« Quelque fois, il arrive qu’une élève soit enceinte. Cette année une orpheline de 1ère année a été renvoyée de l’école pour s’être rendue coupable de cet acte », dit-elle.
A la question de savoir si à l’école secondaire, les élèves suivent des cours liés aux services de planification familiale, Evelyne Kabanyana répond que de tels cours sont dispensés, mais pas de façon suffisante pour permettre aux jeunes filles de se contrôler.
« Nous préférons nous garder de l’activité sexuelle précoce, surtout que pour la plupart d’entre nous, nous sommes des chrétiennes » poursuit-elle.
Et d’ajouter : « Bien plus, nous ne voulons pas interrompre nos études parce que nous sommes devenues des filles mères. Nous respectons encore les conseils de nos parents ».
Hakizimana Emmanuel, lui, est un jeune qui vient de terminer sans succès son école secondaire. Il affirme avoir une copine de 17 ans qu’il aime. Mais il n’a pas encore eu des relations sexuelles avec elle.
Les deux sont d’accord pour se marier à l’âge de la majorité autorisé par la loi, c-à-d quand son amie aura atteint 22 ans. Entre-temps, ils seront fidèles l’un ou l’autre, surtout qu’ils sont de fervents pratiquant au sein de l’Eglise Pentecôtiste de l’ADEPR.
Hakizimana n’aime pas regarder les films et les images sur Internet considérés comme de la pornographie et source de tentation pour les jeunes de la partie urbaine de la province de l’Ouest.
Depuis la 4ème année, il a été formé en ce qui a trait aux services de planification familiale. Il reconnaît qu’il y a une partie de jeunes sexuellement actifs. Mais la fréquence des filles mères n’est pas grande.
N’empêche que dans son village, l’on compte actuellement trois cas de jeunes filles devenues des jeunes mamans alors qu’elles n’ont pas de maris. Deux d’entre elles étaient parties dans la capitale Kigali.
« Les animateurs de santé existent dans notre village. Mais je ne les ai pas encore vus animer des réunions relatives aux services de planification familiale », témoigne-t-il.
Un autre élève de 2ème au secondaire reconnaît que certains de ses camarades se livrent à une activité sexuelle. Il estime que sur les 52 élèves de sa classe, 5 ont des relations sexuelles régulières avec de jeunes filles.
Un infirmier de l’hôpital Bushenge pense que les jeunes ne veulent pas avouer qu’ils sont sexuellement actifs. Il est donc difficile de chiffrer ceux qui s’adonnent au sexe.
Peut-être serait-il mieux de demander aux vendeurs des préservatifs qui fournissent ces produits aux jeunes. Ou encore, l’on ferait mieux de s’adresser aux animateurs de santé qui distribuent les condoms. Car, après un mois ils dressent un rapport sur les condoms distribués.
Cet infirmier qui habite le centre urbain de Cyangugu témoigne qu’il rencontre souvent dans les cafés Internet des jeunes de tous les sexes agglutinés sur des images pornographiques.
« Il est certain qu’après la séance, ces adolescent vont mettre en pratique ce qu’ils ont vu sur Internet », conclue-t-il avec conviction.
L’infirmier Venuste Twagiramungu du Centre de Santé de Nkamba à une vingtaine de km de Cyangugu reconnaît que certaines jeunes filles de son ressort qui ont entre 16 ans et 18 ans mettent au monde.
« Après trois mois, nous avons une fréquence d’un cas dans nos services. Ceci montre que les jeunes ont besoin d’être davantage sensibilisés sur les services de planification familiale », dit-il.
Twagiramungu juge dans ce cas nécessaire de renforcer ce genre de conseils au niveau des animateurs de santé, des écoles et des réunions publiques dans les villages.
Il pense que ce qui est à la base d’une sexualité active chez les jeunes a pour origine une grande curiosité. Les jeunes veulent connaître comment fonctionne leur corps. Par ailleurs, pour ceux qui ne peuvent pas se retenir, les condoms sont disponibles dans la proximité.
Twagiramungu a informé que les violences sexuelles contre la femme et la jeune fille sont tout de même rares dans le coin.
Au regard des statistiques, on remarque que toutes les écoles primaires et secondaires proches du centre de santé de Nkanka ont été sensibilisées pour le test volontaire au VIH/Sida (VCT).
« Sur demande des parents, nous avons testé au VIH/Sida tous les enfants des six établissements primaires et des deux autres de niveau secondaire », informe l’infirmier Twagiramungu.
« Pour les cas des élèves séropositifs ou qui ont d’autres problèmes de santé, nous contactons leurs familles pour un meilleur suivi », ajoute-t-il.
Au total plus de 600 élèves du Collège de Nkanka ont été testés au VIH/Sida, ainsi que plus de 300 élèves de l’ESI de Kibumba. Les établissements primaires dont les écoliers ont été testés sont Rwahi, Nkanka, Rusunyi, Rugaragara, Kibumba, Ntura A et B.
« Le fait de connaître son statut sérologique contribue largement à changer de comportement pour mieux protéger sa santé », conclut le jeune infirmier Vénuste Twagiramungu.
Le Directeur de l’hôpital du district de Gihundwe au centre urbain de Cyangugu, Dr Théophile Dushime, a informé qu’un centre des jeunes pour la santé reproductive des adolescents a été construit au centre urbain de Kamembe, juste à côté du marché et du centre commercial très fréquenté.
Et effectivement, les jeunes fréquentent leur centre de Kamembe qui leur fournit des orientations nécessaires sur la santé reproductive.
« J’ai commencé avec le centre en accord avec les parents qui ont accepté d’y envoyer leurs enfants », confie Emmanuel Ndamuzeye, aujourd’hui chargé du monitoring et de l’évaluation à l’hôpital de Gihundwe.
Pour lui, même si l’on n’a pas encore fait de recherche sur la sexualité active des adolescents, il s’avère que les jeunes s’adonnent au sexe.
« Les tests de dépistage effectués sur ces jeunes montrent qu’il y a des séropositifs. C’est un signe qu’ils sont actifs sexuellement. C’est dire que le chemin est encore long pour juguler la pandémie du Sida chez nos enfants » dit-il.
Il existe depuis 2005 un programme de santé en milieu scolaire au sein du Ministère de l’Education. Ce service devrait inciter les directeurs d’école primaires et secondaires à mobiliser les parents et les élèves pour le test volontaire au VIH/Sida.
Une telle initiative amènerait les jeunes à chercher des conseils, à connaître leur statut et à modifier fondamentalement leur comportement face à la problématique de la sexualité active.