Ce Lundi 22 novembre 2021, à 14h30 heure de Paris, a commencé devant la Cour d’Assises de Paris, l’audience au fond du procès Claude Muhayimana, un Rwandais naturalisé Français, poursuivi pour crimes liés au génocide des Tutsi.
L’accusé et les chefs d’accusation
Claude Muhayimana est né à Kibuye, au Rwanda, en 1961. Au moment du génocide perpétré contre les Tutsi au Rwanda en 1994, il était chauffeur du Guest House Kibuye. Il a obtenu la nationalité française en 2010.
Il est accusé de complicité de génocide et de crimes contre l’humanité. Il lui est reproché d’avoir assuré le transport des militaires et des miliciens sur les lieux de plusieurs attaques, alors qu’il était chauffeur de la Guest-House de Kibuye. Il est notamment accusé d’avoir participé en avril 1994, à l’attaque de l’école de Nyamishaba et aux massacres de civils tutsis réfugiés à Karongi, Gitwa et Bisesero, entre avril et juin 1994.
RAPPEL DE CERTAINES ETAPES DE LA PROCEDURE JUSQU’AU PROCES D’ASSISES
Mise en examen et procédure devant la chambre d’instruction
Depuis 2000, l’ancien chauffeur faisait l’objet d’une première plainte déposée par le Collectif des parties civiles pour le Rwanda (CPCR)-plainte qui a été classée sans suite pour défaut de présence de l’accusé sur le territoire français. En août 2007, il a été visé par un acte d’accusation ainsi qu’un mandat d’arrêt international envoyé à la France et diffusé par Interpol sur transmission des autorités Rwandaises. Le 13 décembre 2011, la justice rwandaise a émis un mandat d’arrêt international suivi d’une demande d’extradition. La chambre d’instruction de la Cour d’Appel de Rouen a émis un avis favorable pour l’extradition, mais par un arrêt du 24 février 2014, la cour de cassation s’est prononcée en défaveur de l’extradition, sur motif que, la demande d’extradition était basée sur des lois entrées en vigueur après la commission des crimes.
Suite à une nouvelle plainte du CPCR, Claude Muhayimana est arrêté le 9 avril 2014, il sera placé en détention provisoire avant d’être mis sous contrôle judiciaire le 3 avril 2015.
Renvoi devant la Cour d’Assises
Le juge d’instruction a ordonné le 9 novembre 2017 son renvoi aux assises pour complicité de génocide et de crimes contre l’humanité par aide et assistance tout en abandonnant les poursuites pour une partie des faits. Le parquet a requis l’abandon des poursuites pour les massacres commis dans l’église de Kibuye et dans le stade de Gatwaro suite à la présentation par l’accusé, d’un alibi de d’absence sur les lieux lors des évènements.
Le renvoi devant la Cour d’Assises a été confirmé par la Cour d’Appel dans sa décision du 4 avril 2019. Un recours devant la cour de cassation serait en cours, mais ce recours n’est pas suspensif, donc pas de nature à empêcher ou mettre en attente l’examen de l’affaire par la Cour d’Assises.
Procès devant la Cour d’Assises
Ce procès, initialement prévu pour octobre 2020, avait été retardé en raison de la pandémie de covid-19. C’est ce Lundi 22 novembre 2021 qu’il a pu s’ouvrir. A l’occasion de la séance d’ouverture, il a été question de vérifier l’identité de l’accusé et de l’informer des infractions pour lesquelles il est poursuivi, en l’occurrence la complicité de génocide et de crimes contre l’humanité. Il a plaidé non coupable de toutes les charges présentées contre lui.
Dans ce procès, il est prévu la comparution de près de cinquante témoins. Certains de ces témoins –une quinzaine – ont fait le voyage Kigali – Paris, d’autres seront entendus par visioconférence.
Suivi du procès
La Cour a indiqué que le procès pourra durer jusqu’au 17 décembre 2021 sans indiquer la date exacte du prononcé, mais, il y a lieu d’estimer que le verdict pourra être prononcé avant noël.
RCN Justice & Démocratie et ses partenaires ont mis en place un dispositif pour le suivi du procès en vue de faciliter l’accès à l’information aux populations rwandaises. Dans ce cadre, deux journalistes rwandais ont été envoyés à Paris depuis le 22 novembre 2021 ; leurs comptes rendus du déroulement des audiences sont publiés par les soins de Pax Press dans les différents médias rwandais. De même, seront organisées des réunions d’informations avec les populations et avec les victimes dans la région de Karongi.(Fin).
Ndlr : Cette note d’information est une communication du programme « Justice et Mémoire » qui vise à faciliter aux populations rwandaises la compréhension et la participation aux procès de génocide sur base de compétence universelle, et favoriser l’intégration des apports de ces procès dans la mémoire de la justice du génocide.
Ce programme est conduit par les organisations RCN Justice & Démocratie, PAX PRESS, Haguruka et Association Modeste et Innocent (AMI). Ce programme entend suivre la suite de la procédure et informer sur le déroulement de ces procès.
Ce programme bénéficie du soutien financier de la Belgique à travers la Direction générale au développement (DGD). Les diffusions du programme n’engagent pas la DGD.