Dans le quartier populaire de la ville de Kigali appelé Biryogo où officie Jean Claude Ngoga des heures voire une journée entière peut s’écouler sans qu’une seule personne ne vienne acheter un seul préservatif. Est-ce le signe que les gens ne s’adonnent pas ou peu aux relations sexuelles ? « Non », répond rapidement Ngoga, ce pharmacien que tout le monde dans le quartier appelle docteur tant il est à l’écoute pour donner conseil à tous ceux qui ont un petit souci de santé. « Beaucoup de gens font des relations sexuelle même s’ils ne viennent pas acheter des préservatifs dans des pharmacies. Nous savons que beaucoup s’en procurent auprès des vendeurs ambulants sur les rues parce qu’ils jugent que c’est plus discret », ajoute-t-il. Ce qui fait craindre le risque d’utilisation de préservatifs détériorés sachant que ces vendeurs de la rue ignorent les mesures de conservation saine.
Dans les quartiers populaires à l’image de Biryogo la population a tendance à prendre les pharmaciens pour les médecins ce qui permet aux pharmaciens de recevoir les confidences de beaucoup de personnes. « Nous connaissons des couples formés de jeunes qui, au début de leur idylle, venaient souvent acheter des préservatifs et nous demander conseils mais avec le temps ils ne viennent plus et quand nous leur demandons pourquoi ils nous répondent avec un petit sourire gêné, dit Ngoga et de déplorer : « Au fur et à mesure qu’ils passent le temps ensemble les gens pensent que l’utilisation du condom n’est pas très nécessaire ce qui est une erreur car susceptible de propager le VIH/sida ».
Dans ce quartier populaire se trouve également une forte concentration de prostituées et le pharmacien fait remarquer que cette catégorie de la population est plutôt sensibilisée sur l’utilisation du préservatif. Selon Ngoga les prostituées achètent les préservatifs régulièrement et quand elles veulent poser une question elles le font sans prendre des détours. « Elles nous assurent comprendre l’utilité d’utiliser le préservatif lors des rapports sexuels mais affirment qu’il leur arrive de céder à certains hommes qui offrent de fortes sommes d’argent tout en refusant des rapports protégés ».
Infection au VIH/Sida au Rwanda
Les premiers cas du SIDA au Rwanda ont été identifiés en 1983 au Centre Hospitalier de Kigali.
La première étude de prévalence du VIH dans la population générale, conduite en 1986 a montré une prévalence de 17,8% en milieu urbain et 1,3% en milieu rural.
La deuxième étude de prévalence du VIH conduite en 2005 dans la population de 15-49 ans chez les femmes et de 15- 59 ans chez les hommes (Etude démographique et de santé: EDS 2005) a montré une prévalence de 3% au niveau nationale, cette prévalence est de 7,7% en milieu urbain et 2,2% en milieu rural.
Par rapport aux autres caractéristiques socio-démographiques, l’EDS 2005 a montré que les femmes sont plus atteintes par le VIH que les hommes avec une prévalence de 3,6% contre 2,3%. La tranche d’âge qui enregistre une faible prévalence est celle des 15-19ans avec une proportion de 0,5% d’infectés, la tranche d’âge qui enregistre une prévalence plus elevée est celle des 40-44 ans avec 6,6% d’infectés.
Le niveau des connaissances sur le VIH reste toujours à améliorer dans la population générale. Les résultats de l’EDS 2005 montrent que seulement 53,6% de femmes contre 57,6% d’hommes ont une connaissance complète du SIDA.
Les résultats de la même étude montrent que l’utilisation du condom reste également faible, surtout chez les femmes où elle est de 19,7% contre 40,9% chez les hommes.
En ce qui concerne le niveau de dépistage du VIH, les résultats de l’EDS 2005 montrent que 75,8% de femmes contre 78,1% n’ont jamais fait de test de dépistage du VIH.
L’age médian aux premiers rapports sexuels est de 20 ans pour toutes les femmes enquêtées (entre 15-49 ans) et 20ans pour les hommes (15-59ans).
D’après les résultats des enquêtes de surveillance comportementales menées en 2000, (chez les jeunes âgés de 15 à 19 ans, les camionneurs et les prostituées) l’âge moyen au premier rapport sexuel serait de 14 ans chez les filles et de 13 ans chez les garçons. L’utilisation du condom étant de 10% chez les jeunes sexuellement actifs, de 74% chez les routiers et de 90% chez les professionnelles de sexe.
D’après les mêmes sources des données, 40% des camionneurs ont eu des rapports sexuels avec une partenaire occasionnelle et 35% en ont eu avec au moins trois prostituées (au cours des douze derniers mois ayant précédé l’enquête). Cependant, l’utilisation du condom n’est pas systématique avec ces partenaires occasionnelles.
Le niveau d’utilisation systématique était de 31% chez ceux qui ont des partenaires occasionnelles et de 47% chez ceux qui ont fréquenté les prostituées. Ces comportements exposent ces groupes aux risques de contamination d’autant que l’utilisation du condom n’est pas systématique avec ces partenaires occasionnelles.