideux de cette image de femmes cruelles que le Rwanda ait enfantées à des moments les plus sombre de sont histoire tragique.
Mais le cas le plus affligeant est celui des enfants nés de viols perpétrés par les milices hutues sur des femmes tutsi. L’on a souvent caché la vérité à ces enfants qui marchent sur leurs 25 ans et qui ont des difficultés énormes à vivre dans une société qui les confondait à leurs géniteurs bourreaux.
«On les identifie maintenant. Ils sont profondément traumatisés et certains ont tenté même de se suicider. Les mères leur avaient caché la vérité. C’est une catégorie de jeunes qui ont besoin d’un support pour sortir d’une situation traumatique », poursuit encore le Coordinateur de AMI. (Fin)