La Fondation de l’Innovation pour la Démocratie installera son second Bureau à Kigali

Professeur Richard Makon

La Fondation de l’Innovation pour la Démocratie a lancé depuis deux jours à Kigali un camp de formation pour douze jeunes filles et jeunes gens issus de huit pays africains (Cameroun, Rwanda, Gabon, RCA, Angola, Tchad, Congo et RDC), et Dr Richard Makon (RM), enseignant et chercheur de profession, Coordinateur du programme Laboratoire ARC Côtier & Central, s’est entretenu avec André Gakwaya de l’Agence Rwandaise d’Information (ARI), et il nous parle de ces futurs « Médiateurs de la Démocratie ».

ARI- Pourquoi avoir choisi le Rwanda pour le lancement de ce camp de formation ?

RM –  Pour deux raisons au moins : 1. Une raison programmatique : En tant que coordinateur de laboratoire sous-régional, il m’est instruit par la direction générale de la Fondation d’essayer de couvrir tant que faire se peut par mes activités et mes programmes l’ensemble des douze pays de l’Afrique Centrale dans le sens le plus large du terme. Le Rwanda est l’un de ces pays qui sont du ressort de notre laboratoire. 2.  La deuxième raison est stratégique dans la mesure où le laboratoire est basé au Cameroun à Douala. La proximité avec les pays de l’hémisphère Nord de l’Afrique Centrale fait qu’il est très facile de couvrir les territoires du Gabon, du Congo, de la Guinée équatoriale, du Tchad ou de la RCA. Nous avions besoin d’avoir un pied dans les Grands Lacs et le Rwanda nous offre en termes de stabilité, de qualité infrastructurelle, d’effort dans la construction d’un hub pour recevoir les conférences internationales, un ensemble de dispositifs qui ne sont pas seulement infrastructurels, mais qui sont aussi techniques, opérationnels, qui nous permet d’envisager de façon sereine l’installation à Kigali du second pied de notre laboratoire.

ARI- Qu’est-ce que la Fondation attend de ces jeunes que vous êtes en train de former ?

RM – Déjà le Laboratoire ARC Côtier & Central est l’un des cinq laboratoires de la Fondation pour l’Innovation et la Démocratie. C’est une institution de droit sud-africain. C’est une Fondation africaine qui a son siège à Johannesburg et qui est organisée autour de cinq laboratoires qui sont en réalité ses démembrements régionaux : Nous avons le laboratoire Afrique de l’Ouest et méditerranéen qui couvre les pays de l’Afrique de l’Ouest et méditerranéens ; le laboratoire Nord aux portes de l’Europe qui est situé à Paris et qui prend en charge les questions de la diaspora et le laboratoire Afrique Centrale que je dirige en attendant les deux autres laboratoires d’Afrique anglophone et lusophone qui seront lancés d’ici la fin de l’année. Chaque laboratoire a une spécificité. La laboratoire ARC Côtier & Central est fondamentalement organisé autour des programmes de jeunesse. Notre public cible, ce sont les jeunes africains. Et donc nous avons trois principaux grammes cette année : le programme blogg@school qui forme les jeunes au blogging pour servir le débat ou le combat de la promotion de la démocratie en l’occurrence sur les plateformes digitales et les médias sociaux ; le programme Master chercheurs innovants qui permet de constituer autour du laboratoire une jeune élite intellectuelle pour accompagner non seulement nos programmes et ceux de nos partenaires avec lesquels nous travaillons et le trois même programme que nous sommes venus lancer à Kigali qui est le programme de médiation de la démocratie. C’est un programme qui a pour vocation de préparer les jeunes à la médiation démocratique pour qu’ils deviennent non seulement des acteurs politiques engagés, mais aussi leaders de la société civile, leaders de l’environnement économique, social et culturel. Le but est de renforcer les capacités en matière de leadership, médiation, lobbying, négociation de la paix pour qu’ils soient non seulement des citoyens engagés, mais des acteurs et des porteurs de la promotion de la paix et de la démocratie et du vivre ensemble dans l’ensemble de l’écosystème de notre sous-région.

ARI – Quel est l’état de la démocratie en Afrique ?

RM – La démocratie connaît un sérieux recul sur le continent depuis quelques années. Ce recul se manifeste par diverses modalités. D’autres sont politiques en rapport avec les défaillances intentionnelles, les déliquescences politiques, le recul de la liberté d’expression, le rétrécissement des espaces de liberté, l’avènement des interruptions brutales des pouvoirs constitués et l’avènement d’une floraison de coups d’Etat et des putschs qui sont les manifestations peut-être les plus visibles de recul de la démocratie. Mais il y a aussi en ce qui est du recul, diminution, aggravation de mauvaises conditions de vie qui impacte en réalité la capacité des citoyens à être des acteurs politiques tout à fait engagés bénéficiant d’un minimum qui les permet de vivre décemment, l’aggravation de la rupture du dialogue dans de nombreux territoires, et la multiplication des conflits ici et là dans l’ensemble de notre sous-région. Il y a donc une pluralité des manifestations de ce recul de la démocratie du fait qu’aujourd’hui la démocratie est devenue une proposition minoritaire en Afrique. L’objectif de la Fondation est de recréer les conditions non seulement du débat sain autour des valeurs de la démocratie, mais de proposer des programmes, des activités pour recréer les conditions de la démocratie sur le continent qui peut passer par un réarmement de la pensée, un renforcement des capacités non seulement institutionnelle, mais aussi des acteurs et des collectifs qui travaillent sur les questions de démocratie, parce que nous sommes convaincus que c’est ensemble à la fois les gouvernants et les gouvernés, la société civile dans son sens le plus large, les différents partenaires à la fois nationaux et étrangers, que nous allons réfléchir, recréer les conditions sur le continent d’une  véritable démocratie. C’est donc un travail de longue haleine et nous nous situons dans le temps. Nous commençons certes à poser des actions depuis un an, mais nous sommes convaincus que c’est un travail que va engager l’ensemble du continent pour les décennies à venir, car il s’agit de créer une démocratie africaine qui soit ancrée sur les valeurs africaines, qui s’inspire de la longue histoire africaine qui va fouiller dans les archives africaines ce qui peut constituer les doses de notre communauté, et l’épistème de notre communauté, pour construire une démocratie qui soit fidèle à notre conception de la vie, à notre pacte de civilisation, et finalement à notre conception du cosmos, de la place de l’homme dans ce vaste univers, mais aussi de l’ensemble du vivant parce que l’homme n’est qu’une composante parmi tant d’autres.  (Fin)