By Ella Grappin et Léna Jaouen, Stagiaires Commission Justice Ibuka France
Compte rendu de l’audience du jour 1 – 1er octobre 2024
Ce premier jour d’audience commence par la présentation de l’accusé et l’énonciation de ses droits par le Président. Les trois interprètes ont ensuite prêté serment. Les jurés ont été tirés au sort. Six jurés supplémentaires assisteront aux débats.
Après la désignation des jurés, le Président a annoncé l’ouverture des débats. Les conseils des parties civiles ont alors affirmé leur souhait de maintenir les constitutions de parties civiles, ils ont aussi formulé des demandes d’aide juridictionnelle provisoires qui ont été par la suite acceptées. Plus de 750 personnes physiques sont parties civiles au procès. Maître Rachel Lindon représente vingt-neuf personnes physiques en plus d’Ibuka France. Maître Laval représente le CPCR ainsi que 530 personnes physiques. Par la suite, l’avocat général du ministère public souligne que la défense aurait versé des pièces le matin même dont le ministère public n’aurait pas été le destinataire. La Défense formula plusieurs demandes à la Cour :
• Elle demande notamment de déclarer irrecevables les parties civiles, étant environ 800, ces parties, selon la défense, doivent démontrer qu’elles ont perdu des proches dans la région de Butare et que cela est imputable à E.RWAMUCYO. Il faut démontrer un lien suffisant entre le préjudice et RWAMUCYO.
• Elle demande aussi de déclarer irrecevable toutes les parties civiles dont les actes produits devant les juridictions n’ont pas l’apostille.
• Elle demande le renvoi des dernières pièces envoyées par le ministère public.
• elle demande un complément d’informations judiciaires afin de vérifier la valeur probatoire des pièces
Elle demande le report de l’audience.
Les conseils des parties civiles ont répondu à la Défense. Concernant le premier point, Maître Laval a notamment souligné que déjà deux éléments étaient apportés : un lien de parenté entre les défunts et les parties civiles ainsi que l’endroit où les parties étaient assassinées. Ensuite, il a été souligné que dans le code de procédure pénale, la constitution de partie civile ne fait l’objet d’aucune obligation de forme. L’avocat général du ministère public souligne notamment que seulement 12 personnes sur les 800 parties civiles personnes physiques seront entendues et que le respect du contradictoire est respecté, personne ne pouvant savoir ce que ces personnes avanceront à l’avance.
Après une suspension d’une heure, le Président de la Cour se prononça sur ces différents points. Celui-ci affirme que toute personne peut se constituer partie civile. Si les victimes sont susceptibles d’être victimes des faits, cela est suffisant.
La Cour observe que les parties civiles ont fourni assez de documents permettant de considérer qu’un proche a été victime sur les lieux, à ces dates. La Cour donne acte de leur partie civile. La Cour considère que le fait que de nombreuses personnes se constituent parties civiles est cohérent au regard de la nature des crimes. Les autres demandes ne sont pas justifiées, ni opportunes à la manifestation de la vérité. La Cour rejette la demande de renvoi concernant les dernières pièces envoyées par le ministère public. Elle considère que la demande d’obtention d’informations supplémentaires n’est pas justifiée.
L’appel des témoins est ensuite effectué.
• Diane GASHUMBA ne sera pas auditionnée car elle travaille à l’Ambassade du Rwanda en Suède.
• Sosthène MUNYEMANA a fait valoir son droit de se taire car les faits qui lui sont reprochés représentent une connexité avec cette affaire. Il ne sera donc pas entendu.
• Antoine NDORIMANA sera entendu en tant que partie civile et non plus comme témoin.
• Mamérique MUKABANANA, épouse d’E. RWAMUCYO est exclue des audiences jusqu’à ce qu’elle soit entendue.
• Anastase NTEZILYAYO renonce à être entendu pour des raisons personnelles graves.
• Charles Onana sera finalement entendu le 14 octobre à 10h30 au lieu du 7 octobre.
• Emmanuel HABYARIMANA ne sera pas auditionné.
Le Président a ensuite effectué la lecture du rapport introductif, il a rappelé la procédure, les faits historiques ainsi que les éléments à charge.
La journée s’est terminée avec l’interrogatoire de personnalité de l’accusé. A cet égard, François Delbar, enquêteur de personnalité à Lille a été auditionné. Celui-ci a été en charge de l’enquête de personnalité d’E. RWAMUCYO en 2014. Celui-ci effectuera alors un résumé du parcours familial, scolaire et professionnel de l’intéressé, il mentionnera aussi sa situation financière au moment de l’enquête et les descriptions que son entourage fait de RWAMUCYO. L’enquêteur de personnalité sera tout d’abord interrogé par le président. Il soulignera que la religion catholique était très importante pour l’accusé. Il répétera que l’accusé a donné des éléments de faits historiques mais qu’il n’a pas développé sur ses ressentis.
Le ministère public a ensuite interrogé l’enquêteur sur la méthodologie de l’enquête. Celui-ci a alors précisé qu’il s’agissait d’entretiens individuels de 2 à 3 heures, à la suite duquel les personnes mentionnées sont contactées. La personne interrogée se présente avec les divers justificatifs. La défense a ensuite interrogé l’enquêteur sur le licenciement de RWAMUCYO en France et si cela avait pu être vécu par l’accusé comme un sentiment d’injustice. L’enquêteur a exprimé que cela aurait pu lui donner un tel sentiment mais que comme celui-ci ne s’est pas exprimé sur ses ressentis cela est dû à dire. Suite à ces questions, l’audition a pris fin.
La suspension de l’audience a été prononcée jusqu’au mercredi 2 octobre 9h30. (Fin)