La Conférence a été organisée par le Gouvernement du Rwanda en partenariat avec la Coopération Technique Belge (CTB). Elle s’est tenue à Kigali durant trois jours, du 6 au 8 Juillet.
Au total, 60 participants ont suivi assidûment la réunion, dont des experts internationaux de la culture de la banane, des chercheurs, des responsables des institutions régionales et nationales de recherche, mais aussi des représentants du secteur privé ou qui font la promotion de la banane.
La Ministre de l’Agriculture et des Ressources Animales, Dr Agnès Karibata, a souligné la nécessité de rentabiliser la culture de la banane. « Nous travaillons avec les agriculteurs pour développer des méthodes culturales de la banane, adaptées et productives.
Mais aussi il faut faire usage des intrants agricoles et du système d’irrigation qui sont disponibles dans le pays afin d’accroître le rendement », a-t-elle indiqué aux participants.
Elle a reconnu que la production de la banane est encore faible, mais que la banane peut devenir l’une des principales cultures de la région. Seulement l’on ne doit pas la cultiver n’importe où.
La Ministre Karibata a reconnu les défis liés aux maladies qui attaquent la banane. Ceci est en rapport avec la discipline des agriculteurs exhortés à endiguer et à contrôler la maladie.
« Ce sont des problèmes que l’on peut contrôler avec de bonnes techniques, et c’est ma conviction », a-t-elle encore insisté.
Elle a relevé l’absence d’un cadre légal et juridique pour l’échange et la commercialisation de plants et de matériel végétal, raison pour la quelle l’on doit travailler avec le législateur pour établir des lois et règlements.
Mme Karibata a encouragé les participants à construire une sorte de coalition pour avancer avec les membres du secteur privé qui ont besoin de l’appui des institutions gouvernementales pour réglementer leur travail.
« Mais surtout, il est indispensable de pouvoir disposer de plantules saines pour la diffusion. Il importe de rendre nos interventions rentables au niveau économique. Et nous avons besoin pour cela d’un cadre de collaboration en tant que région », a-t-elle poursuivi.
Chaque pays a pu présenter l’état qui prévaut au niveau de la culture des bananes, des progrès et avantages enregistrés, et des difficultés rencontrées. L’on a abordé les réponses en perspective, surtout en matière de lutte contre la maladie et l’implication du secteur privé appelé à investir dans la recherche, la production, et l’exploitation de la banane.
Mais c’est surtout la descente sur terrain, dans le district de Ngoma à l’Est, qui a permis de voir les performances réalisées dans l’agriculture transformative de la banane jugée très porteuse. De nouvelles technologies ont été mises à la portée des fermiers qui travaillent en groupes pour apprendre et appliquer dans leur champ même ce qu’ils apprennent.
C’est ce qu’on appelle IAMU ou Ishuli ry’Abahinzi mu Murima (Ecole des paysans dans le champ ou Farmer’s Field School en anglais).
Recommandations importantes
Au terme de la Conférence, le Prof. Rony Swennen, principal organisateur de la rencontre et Directeur du Centre International de la banane à la KUL en Belgique, a passé en revue les principales articulations de la rencontre.
Selon lui, la vulgarisation et la documentation maintiennent leur impact pour la promotion de la banane que font les institutions de recherche, les universités et associations de producteurs.
Aussi faut-il s’attacher à accroître le rendement de la banane et privilégier la chaîne des valeurs. Il est temps que les faiblesses de passé deviennent les opportunités pour l’avenir. Ainsi l’on concevra des stratégies efficaces et l’on travaillera sur des technologies qui ajoutent de la valeur, tout en gardant à l’esprit la banane comme nourriture et culture de vente. Par ailleurs, les agriculteurs seront sensibilisés pour renforcer la lutte contre les parasitoses sévères et les maladies. Dans cet objectif, l’accès facile à du matériel végétal sain et de qualité est primordial.
On leur permettra d’obtenir les certifications de garanties sur les plantules. On trouvera une réponse aux besoins de standardisation et de cadre légal, ainsi qu’au besoin de crédits. A cet égard, la lutte contre les nématodes exige un besoin d’investissement minimum, car on doit recourir aux microbicides.
En ce qui concerne les variétés de la banane, l’on prendra soin de les évaluer et de voir où les intégrer. L’introduction de nouvelles variétés peut accroître, en effet, la production. Raison pour laquelle il est conseillé de sensibiliser les producteurs sur les variétés les plus utiles.
Le Prof. Swennen a émis le vœu d’organiser encore une autre réunion sur les chronogrammes des activités des participants à la Conférence. Une conférence dont on devra évaluer l’impact et donner des explications aux partenaires sur le mode de travail des responsables les plus impliqués dans le programme banane. Ceci servira de base pour concevoir un plan d’action.
Le Représentant Résident de la CTB, Jean-Yves Saliez a remercié les organisateurs de la Conférence pour permis son déroulement dans un cadre de travail bien structuré. Il a assuré que la CTB appuiera tous les efforts engagés pour promouvoir la culture de la banane dans la sous-région.
Il a demandé de bien formuler les recommandations pour mieux les traduire en action. Il a émis le voeu que dans une année, une autre réunion soit organisée afin d’évaluer les réalisations.
En guise de clôture de la conférence, la Ministre de l’Agriculture, Mme Agnès Karibata, a rappelé que les paysans profiteront de cette Conférence.
« Nous avons beaucoup d’informations scientifiques pour appuyer nos fermiers et nous pourrions même traverser les frontières pour assister les autres. Mais comment donc travailler ensemble ? », a-t-elle interrogé, en ajoutant à l’adresse des participants : « Il y a quelque part quelques experts qui peuvent faire mieux que vous. Gardez cela à l’esprit ».
Elle a rappelé que les paysans sont toujours en position d’attente de quelque recommandation que les participants peuvent apporter pour rendre performante l’agriculture dans la région.
« Rwanda : Le Projet IPM est à l’avant-garde dans la lutte contre les maladies des cultures, dont la banane » – Dr Jean-Pierre Busogoro
L’Assistant Technique du Projet de lutte intégrée contre les malades et ravageurs des cultures (IPM), Dr Jean-Pierre Busogoro, a indiqué aux journalistes que l’objectif de la Conférence régionale sur la banane qui s’est tenue à Kigali du 06 au 08 août 201, est de réunir des Experts venus de divers horizons pour partager l’information mise à jour sur cette culture.
« Le constat est que la banane est une plante importante dans la sous-région, c-à-d dans la RDC, Rwanda, Burundi, Uganda, Tanzanie, Kenya. Puis il y a beaucoup d’acteurs impliqués dans la vulgarisation, la culture et la recherche liées à la promotion de la banane », a-t-il dit.
Seulement, l’on n’a pas encore constitué un cadre d’échange d’information sur cette activité. Aussi trouve-t-on opportun de créer ce cadre d’échange d’informations pour avoir plus de connaissances et d’idées aux fins de promouvoir la culture de la banane.
« Car, c’est cela notre objectif commun. Surtout que dans la sous-région, la culture de la banane se heurte à des problèmes que partagent les pays de cette sous-région », a-t-il ajouté.
Il a ensuite abordé les méthodes culturales de cette plante au Rwanda. « Comment se présentent la culture et la transformation de la banane au Rwanda ? », a-t-on interrogé.
Sa réponse est qu’au niveau de l’Agriculture, il y a un développement visible selon les cultures en place. Cela dépend des connaissances qui s’améliorent à partir des résultats fournis par la recherche au fil du temps. Il reste à savoir comment faire parvenir les nouveaux résultats des recherches aux fermiers. C’est là que la vulgarisation agricole trouve sa justification.
Dans d’autres pays, il y a toujours à ajouter. La culture de la banane au Rwanda a toujours besoin d’une innovation pour accroître la productivité. Cela permettra de faire face aux défis et les paysans enregistreront des revenus en pratiquant une agriculture professionnelle et porteuse.
IAMU ou FFS : L’école du fermier dans le champ
A la question de savoir pourquoi les Rwandais ont besoin d’importer la banane, Dr Busogoro a répondu que beaucoup de lacunes résultent de la vulgarisation agricole. Il a donné l’exemple des activités en cours menées depuis ces derniers temps par le programme « banane » au sein du Ministère de l’Agriculture (MINAGRI). Il a cité différents projets et des associations comme IAMU (FFS) ou « l’école du fermier dans le champ même », à l’exemple de ce qui se fait dans le district de Ngoma, secteur Gashanda, pour promouvoir la productivité de la banane.
Les agriculteurs formés dans cette école y apprennent de nouvelles techniques à la base d’un réel et plus grand rendement. Ces fermiers connaissent maintenant les divers ravageurs de cette culture et la façon d’assurer la prévention. L’essentiel est de continuer à dispenser des connaissances aux fermiers, car ce sont eux qui font face aux défis sur le terrain. Et ce sont eux qui sont appelés à trouver des réponses sur place grâce aux connaissances suffisantes qu’ils ont reçues.
Le programme « banane » fait partie des autres objectifs de promotion des autres cultures comme la tomate, la pomme de terre, le maïs, le manioc et le maracuja, qui sont des priorités pour le pays. Les fermiers un peu partout dans le pays éprouvent des problèmes face aux maladies qui attaquent ces cultures. Dans le cadre du programme FFS, diverses activités sont menées pour apporter des solutions, y compris pour la banane qui occupe une place de choix parmi ces cultures.
Les difficultés rencontrées dans la culture de la banane sont les problèmes de maladies comme la bactériose (Kirabiranya), présente dans différentes parties du pays et qui détruit sérieusement la banane. Il y a d’autres maladies dont on ne parle pas beaucoup comme la maladie des charançons ou des ravageurs.
Les fermiers apprennent des solutions dans leur école aux champs (FFS). Il y a aussi les méthodes culturales qui doivent être mises à jour, par des recherches actualisées. Le fermier doit savoir planter le bananier. Il doit respecter telle distance entre un plant et un autre. Il doit distinguer la bonne terre à mettre dans le trou de la mauvaise terre destinée à rester en plein air pour être couverte de paillis et devenir plus riche.
Au total, 60 participants issus de la RDC, Burundi, Rwanda, Tanzanie, Uganda, Belgique, ont suivi assidûment la conférence de Kigali sur la banane. La plupart prestent dans des institutions régionales de recherches agricoles et dans des projets agricoles comme ceux axés sur la culture de la banane. Ils apporteront un plus pour renforcer la production de cette culture dans leurs pays respectifs, selon l’Assistant Technique du Projet IPM.
RDC : « Depuis 1960, la RDC n’exporte pas de la banane vers l’Europe. Il y a sept ans que le pays a relancé le programme de cette plante » – le Prof. Tshilenge de Kinshasa.
Le Professeur Patrick Tshilenge de l’Univesité de Kinshasa est spécialiste en phytopathologie (maladie des plantes). Dans ce cadre, il a mené certaines recherches sur les maladies du bananier, notamment dans leur phase de dissémination spatiale, autour des zones bananières péri-urbaines de Kinshasa. « Nous avons pensé que nous pouvons partager nos expériences avec nos collègues du Burundi, Rwanda, Tanzanie, Uganda, Belgique et des autres pays, tous présents à cette conférence régionale sur la banane », commence-t-il son message.
Et il donne la situation de la banane en RDC. Selon lui, de nombreuses variétés de bananes existent dans son pays. Le bassin du Congo constitue notamment un des pôles important du bananier « plantin », une variété qui est plus utilisée en RDC que chez les voisins burundais et rwandais, parce que le plantin nous permet de faire la nourriture pour toute la famille. Tandis qu’ici au Rwanda, c’est la banane à bière ou à cuire.
« Nous disposons d’une collection de plusieurs variétés de bananiers qui sont d’un coté, dans notre Centre de recherche sur les fruits et bananes qui est basé à Mvuazi, un centre de recherche de l’INERA situé à l’Ouest de la RDC, à environ 200 km de Kinshasa. C’est un peu l’équivalent de l’ISAR (Institut des Sciences Agronomiques du Rwanda) et ISABU (Institut des Sciences Agronomiques du Burundi). C’est un Centre qui avait été spécialisé depuis le temps de l’INEAC (Institut de recherche du temps de la colonisation belge) », a-t-il dit.
Il a informé que la RDC dispose d’un grand germoplasme, c’est-à-dire d’une grande collection de différentes variétés, chacune ayant ses caractères intéressants ou pas. Il y a un problème de synonymie dans l’appellation de certaines variétés, alors même que les caractères génétiques sont identiques. Le pays éprouve des difficultés pour augmenter la productivité, comme pour toutes les autres cultures. Car, il y a toujours des cultures qui ne sont pas performantes, selon le Prof. Tshilenge.
« Nous avons beaucoup de contraintes liées à la nature génétique même de la variété ou encore des contraintes externes comme des maladies qui sont la cercosporiose et le Brunchy Top (maladie du bouquet de sommet), la maladie des charançons qui attaquent les bananiers au niveau des collets. Nous n’avons pas encore heureusement la bactériose. Il y a d’autres contraintes du milieu quand par exemple il n’y a pas une bonne adaptation. Et les recherches sont orientées dans ce sens », a encoure poursuivi l’Expert congolais.
La cercosporiose est une maladie des raies noires. La maladie de Brunchy Top est une virose et une maladie qui se présente sous forme de touffe du sommet, ou du bouquet. Les feuilles sont rassemblées sous forme de rosettes au lieu de s’ouvrir et faire toutes les fonctions physiologiques, et la plante n’arrive pas à la production.
Heureusement pour la RDC, à l’Ouest dans la zone de Kinshasa et du Bas-Congo, il n’y a pas la bactériose qui sévit à l’Est. La RDC connaît aussi d’autres ravageurs comme les nématodes et les charançons. Le charançon est un insecte qui attaque le système racinaire et le bananier meurt.
L’on doit rappeler ici que ces difficultés peuvent exister. Mais l’essentiel est d’avoir des moyens, des équipements, des laboratoires et des technologies appropriées pour faire face. Certes, le bananier essaie de se défendre et l’agronome lui donne un appui en sélectionnant les bananiers résistants. Il prend des échantillons pour détecter les bananiers résistants.
Le pays a connu une longue guerre. Mais il dispose encore d’une politique solide et des structures en place dont la division de protection des végétaux au Ministère de l’Agriculture. Il y a des structures privées, et académiques, des centres de recherches qui ont cette expertise.
Il y a une clinique mobile des plantes qui aide le paysan où il est. On lui donne les conseils. Il n’y a pas des produits chimiques seulement. Il y a aussi la politique et le personnel pour intervenir. Mais des problèmes ne manquent jamais dans la pratique des choses, selon le Dr Tshilenge. Surtout qu’il y a seulement sept ans que la RDC a redémarré le programme de promotion de la culture de la banane.
Depuis 1960, le pays n’exporte pas de la banane vers l’Europe, alors qu’il le faisait pendant la colonisation. L’on comprend ainsi aisément les lacunes qui sont survenues suite à cet arrêt. La population cultive toujours la banane. Mais il n’y a pas jusqu’ici de plantations industrielles de la banane. Sauf quelques personnes autour des grandes agglomérations qui commencent à s’intéresser à cette culture pour la produire et la vendre.
« Connaître les variétés en présence, en vue d’introduire des variétés performantes au niveau de la productivité » – Le Prof. Dheda de Kisangani.
Selon le Professeur Dheda Djallo Bénoît de la Faculté des Sciences à l’Université de Kisangani, la banane fait partie des produits les plus importantes pour la sécurité alimentaire de la RDC. On estime la production annuelle totale à plus de 2.700.000 tonnes de banane, dont 60% pour la consommation locale. Une petite partie seulement est consacrée au marché.
Le travail qu’on a fait depuis un certain temps a été de connaître d’abord les variétés de la banane, les caractériser, c’est-à-dire les décrire du point de vue morphologique, agronomique, etc. pour mieux les utiliser et les évaluer du point de vue nutritionnel. Car, parfois une variété peut s’avérer d’un petit poids alors qu’elle a une meilleure valeur nutritive par rapport aux autres variétés de grand régime. Cela nécessite du travail au niveau de la recherche.
Ensuite vient l’étape de recherche sur l’amélioration des cultures et du sol sous le bananier. En RDC, une grande partie est fait de la forêt. La pratique culturale doit respecter aussi cette conservation. Elle doit initier des cultures adéquates qui n’entravent pas cette pratique. Il est à souligner que les échantillons que le Professeur Dheda a présentés révèlent des bananes sauvages, moins productives par rapport aux variétés modernes plus rentables. Pour lui, l’essentiel est de connaître les variétés en présence, en vue d’introduire des variétés performantes au niveau de la productivité.
Il faut toujours, comme on le fait à l’ISAR du Rwanda, des variétés productives, mais qui s’adaptent au Rwanda et qui sont aussi acceptées par le fermier. A partir de là, on peut les multiplier et les diffuser chez le planteur en grande quantité.
L’on a besoin de la formation en RDC, les structures de l’Etat sont en place et elles doivent être redynamisées. Il faut pour cela des moyens. Le personnel est à motiver pour mieux encadrer les agriculteurs d’abord afin qu’ils utilisent mieux les ressources disponibles. Pour cela, la Coopération Technique Belge (CTB) est interpellée. Elle appuie déjà en RDC le programme de multiplication des plants sains, et renforce les plants qui ne sont pas malades.
Les enquêtes auprès des paysans montrent qu’ils cultivent des rejets provenant de leur champ ou de celui du voisin. Et la maladie BBTV (banana Brunchy Top virus) se multiplie vite de façon végétative, avec ces rejets. La CTB renforcera la lutte de ces maladies en appuyant la capacité des laboratoires, en donnant un soutien dans la multiplication des plants sains, des variétés les plus préférées par la population pour le moment.
Le Prof. Tshilenge a poursuivi en disant que la Conférence régionale sur la banane de Kigali a été une excellente occasion pour les délégués congolais de s’inspirer des réalisations des autres pays, notamment le Rwanda au niveau du district de Ngoma et des FFS du secteur de Gashanda.
« Le Burundi dupliquera chez lui les bonnes pratiques du District de Ngoma (Rwanda) » – Ing. Niyongere.
L’Ingénieur Célestin Niyongere, chargé de la Recherche à l’Institut des Sciences Agronomiques du Burundi (ISABU), division des Fruits et Légumes, est détenteur d’une Maîtrise dans la lutte contre les maladies des plantes. Il prépare son PhD qu’il compte achever cette année à l’Université Jomo Kenyata de Nairobi, Faculté des Technologies. Il a indiqué que le Burundi dispose d’un programme de promotion de la culture de la banane. Selon le plan agricole initié par le Président de la République, Pierre Nkurunziza, le pays s’est engagé à promouvoir prioritairement cinq cultures vivrières, dont la banane. Les autres cultures sont le maïs, la pomme de terre, le manioc, et le riz.
L’on doit rappeler ici que le Burundi est l’un des pays de la CEPGL (Communauté économique des Pays des Grands Lacs) qui abrite l’IRAZ (Institut des Recherches Agronomiques et Zootechniques) qui dispose de la collection des bananes.
Ce pays dispose d’un programme de multiplication de plants de bananiers qui sont distribués aux paysans. On compte donner 700 mille plants aux agriculteurs. Il y a des laboratoires privés qui multiplient des plants de bananiers. C’est encore un plus qui renforce la culture de la banane. Puis il y a un programme de recherche pour améliorer la banane. L’on reconnaît qu’il y a dans différentes régions du pays beaucoup de bananiers improductifs sur une terre infertile.
« La solution est d’adopter dans ce cas une agriculture transformative, juste comme on fait dans le district de Ngoma au Rwanda. Nous dupliquerons au Burundi les bonnes pratiques de ce district. Ensuite nous apprendrons aux fermiers à utiliser des engrais, à aménager la terre et à sélectionner la meilleure qualité de bananiers à promouvoir chez nous », s’est engagé Niyongere.
Les 700 mille plants seront distribués dans toutes les régions du pays puisqu’elles sont toutes propres à la culture de la banane. Le problème est qu’il y a des maladies des plantes comme la BXW provoquée par des virus et la bactériose. D’autres sont dues à des virus comme la Brunchy Top causée par des virus et qu’on trouve dans le Bugarama au Rwanda. Il s’avère difficile de multiplier des plants pendant que sévissent ces maladies.
« C’est pour cela que nous avons interpellé les responsables en charge des plants de veiller à ce que la multiplication des plants ne subisse aucune entrave », a poursuivi le chercheur burundais.
L’on doit noter que le Président Nkurunziza dispose en province de Ngozi de champ de bananiers des variétés FHIA 17, et FHIA 25, qui proviennent de la Tanzanie. Ce sont des variétés productives modèles qui peuvent se répandre dans le pays. La difficulté qui se pose est que l’on doit distribuer ces plants en évitant la propagation des maladies dans des zones encore saines.
Par ailleurs, pour Niyongere, la Conférence régionale sur la banane de Kigali a permis de démontrer que le Rwanda a recouru au Projet IPM financé par la CTB pour promouvoir la culture de la banane.
« Nous envisageons de saisir la CTB pour lui demander de nous appuyer, juste comme elle a fait pour le Rwanda, afin que nous puissions mettre en œuvre l’agriculture transformative de la banane au Burundi », a-t-il indiqué.
Il a souligné que le projet IPM est maintenant considéré comme un modèle international suite aux performances qu’il a démontrées dans la protection et la productivité des cultures. Il suffit de prendre le cas du manioc qui souffrait de la maladie appelée la mosaïque. Le projet a éradiqué maintenant cette maladie par l’introduction d’une forme de manioc résistante.
Il y a aussi la maladie dite « striure brune » qui est apparue et qui a attaqué ces nouvelles variétés résistantes de manioc. Cela n’a pas empêché à IPM de poursuivre son travail de toujours bien cultiver, d’administrer des intrants organiques appropriés (bouse de vache) pour continuer à maintenir la plante forte et résistante aux maladies. C’est la condition pour faciliter l’adaptation de la culture.
« Fière de ce programme, la CTB s’emploiera à favoriser tout ce qui est transfert de technologies » – Le Prof. Lepoivre.
A la question de savoir si la Conférence de Kigali sur la banane a atteint ses résultats, le Professeur Lepoivre s’est déclaré satisfait que l’objectif poursuivi par la recherche ait été certainement atteint. « Tout ce qu’on a vu au niveau des FFS sur terrain montrent bien que les premières générations d’élèves ont adopté les techniques qui commencent à être diffusées en milieu paysan. Donc, les objectifs ont été certainement atteints », a-t-il reconnu, en ajoutant :
« Je suis toujours très fier de voir d’anciens étudiants, d’anciennes personnes avec lesquelles j’ai travaillé comme Jean-Pierre Busogoro, qui parviennent à réaliser d’excellents travaux. C’est une chose qui fait extrêmement plaisir », a répondu le Professeur Lepoivre.
En ce qui concerne des innovations qui seraient apportées par des thèses des étudiants rwandais, burundais ou congolais, le Prof. Lepoivre a répondu que beaucoup de choses existent déjà. Il y a seulement un problème de transfert. Par exemple, la production de matériel simple pour la multiplication des bananiers, les demandes de diagnostics qui sont bien connues. Il y a eu des étudiants rwandais, burundais, congolais qui ont été formés. En tout cas, pour certaines plantes, pour certains problèmes, l’on n’est plus au stade où l’on recherche des innovations pour trouver une solution. « Les solutions sont là. Il faut maintenant les transférer ».
Il a ajouté que la CTB va apporter son appui. C’est l’une de ses préoccupations. « Elle est très fière de la réussite de ce programme. Elle va certainement s’employer à favoriser tout ce qui est transfert de ces technologies », a fait espérer le chercheur belge.
Toujours selon le Professeur Lepoivre, en termes d’organisation, de gouvernance, le Rwanda semble en avant par rapport aux deux autres pays, le Burundi et la RDC, malheureusement, qui n’ont pas atteint le même niveau. « Autant je suis assez optimiste pour le Rwanda, autant je le suis moins, à courts termes, en tout cas pour les autres pays », a-t-il confié.
L’agriculture transformative de la banane de Ngoma s’étendra dans les pays de la région
Ngoma: Le Secteur de Gashanda dans le District de Ngoma est une référence régionale pour l’Agriculture transformative de la banane, selon le Prof. Rony Swennen, Directeur du Centre International de Recherche sur la banane de Leuven (Belgique).
« Le recours à des technologies innovantes dans une agriculture qui transforme la culture de la banane en vue de la rendre plus productive et plus rentable pour le fermier constitue un modèle de croissance que les paysans de la région sont conviés à adopter », a-t-il indiqué.
Il a tenu ces propos ce week-end lors d’une visite guidée dans la Province de l’Est, District de Ngoma, pour 60 participants à la Conférence régionale sur la banane qui s’est déroulée à Kigali du 06 au 08 juin 2011.
Le Prof. Swennen et son collègue Lepoivre s’estiment très satisfaits par la qualité du travail effectué par l’Expert qu’ils ont formé, Dr Jean-Pierre Busogoro, actuel Assistant technique du Projet Integrated Pest Management (IPM) ou Projet de Lutte contre les maladies des Cultures.
IPM est financé par la Coopération technique belge (CTB) et le Gouvernement rwandais. Il s’illustre avec succès dans la lutte contre les maladies qui attaquent la pomme de terre, la banane, la tomate, et le maïs, ainsi que par de nouvelles techniques culturales qui augmentent la production.
Le champ devient une école pour les fermiers regroupés en associations qui deviennent plus tard des coopératives de production. Cette école dénommée IAMU (Ishuli ry’Umuhinzi mu murima ou Farmer Field School (FFS) s’avère un lieu d’apprentissage par la pratique pour le paysan.
Pour Eugénie Dukuze, formatrice au sein de 14 FFS dans 4 cellules, dont Nyagashanda et Kamutsindo dans le secteur Gashanda, 240 membres du FFS ont disponibilisé 64 hectares de bananeraies pour transformer la culture de la banane sans détruire les bananiers.
« Un mois avant d’enfouir le plant de bananier dans le sol, nous creusons un trou de 60 cm de profondeur et 90 cm de diamètre. Entre un trou et un autre, l’on respecte une distance de 3,60 cm. Nous apprêtons ensuite du fumier organique que nous mélangeons avec de la terre de surface encore riche de matière organique aussi », a-t-elle fait remarquer.
Le jeune plant sain est débarrassé de ses écorces au niveau des racines. Puis il est immergé durant 20 minutes dans de l’eau bouillie à 50 degrés C afin de le désinfecter des parasites et autres charançons ravageurs. Il est ensuite mis en terre à 20-30 cm de profondeur. La partie qui reste à la surface est coupée à 20 cm du sol, en tenant compte d’orienter la coupure, c-à-d faire de sorte que l’eau qui ruissèlera sur le plant ne détruira pas la partie interne vitale du plant.
Le paillis posé autour du plant est mis à 60 cm afin d’éviter que les racines du plant ne se développent en s’étendant sur le paillis, et qu’il n’y ait pas aussi des parasites ravageurs qui attaquent la plante. De ce fait, les racines s’enfonceront dans le sol à la recherche de l’humidité et de l’eau nourricière de la plante.
A mesure que le bananier grandit, l’on prendre soin de ne garder qu’une seule pousse autour. Autrement dit, sur une seule souche ne seront maintenues debout que la plante-mère, sa fille, et sa petite fille seulement. Les autres bananiers qui pousseront sur cette souche seront coupés.
Au regard des récoltes réalisées, les résultats obtenus avec la nouvelle méthode transformative parlent d’eux seuls. Ce qui intéresse le plus les paysans et les force à adhérer à cette nouvelle méthode transformative de l’agriculture, c’est que l’on change la façon de cultiver sans éradiquer ni détruire les bananiers. L’on est ainsi arrivé à produire un nouveau régime de banane qui pèse huit à dix fois plus que le petit régime de la méthode traditionnelle.
« Actuellement, je récolte une banane pesant entre 75 à 90 kg et que je vends à 4 000 Frw ou 5000 Frw. Pas de commune mesure avec l’ancienne récolte où je vendais mon petit régime de banane à 500 Frw ! », s’exclame Madame Léoncie Nagahire de la cellule Kamutsindo.
Le témoignage de ces femmes et hommes regroupés dans IAMU est qu’ils se sont acheté chèvres et vaches, ainsi que des tôles pour leurs maisons ou leurs cuisines. Ils payent les frais scolaires pour leurs enfants, ainsi que les frais d’affiliations aux mutuelles de santé. Ils ont construit de solides maisons. Ils se nourrissent convenablement. Leurs conditions de vie se sont améliorées grâce à l’argent issu de l’agriculture de la banane, de la tomate ou du maïs.
« Nous envisageons l’avenir avec optimisme. Notre exemple est entrain de gagner du terrain pour transformer toutes les bananeraies du pays. Et la croissance du revenu des ménages est devenue une réalité chez nous », a répondu le Secrétaire exécutif du Secteur Gashanda.
Les participants à la Conférence de Kigali qui sont venus de la RD Congo, du Burundi, de la Tanzanie, de l’Uganda, et qui ont effectué la descente sur le District de Ngoma, ont affirmé qu’ils s’inspireront du modèle visité pour transformer l’agriculture de la banane dans leurs pays respectifs.
L’on doit souligner que le Centre International de Recherche sur la banane que dirige le Prof. Rony Swennen se trouve dans l’Université Catholique de Leuven (K.U.L.) en Belgique.
Ce Centre fait partie de la Biodiversité Mondiale. Il constitue une collection mondiale qui rassemble plus de 1300 variétés ou Banque des Gènes reconnue par les Nations Unies qui apportent leur appui financier.
« Notre devoir est de conserver toutes les variétés du monde, de les utiliser, et de les envoyer aux gens et institutions du monde qui en font la demande », a dit le Prof. Swennen. (Fin)