Un nouvel espoir de justice pour un génocide commis contre les Tutsi congolais au Burundi en 2004

Le monument où reposent les victimes du génocide commis contre les Banyamulenge à Gatumba le 13 août 2004

Les rescapés et les proches des victimes de l’attaque du camp de réfugiés banyamulenge, – des Tutsi congolais de la province du Sud-Kivu -, à Gatumba au Burundi en 2004 ont porté plainte contre les auteurs présumés dans leurs pays d’origine, le Burundi, le Rwanda et la République démocratique du Congo.

L’ONG internationale de défense des droits humains Human Rights Watch rappelle que les plaintes pour génocide et crimes contre l’humanité visent à obtenir justice vingt ans plus tard. L’avocat impliqué dans ces affaires a déclaré que cette information avait également été transmise à la Cour pénale internationale (CPI) à La Haye.

Le 13 août 2004, les Forces nationales de libération (FNL) ont pris pour cible principalement les réfugiés congolais banyamulenge dans le camp de Gatumba, près de la frontière congolaise. 160 civils ont été tués et 106 autres blessés. 

Les réfugiés avaient fui les combats au Congo. Les FNL, un mouvement rebelle burundais à majorité hutue, ont tiré et brûlé vifs les réfugiés banyamulenge, tout en épargnant ceux d’autres groupes ethniques et les Burundais résidant également dans le camp.

Les recherches effectuées par Human Rights Watch à l’époque avaient révélé que les forces armées burundaises n’étaient pas intervenues, même si le massacre avait été perpétré à quelques centaines de mètres de camps militaires. Les soldats de la force de maintien de la paix des Nations Unies n’ont pas pu protéger les réfugiés car ils n’ont été informés de l’attaque qu’une fois celle-ci terminée.

Les FNL ont revendiqué la responsabilité peu après le massacre. Des années plus tard, son porte-parole de l’époque, Pasteur Habimana, a nié avoir fait cette déclaration. En 2009, le groupe a déposé les armes pour devenir un parti politique, marquant la fin de la guerre civile.

En 2004, les autorités burundaises ont émis des mandats d’arrêt contre deux dirigeants des FNL, dont Agathon Rwasa, une importante figure dans l’opposition. Cependant, il n’a jamais été arrêté. En septembre 2013, les autorités judiciaires ont annoncé l’ouverture d’un dossier contre Rwasa pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité présumés commis à Gatumba, mais la procédure a été reportée sine die.

Les nouvelles plaintes visent explicitement Rwasa et Habimana, selon l’avocat travaillant sur ces affaires.

Pour Human Rights Watch, malgré des années de retard, poursuivre les responsables de cet odieux massacre permettrait aux proches des victimes de clore ce chapitre et démontrerait que justice peut être rendue pour les pires atrocités de la région des Grands Lacs.

Le choix de ces trois pays en l’occurrence le Burundi, le Rwanda et la RDC est explicité par Maître Dominique Inchauspé, avocat du barreau de Paris qui représente la Fondation des survivants des massacres de Gatumba.

« Il y avait trois types d’assaillants qui avaient attaqué le camp de Gatumba : des gens du Front national de libération du Burundi à dominante Hutu, des gens des forces armées du Congo-RDC qui seraient des miliciens Maï Maï incorporés dans l’armée et puis des anciens miliciens hutu Interahamwe[les auteurs du génocide des Tutsi du Rwanda en 1194, ndlr]du Rwanda réfugiés au Congo », a expliqué l’avocat français au Collectif SOS Media Burundi. 

« Chacune de ces plaintes vise une des catégories d’assaillants. Et dans la mesure où le Congo a rejoint le statut de Rome, la Cour Pénale Internationale a compétence dans des affaires dans lesquelles des ressortissants du Congo-RDC ont pu commettre des faits de génocide ou de crimes contre l’humanité de sorte que nous avons également saisi la Cour Pénale Internationale ».

Selon Dominique Inchauspé, Docteur en droit qui a déjà publié des ouvrages de droit pénal aux presses universitaires de France et des fictions, les massacres de Gatumba constituent un génocide et un crime contre l’humanité juridiquement.

« Les gens de Gatumba ont été massacrés parce qu’ils étaient des Banyamulenge et c’est tout [….]. Donc pour une appartenance ethnique, ça en fait un crime contre l’humanité et un génocide…Une partie de génocidaires les ont rattrapés là-bas au Burundi où les attendaient d’autres génocidaires », éclaire-t-il.

Les victimes de Gatumba avaient fui les combats qui sévissaient dans leur pays avant d’être installées au camp de transit dans la zone de Gatumba en commune de Mutimbuzi de la province de Bujumbura (ouest) en 2004.  (Fin)